We Hate Please Die :  » On est les power rangers du punk »

Le mois dernier ils faisaient salle comble à la Boule Noire. Juste avant cette merveilleuse date, nous avons eu l’occasion de papoter avec les membres de We Hate You Please Die. On a parlé de leur formation, de garage punk, des punks d’aujourd’hui, des power rangers, de leur futur. Bref on a interviewé We Hate You Please Die et on s’est bien amusé !

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La Fac B : Salut à tous ! Comment ça va ? 

Joseph : Ça va, tranquillement !
Raph : Et toi ? 
LFB : Très bien merci. 

LFB : On se sent comment quand on remplit la Boule Noire ? 

Mathilde : On change souvent de slip. En vrai, ça fait bizarre de se dire qu’il y a des gens qui paient pour venir nous voir. 
Raph : C’est même étonnant. Il y a plein de gens qui mettent des deniers pour assister à des trucs. C’est trop bizarre.
Joseph : C’est hyper touchant mais en même temps ça ferait presque flipper. 
Mathilde : Mais je suis hyper flippée !
Joseph : En plus c’est une Boule Noire. Ce n’est pas souvent qu’on fait complet en prévente sur un concert en tête d’affiche. Ça fait hyper flipper en fait.

LFB : Première tête d’affiche, premier complet. C’est beau.

M : Ouais putain.

LFB : En vous voyant, avec vos différences d’âge et de style, on se demande comment vous vous êtes rencontrés ? 

R : Avec Chloé on est jumeaux mais de deux mères différentes… Non mais je me suis dit qu’un jour il fallait que je la place un jour en interview. 
Chloé : Mais comment tu as badé.

LFB : Totalement, gros bug dans la tête. 

R : Tu veux l’histoire depuis le début ? Ma mère était très amoureuse de mon père, du coup ils ont commencé à se fréquenter et I was born in…(rires)
Non sérieusement, à la base j’ai rencontré Chloé. Quand je suis arrivé à Rouen on a eu envie de faire du son. On a testé plein de trucs et on s’est arrêté sur l’idée de faire du garage punk.
On a fait deux compos que j’ai trimballé un petit moment avant que je rencontre Joseph, qui a aménagé à deux semaines d’intervalle à côté de chez moi avec un jardin mitoyen. Pour la petite anecdote, c’était un jour où je bossais et j’ai entendu une grosse disto. Du coup je suis sorti dans mon jardin en me disant “Qui c’est qui écoute ça ?”. Et je tombe sur Joseph, avec qui j’avais trinqué deux fois un été.
C’était lui qui était en train de jouer. Pour le coup je suis allé sonner à sa porte, pour lui proposer de passer à la maison boire quelques bières et lui faire écouter quelques trucs. Je lui ai fait écouté et il a dit ok. Et puis il nous a présenté Mathilde.

M : Joseph que j’avais rencontré via un mec que je connaissais qui voulait faire un groupe. Il s’était rencontré par Facebook apparemment. On a quitté ce groupe parce que ça ne nous plaisait pas. Mais on s’est bien entendu, alors il m’a dit “hey viens, j’ai des copains qui font un groupe”. 

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LFB : Vous êtes complètement différents et complètement complémentaires. Ça rejoint une idée qui est assez importante dans ce que vous dites dans vos chansons et dans ce que vous êtes ensemble. Cette idée d’unité face à un quotidien qui fait chier, c’est toujours ce que j’ai ressenti en vous voyant et à travers votre musique. 

R : C’est vrai que c’est un petit un côté power rangers. On est les Spice Girls du punk, on a chacun un peu notre truc. Sur ça on se retrouve un peu, sur le côté freak qui cherche un sens à chaque chose. Sauf qu’au final tout n’a pas vraiment pas de sens. Mais en attendant ça fait du bien. Et si ça fait du bien à des gens qui viennent nous voir à des concerts au point de rendre complet une salle, c’est cool. Amusons-nous ensemble en attendant de trouver des solutions. Ou peut être que c’est un début de solution. Il faudrait faire des méga-concerts punk plutôt que des meetings politiques. 

LFB : Vous faites du punk, mais votre musique brasse un nombre important d’influences. Vous la définiriez comment vous ? 

J : Nous-même, on dit garage punk parce que c’est souvent plus simple de mettre une étiquette un peu courte pour que ça parle aux gens. Mais il y a beaucoup plus de choses que ça.
R : Les étiquettes ça colle. 
J : Oui surtout. Et quand tu les coupes ça gratte.
M : On nous avait définit comme punk dystopique, ou garage punk dystopique. Je trouve ça super bien.
R La boîte qui nous fait tourner ont Renan Luce et Ludwig von 88. Je trouve qu’on est pile au milieu. 
J : Pile au milieu je sais pas. Mais il y a beaucoup de choses différentes car on a des influences différentes et des groupes que l’un va aimer et l’autre détester.
R : Oui, je kiffe la pop et le rap, que j’écoute plus que le garage punk.

LFB : À quand le morceau rappé ?

R : Il y a des phases un peu plus en “spoken” mais bon si on fait du garage punk c’est pas pour faire du rap, sinon on écrirait des belles paroles et on chanterait pas en anglais. 

LFB : Ces dernières années on a pas mal entendu que le rock se mourrait face au rap, qui quant à lui a explosé. Que le punk aussi. Mais vous pensez quoi la scène punk rock française ? 

M : Je trouve qu’on dit plus souvent garage quand on parle du rock. Le mot rock, ça fait penser aux papys du rock, à cette vieille image. Ça serait peut être plus simple de dire qu’on fait du garage plutôt que rock. Mais c’est cool que le rap prenne un peu les devants. Il n’y a pas si longtemps c’était encore pas mal méprisé. 

J : Toujours. Encore maintenant il y a des salles où le rap va très peu. 

R : Le rap c’est la musique des revendications, C’est la musique où les gens s’identifient le plus dans les paroles. Et tu peux avoir un côté poétique qui ressort. Mais de toutes façons cette histoire du rock est mort c’est une grosse histoire inventée par Vice pour faire des papelards qui puent la merde. Je plaisante. En vrai, c’est un effet de boucle, un effet de mode malheureusement les gens sont très accrochés à ça.

LFB : Plus que sur la société, vous parlez plus d’une génération. Vous essayez plus de trouver des solutions que des dénonciations.

R : C’est la même histoire avec tout ce recycle. Ça fait des années qu’il y a des revendications. C’est les mêmes depuis les années 20-30, voir depuis la révolution si on veut vraiment remonter loin. Mais je trouve que le punk s’est embourgeoisé. Il a maintenant une bonne image. Celle de mettre des sapes qui sont un peu dark-punk-emo. Moi ça ne me fait pas délirer les groupes qui n’osent pas prendre de risques parce qu’il y a l’étiquette. Ça m’emmerde. Je peux aimer leur musique mais je trouve que ça manque clairement de message…c’est pour ça que j’écoute du rap. Ça dépend du rap. Faut faire quelque chose après, chacun sa façon de faire. Nous, c’est parce qu’on trouve qu’on étouffe, que tout le monde étouffe. Notre message arrive au bout parce que cette boucle elle va peut-être pas pouvoir continuer. On va être trop sur terre, c’est un peu le chaos annoncé. Alors comment trouver des idées pour freiner ce chaos? Et aussi pour dire arrêtez de vous branler sur vos stories instagrams pour savoir si vous êtes beaux ou pas et sauvez le monde plutôt que de faire de la pollution numérique.

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LFB : Justement, en parlant d’embourgeoisement dans le punk, vous pensez qu”il faut encore avoir une revendication pour faire du punk aujourd’hui ?

M : À l’origine oui, quand même. Mais je pense plus à la “commercialisation”. Par exemple, Idles, est clairement un groupe de punk avec des revendications, ils sont quand même à la Fnac. Il y a des groupes quand ils veulent faire un maximum de bruit, ils passent par de gros canaux de distribution. On n’est plus dans la même façon de faire qu’avant, où je trouve que tout était plus facile. Maintenant il y a plein de musique partout. Le style punk c’est un peu démocratisé. Les gens se disent ça ressemble à ça, on va faire ça et on y va. Mais je vois pas de groupes de punk qui n’ont pas de messages en fait.

R: C’est aussi un mot un peu fourre-tout. Déjà entre le punk des Sex Pistols et le punk des Clash il y a une marge énorme. Dans l’idée on se rapproche plus des Clash que des Sex Pistols. Mais encore un fois, je trouve qu’on fait de la pop. 

LFB : Pour rebondir sur la diffusion, votre principale revendication elle se retrouve là aussi. De refuser de passer par ce cycle de distribution, de préférer un “circuit-court” et des enseignes indépendantes plutôt que d’aller chercher la masse à la Fnac. Je me demandais si c’était important pour vous ?

R : C’est aussi pour pouvoir se regarde dans le miroir. Tu peux pas arriver et gueuler sur une société qui te file des boutons et à côté mettre ton beau vinyle à la Fnac qui s’appelle We Hate you Please Die. Pour moi ça n’avait pas de sens. J’ai rien contre la Fnac.
Ça fait juste parti d’un tout qui revient sur les multi-nationales qui n’en ont rien à branler. C’était un choix politique. C’est quand même anormal qu’il faille se trouver chez des grands distributeurs pour être un groupe qui marche. Merde on s’en fout. Et il faut que ça change. Ça fait crever les disquaires, ça fait du mal à l’industrie et c’est pas pour ce que ça rémunère les artistes que ça vaut le coup. 

LFB :Ce choix de ne pas être dans de gros canaux de distributeurs, c’est dans la même idée d’avoir fait votre label, donner une chance à des groupes et ne pas avoir ce côté vendu. 

J : Pas forcément, il y a des labels qui sont très bien. Mais au moment où on a sorti l’album, personne n’était intéressé. En même temps, on avait que fait 5-6 concerts avant. Donc pour le sortir, on a dû le faire tout seul. Du coup on s’est dit que ce qu’on a fait: produire, sortir et trouver des sous, c’était à peu près le job d’un label. Alors pourquoi pas faire le notre ? 

R : Et c’est vrai que c’est cool d’avoir beaucoup de libertés. Et c’était vraiment cool c’était d’apprendre plein de métiers différents. On dit pas que c’est carré partout. C’est cool, on a la liberté. Forcément ça coûte ton pognon à toi, mais comme tout projet qui demande un investissement à la base. Et quand tu veux te faire kiffer avec un pressage en vinyle…

M : Justement pour la Boule Noire, on a édité des vinyles avec Howlin Banana Records et le Cèpe records sans avoir besoin d’un gros label. C’est bien de pouvoir travailler avec plusieurs labels en même temps. Ça ouvre des portes, je trouve ça plus sympa plutôt que de travailler avec une personne fixe. Ça donne d’autres d’idées. 

LFB : Dans une époque où tout va super vite, ce qui est intéressant avec votre album c’est qu’il il dure dans le temps. Il y a des albums au bout d’un mois, tu n’en entends plus parler. Alors que le votre il dure dans le temps, ça fait un an et demi qu’il est sorti, plus le temps passe et plus les gens le découvrent. C’est plutôt a contrario et plutôt sain. 

J : Faut savoir que comme quand on l’a sorti, on avait pas de grands plans presse ou diffusions ou même de concerts, il y a plein de gens qui nous découvrent maintenant. Du coup c’est pour ça qu’il dure.

R : C’est aussi l’objet des médias. Au départ tu n’as aucune retombée et puis d’un coup tu as un article qui fait que tu as plus de salles qui t’ouvrent leur porte, puis on te propose une première partie, etc. Alors que l’album c’est toujours le même. C’est ça qui est rigolo. C’est le jeu de la diffusion. 

J : Il a même des gens qui font des chroniques maintenant alors que ça fait un an et demi qu’il est sorti. 

LFB : D’un côté vous faites les choses à l’envers. C’est un album que vous avez défendu, par le live, le bouche à oreille.

R : C’est ce qui a bien marché. C’est d’avoir eu tout ce qu’il y a en territoire normand et à Rouen derrière nous. D’avoir eu très vite des premiers concerts en bouche à oreille avec une petite vidéo filmée par un pote du morceau we hate you please die qui est notre chanson mantra de fin. On ne le voyait pas comme une chanson mais plus un truc cathartique, mais au bout du  3e concert les gens ont commencé à le chanter. Ça m’avait trop touché. Il y a même une vidéo où je perds tous mes moyens. Ça, c’est grâce au bouche à oreille et à la bienveillance des gens vis à vis du projet.

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LFB : es groupes que vous avez sortis Kumusta et S.A.D. Je trouve le choix intéressant. Quand les gens font des labels, ils vont chercher des groupes qui leur ressemble. Vous, j’ai l’impression que vous avez pris un spectre et le deux bout à l’opposé. 

J : Musicalement c’est peut être pas hyper raccords, mais ça l’est humainement. 

R : C’est des copains; mais surtout ils défoncent.

J : Ça reste de la musique qu’on aime bien.

R : On prend surtout des choses qui nous touche

LFB : J’ai ouï dire qu’il y avait un prochain album en préparation. La dernière fois vous ne pouviez pas trop m’en parler, mais est-ce que ça a changé ? 

R : Il y a deux extraits qui sont sortis à Noël. 

J : Il est en préparation, l’écriture est quasi fini, on devrait l’enregistrer au printemps.

R: On aimerait bien que ça sorte à la rentrée au maximum.
T’as un album, tu dois attendre parfois un an et demi alors qu’il est prêt juste pour rentrer dans le catalogue de plan promo. Tu fais une chanson sur Balkany, il meurt la semaine prochaine, elle sort dans deux ans, ça fout le seum. 

LFB : Au niveau de la couleur, j’ai l’impression que vous êtes un peu plus apaisés que sur le premier album.

M : On est plus apaisé. On change un peu de ligne compositrice. On a tous évolué depuis le premier album. On est toujours à balle d’idées mais on a envie de changer un peu de ce qu’on faisait avant. Je trouve que dans ce 2e album est beaucoup plus diversifié. Il y a des choses qu’on avait jamais expérimenté avant et qu’on a mis en avant dans ce 2e album. Qui n’est pas encore la.

J : On va chercher un peu plus loin. 

LFB : Après le premier était un peu plus brut.

R : Il y avait des trucs qui n’avaient pas vraiment de sens, mais ça sera un peu plus une réflexion sur le pourquoi du comment. 

LFB : Votre nom est une référence au film Scott Pilgri”. Vous verriez comment un collab avec Edward Wright (réalisateur de Scott Pilgrim ndlr) ?

R: Je lui ai lui envoyé un message sur Instagram, genre “tiens, écoutes mon album et si tu veux le mettre sur un film c’est cadeau”. Il m’a répondu “vu”. 

J : Au moins il l’a vu. 

R : En fait je sais même pas. Je lui ai vraiment écrit mais il ne m’a pas répondu. 

LFB : Faut écrire à Brian LeeO’malley (auteur de Scott Pilgrim ndlr)

R : Je l’ai fait, mais il a répondu pareil. Mais j’imaginerais un générique à la Baby Driver avec du James Spencer derrière. Ça serait trop bien ! Ils prennent une de nos chansons, je pense que j’arrête tout. 

LFB : Ça serait quoi vos “blazes” de jeu vidéo ?

M : Princesse Gothique Du 76. 

J : C’est déjà ton pseudo sur Messenger.

M : Non je m’appelle mathildedusangH sur Messenger.

Raph : Brad Bite? , Circle Bradpit ? Il y aurait forcément un calembour quelque part. 

LFB : Qu’est ce qu’on peut vous souhaitez pour le futur ? 

J: Qu’on garde les codes de la Face B ad vitam eternam pour faire des conneries de temps en temps. 

R : Je ferai des dick pics. (rires) Non, je ferai une bourde. Une bonne santé malgré les virus environnants. D’avoir tous nos membres malgré les guerres environnantes.

M : Et de faire encore beaucoup de musique. 

R : Et qu’on tombe pas dans un monde survivaliste. On n’est prêt pas pour Mad Max.

Daweare. Photo: non2non

Et on finit toujours comme ça, c’est quoi vos derniers coups de coeur ?

R : Une superbe série qui s’appelle Mytho, sinon musicalement, je dirai Deweare

M : Oui Deweare

J : Avril Lavigne.

M : Maitre Gims on aime beaucoup aussi.