Bedroom tour poétique avec Gussstave

Précieuse découverte de 2020, le jeune projet Gussstave a sorti en juin dernier son premier EP Bedroom Posters (*Spring). Ponctué de ballades et de morceaux dream-pop entêtants, cet EP est le compagnon de route parfait pour ces vacances d’été, d’autant plus si vous avez choisi l’option road-trip en voiture.

On l’avait rencontré au détour de rues parisiennes et de paysages verdoyants dans le clip de Volcano, premier titre de l’EP sorti sur les plateformes. Photographie d’une jeunesse à la fois heureuse de ce que sont les petits riens de la vie et spleeneuse du temps précieux, le titre Volcano annonçait déjà la couleur de ce 5 titres composé de subtils morceaux. Cette ligne du refrain, « I think we just need to get high, like it’s 1969, oh we’re warming up the tides of time” dessine ainsi les regards d’une jeunesse sur ce temps présent. A l’instar de la génération 70’s, le temps est à nouveau venu de planer, au sens de suspendre le temps et de réfléchir à qui l’on est, à qui l’on devient. C’est l’une des réflexions que pose cet EP, étant donné que la solitude et la montée de psychotropes font survenir nos pensées les plus primaires liées à l’introspection et au questionnement de notre identité. Un sujet qui résonne autant aujourd’hui, comme si l’EP nous questionnait juste avant l’écoute : laisse t-on encore à la jeunesse la place et le temps pour rêver ? Allongés sur le lit de notre chambre on y pense, puis notre regard se perd sur les différents posters punaisés sur les murs et on presse le bouton play pour partir en promenade avec Gussstave.

On commence par goûter à nouveau au bonheur naïf avec Heather, un titre vaporeux où la ligne de basse funk se corrèle à la poésie des mots simples. Le chanteur et auteur franco-britannique du projet nous indique son intention de manier les images comme nous entrerions dans les divers posters de notre chambre d’adolescent. Après quelques instants à déambuler, l’onirique Flying Limousine nous ramène à des sujet plus intenses, ceux du mal-être et des aspirations à changer, à évoluer. « But it hurts when I see all the things I could be” s’allie à l’idée de décalage vis-à-vis de nos façons d’être, comme l’annonce le refrain « show me how wrong I am”, accompagné d’échos portés par le synthé qui semble mettre en valeur le message. Aussi sensible que soit ce thème, la douceur des compositions et leurs notes rétro nous rappellent que ce cheminement est essentiel dans la définition de nos personnalités et inévitable dans l’action de grandir.

Agir sans peur comme dans Marmelade, faire des tours de passe passe avec la vie sans en planifier les conséquences… les morceaux mettent en lumière tant nos emphases que nos coups de spleen ponctuels. Transition essentielle, l’interlude composée de bribes de voix enregistrées semble taper dans la fourmilière de nos souvenirs et de notre « dark side ». Sur une composition cette fois-ci plus sombre avec une guitare prononcée métal, la référence se fait claire sur nos intentions rebelles et nos colères enfouies.

Après l’interlude, Just like you arrive à point nommé, synthé toujours aussi bien amené et envolées pop sur le refrain, la vibe est toujours juste. On retrouve le temps d’être « un », d’être nous parmi la foule en quête d’amour, avant la dernière vague suave et nostalgique amenée par l’obsédant Volcano. Enfin, sur l’outro (Half of what I want to be) plutôt lounge, l’accent français du chanteur transparait parmi des effluves de voix enregistrées (dont celle de Léo Schrepel son ami et collaborateur) avant de laisser place à une conversation qui clôt l’EP formé comme un roman d’apprentissage. Une femme, qui se révèle être la mère de l’artiste, annonce :  « find out who you are and admit to yourself who you are« , utlime mantra de ce long parcours semé de rêveries et d’interrogations.

Avec cet EP, Gussstave s’ancre ainsi dans un univers tant personnel et introspectif que collectif et pluriel. Auteur et compositeurs des titres, le leader du projet a su proposer avec verbe et justesse une parenthèse musicale que l’on souhaiterait plus longue et développée afin de saisir l’ampleur de la palette artistique de ce jeune projet très prometteur.

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