Venus Furs : « Mon écriture vient d’une sorte de flux de conscience »

On a toujours eu un petit quelque chose pour la scène canadienne ici à La Face B. Et notre dernier coup de cœur en date est Venus Furs, le premier album du groupe éponyme, nom de scène de Paul Kasner, musicien perfectionniste aux influences shoegaze et rock alternatif basé à Montréal. La conception de l’album aux soundscapes de guitares psychédéliques et aux titres aussi chaotiques que mystérieux, a été un long travail de labeur réalisé sur 5 années. Nous avons voulu en savoir plus sur Venus Furs et avons posé quelques questions à Paul Kasner que nous avons pris d’assaut au saut du lit tôt le matin au Canada…

ENGLISH VERSION BELOW

Credit photos : Sean Mundy

La Face B : Comment ça va ?

Paul Kasner : Ça va bien !

LFB : Pourrais-tu décrire ta musique aux personnes qui ne la connaissent pas ?

PK : Oui, c’est du rock alternatif, du shoegaze et des influences psyché et un peu d’influence surf. Mais je dirais, principalement du rock alternatif/indie.

LFB : Quel genre de musique écoutais-tu en grandissant ? Et quelles sont tes principales influences avec Venus Furs ?

PK : Les deux premiers Oasis font partie de mes albums préférés. J’écoutais beaucoup de britpop quand j’étais plus jeune, comme Oasis et Blur ce genre de trucs. Puis j’ai écouté the Jesus and Mary Chain et Joy Division qui ont aussi beaucoup influencés mon écriture. Et des groupes comme le Brian Jonestown Massacre et les Dandy Warhols et Black Rebel Motorcycle Club, ce genre de trucs.

LFB : Comment as-tu choisi ce nom aux multiples connotations ?

PK : J’enregistrais sous mon propre nom. Et tout ce temps je cherchais un meilleur nom que juste le mien, et cela m’a pris énormément de temps d’en trouver un. J’adore cette chanson du Velvet Underground et j’ai lu le livre d’après lequel elle a été écrite, et j’ai pensé que c’était un nom vraiment cool. Donc pour moi c’est un hommage à toute la musique que j’aime, tous les groupes que j’ai mentionné plus tôt, ils viennent tous de cette tradition, je pense et de ces influences je veux dire. Et le Velvet Underground est un groupe gigantesque pour moi, et d’autres groupes des 60’s que j’adore comme The Kinks… et cela vient de ce monde et aussi, je suis un grand fan de littérature et donc c’est un peu ces deux mondes en un nom.

LFB : Je dois demander : Est-ce que le S&M fait partie de l’équation ?

PK : Non, le S&M n’était pas partie de l’équation pour le moment, mais on pourrait faire une autre interview dans un an ou deux et je vous dirai ce qu’il en est alors.

LFB : OK (rire)
Il y a beaucoup de chaos dans Venus Furs. Les paroles parlent d’anxiété, de confusion, ou de paranoïa… Est-ce que ce sont des états auxquels tu es confronté ? Est-ce de l’histoire personnelle ou plutôt une source d’inspiration ?

PK : J’ai fait en partie l’expérience de trucs comme ça. J’essayais d’explorer ces thèmes dans mon écriture.

LFB : Est-ce que faire cet album a été une forme de thérapie ? Une façon de s’exprimer ?

PK : C’était plus de l’inspiration. Faire l’album a été une sorte de… C’était vraiment… l’écriture de l’album et puis l’enregistrement de l’album ont été une expérience. C’était une super expérience mais je ne pense pas vouloir nécessairement la répliquer, en termes de juste, de la quantité de temps que j’ai investi dans chaque petit détail, je passais énormément de temps sur des tous petits détails, encore et encore, c’était… Les premières années j’étais juste en sorte de mode de correction.

Donc je ne sais pas si ça a été particulièrement cathartique pour ces scènes… Mais, une fois que l’album a été terminé, cela a vraiment été cathartique… Mais l’expérience en elle-même était… C’était définitivement un travail d’amour (a labour of love)….

LFB : Quand as-tu composé et enregistré Venus Furs ?

PK : Cela s’est fait sur une période de 5 ans en fait. Je l’ai enregistré entre 2013 et 2018. Mais je n’avais pas envisagé de le faire sur une période de 5 ans, et j’espère ne jamais plus ré-enregistrer sur une période de 5 ans, c’était beaucoup trop !
J’ai commencé avec deux amis qui allaient déménager presque immédiatement après que nous ayons commencé à travailler les morceaux, donc ça a été fait un peu dans la précipitation. Puis on a enregistré la plupart du reste et tout mixé et j’ai eu le son que je souhaitais assez rapidement, mais tout était vraiment négligé, il y en avait de partout… ce n’était pas de très bon goût, on voyait que ça avait été fait dans la précipitation.
Donc on a passé beaucoup de temps à essayer de fixer ça et on a passé encore plus de temps à faire des modifications pour être sûr de capturer le bon son… 

LFB : On a lu que tu étais un perfectionniste, as-tu réalisé l’album seul ou as-tu travaillé avec d’autres musiciens ?

PK : J’ai fait la plupart de l’écriture et la plupart des arrangements seul. Un de mes amis joue de la batterie sur l’album. Il a enregistré les sessions juste avant de déménager de Montréal à Vancouver et j’ai commencé à travailler avec cet ingénieur qui allait lui aussi déménager juste après avoir commencé l’enregistrement. Et puis j’ai pu finir l’album avec un ingénieur, un de mes amis, qui dirige le studio et qui s’appelle Simon Petraki. Et oui, l’album était… Je suis un perfectionniste comme tu le disais et j’avais comme une vision de ce que j’essayais de réaliser.
Et j’avais les chansons en tête un bon moment avant de commencer à les enregistrer, donc j’avais une idée très claire de ce que je voulais capturer.

LFB : Est-ce que tu peux nous parler un peu du morceau qui ouvre l’album, Chaos and Confusion ? De quoi parle cette chanson ?

PK : La manière dont j’écris les paroles… elles sortent comme une sorte de flux de conscience…
Ce qui en est sorti était, je veux dire la surface bien littérale, a fini par être sur… comme ce genre de jeux de cartes, où le dealer est comme… en train d’essayer de leurrer et de profiter de ses opposants et de juste prendre avantage d’eux. Puis à la fin, il y a comme un tournant, où il y a un genre d’humanité qui fait surface, une sorte de regret, et le fait de devoir le cacher pour devoir continuer ce qu’il doit faire… Donc ça a fini par être un peu une tentative de couvrir les émotions derrière les deux individus, mais plus celles du dealer…

LFB : Friendly Fire est un titre intriguant aussi…

PK : Oui… Comme je l’ai dit mon écriture vient d’une sorte de flux de conscience, puis j’y reviens ensuite.
Et donc Friendly Fire a fini par être une capture du sentiment de, comment pourrais-je le décrire… Je pense comme être incompris… Tu essayes de faire quelque chose ou quoi que ce soit et puis être, juste genre incompris par les gens qui te sont proches.

LFB : Il y a une sensation d’immensité et de grande liberté en écoutant tes chansons. Est-ce que les grands espaces naturels canadiens ont une influence sur toi dans ton écriture ?

PK : Je n’y ai jamais vraiment pensé. Il y a peut-être une influence subconsciente, mais à part ça je ne suis pas sure. Une de mes choses préférées en musique est la répétition jusqu’à ce que cela devienne presque hypnotique ou que cela provoque une sorte de transe, avec des subtilités pour rendre les choses intéressantes quand simultanément on se perd dans le son. Je trouve qu’il y a un parallèle avec l’impressionnisme qui a aussi été une influence pour moi, du fait qu’il y ai tellement de couches et de choses intéressantes qui se passe qui apparaissent floues quand on regarde de prêt, mais qui sont cohérentes et représentent des idées claires.

LFB : Comment as-tu vécu ces derniers mois ? Y avait-il un confinement au Canada ? As-tu continué à être créatif et est-ce que cela a affecté tes plans en tant qu’artiste ?

PK : Oui et non. Cela m’a beaucoup affecté en ce sens que je devrais être en train de tourner là maintenant. Donc ça a un impact énorme, mais ça va, je veux dire, j’ai vraiment hâte de faire la tournée quand tout ceci sera passé.
J’ai eu la chance de pouvoir continuer à travailler de chez moi pour mon boulot, et je sais que beaucoup de personnes n’ont pas eu cette chance. Mais oui, en ce sens j’ai eu de la chance. Et juste faire décoller cet album a été assez… Ces deux choses ont occupé beaucoup de mon temps. Mais j’ai aussi beaucoup travaillé à chercher des bonnes idées pour mon prochain album. J’ai plein d’idées incomplètes que j’essaye de terminer.
Et maintenant, je viens de sortir l’album qui me consumais depuis un certain nombre d’années. Donc ça, c’est parti. C’était un poids qui s’est immédiatement déchargé de mes épaules. Maintenant j’essaye doucement de retourner à juste être créatif sur des choses complètement nouvelles, sans avoir à penser à essayer de retoucher quelque chose sur l’album.

LFB : Tu habites à Montréal, comment est la scène musicale là-bas ?

PK : C’est… en ce moment c’est un peu plus dur… La scène est vraiment cool, ça a un peu changé au fil des ans, juste avant cette période il y avait une scène assez cool avec une influence psyché qui grandissait..
Il y a ce collectif qui s’appelle Mothland, ils organisent des festivals et sont un nouveau label et ils ont vraiment aidé et cultivé cette scène. Il y a d’autres super promoteurs comme Blue Skies Turn Black qui organisent des super concerts depuis toujours, mais en ce qui concerne la musique en elle-même, je trouve qu’il y a ce genre de fragments de différents petits sons. Donc oui, c’est assez intéressant, il y a plein de chose qui se passe dans la ville.

LFB : Y-a-t-il quelque chose que tu as découvert récemment que tu souhaiterais partager avec nous ?

PK : Oui… Mais je viens juste de me réveiller… Laisse-moi réfléchir…
Cette semaine ça a été Model Village de IDLES, cette vidéo est si cool et le morceau est génial.
Il y a aussi cet artiste qui s’appelle Patrick Krief que j’écoute beaucoup… Il y a une chanson géniale que j’ai entendu pour la première fois il y a peu et dont je suis obsédé. Ça s’appelle Cross Me Out des Sleeping Promises. C’est le second morceau, je recommande vraiment Cross Me Out.
Sinon Thanya Lyer vient de sortir un album génial et Double Date With Death et Orchids sont deux groupes de Montréal géniaux. No Joy vient de sortir un super album aussi et Gulfer sont géniaux…

Venus Furs est disponible ici

ENGLISH VERSION

La Face B : How are you doing ?

Paul Kasner : I’m doing great !

LFB : To people who don’t know you or your music, could you describe yourself and your music ?

PK : Yeah, it’s alternative rock, some shoegaze and some psych influence and a bit of surf influence. But I would say, primarily like alternative/indie rock.

LFB : What were you listening to growing up? And what would you say are your main influences with Venus Furs ?

PK : The first Oasis are two of my favourite albums. I listened to a lot of Britpop when I was younger, like Oasis, Blur that kind of stuff. I got really into the Jesus and Mary Chain and Joy Division. That really influenced my writing as well. And bands like the Brian Jonestown Massacre and the Dandy Warhols and Black Rebel Motorcycle Club, that sort of thing.

LFB : How did you come to pick this notorious name which is very connoted ?

PK : Well I was initially recording under my own name. And the whole time I was trying to think of a better name than just my own name, and it took me a really long time to figure out a name. I love that song from the Velvet Underground and I’ve read the book that it was written after and I thought that’s like, you know, that’s a really cool name. So, it’s also an homage to me, you know, to all of this music that I love like, you know, all the bands I listed before you know, they’re all coming from that tradition, I guess, and from those influences I mean, and the Velvet Underground is a huge band to me, and other 60s groups I love… with The Kinks and it was, to me, it comes from that world, and also I’m a huge fan of literature and so it’s kind of both worlds in with that.

LFB : I have to ask, is S&M part of the equation?

PK : No S&M wasn’t part of the equation as of yet but, we can have another interview to check in and like in a year or two, I’ll get back to you.

LFB : Alright (laugh)

There’s a lot of chaos happening in Venus Furs, your first album. Some of the lyrics talk about anxiety, there’s confusion, paranoia, are these states you are confronted to, is it’s like personal history ?

PK : I’ve experienced different bouts of things like that. I was trying to explore those themes in my writing.

LFB : Has the making of the album being a kind of therapy ? Like some way to take that out or is it inspiration ?

PK : It was more inspiration I think the actual… Well, making the album was kind of… It was really like… the writing of the album and then the recording of the album were an experience. It was a great experience to have but I don’t think I want to replicate that experience necessarily in terms of just, you know, how much time I invested in how many minute, you know, I was really spending a lot of time dealing with minutiae, and just over and over, it was, you know, for the first few years I was just kind of in editing mode. But, so I don’t know if that in itself was particularly cathartic for those scenes.
But, I mean, once the album was done it was very cathartic, but the actual experience of it was… It was definitely a labour of love.

LFB : When was Venus Furs composed and recorded ?

PK : It was over a five year period, actually. So it was like, I recorded from my 2013 to 2018. But I did not intend it to be a five year period, and I hope to never record over five years again for another. It was much too much time spent recording.
But, I started with two friends that were moving. Almost immediately after we started tracking, so it was done in this huge rush. And then after we recorded. Pretty much the rest of it, and mixed everything and got the sound that I wanted relatively quickly, but then everything was just really sloppy and all over the place. It wasn’t really tasteful so much, it felt like it was done in a rush. So they spent a lot of time just trying to, you know, fix that up and then spent some time in editing really making sure to capture the sound… so yeah this has been done for a little bit…

LFB : We’ve read that you were quite a perfectionist, did you do the whole album on your own or did you work with other musicians ?

PK : Yeah. Well, again, most of the writing was done on my own, and most of the arrangements. One of my friends played drums on the album. He recorded the sessions before he moved out of Montreal to Vancouver and I started working with this engineer as well who was moving right after we started recording. And then, I was able to finish the rest the album with an engineer, a friend of mine who runs the studio, named Simon Petraki. And yes the album really was… I’m a perfectionist as you were saying and I kind of had a vision that I was trying to achieve. And I had the songs floating around my head for a little while before I started to even record them, so I kind of had a very clear idea of what I wanted to capture.

LFB : Can you tell us a bit about the opening song of the record, Chaos and Confusion. What is the song about ?

PK : Yeah, well, the way that I write lyrics… they just kind of come out and it’s more of like stream of consciousness, I guess.
What it unfolded was kind of about, I mean on the very literal surface it ended up being about, you know like this game of cards where the dealer is like, you know, trying to trick and take advantage of his opponents. And then at the end it’s like this turn, where it’s this kind of humanity showing some, I guess some sort of regret and having to hide that in order to continue doing what he needs to do. So it ended up being a bit, I guess, trying to cover the load of the emotions behind both individuals, but more so the dealer’s…

LFB : Friendly Fire is quite intriguing title….

PK : Yeah, I guess. I mean, like I said most of my writing came out kind of stream of consciousness. And then afterwards I look back at it. And so for Friendly Fire, it ended up being about kind of capturing those feelings of, how can I describe this ? I guess being like misunderstood… you’re trying to do something or whatever it is and then just being like, kind of being misunderstood by people that are close to you.

LFB : There’s a feeling of immensity and freedom listening to your songs. Is the great openness of the Canadian outdoor an influence to you ?

I never really thought about that. There may be a subconscious influence, but beyond that I’m not sure. One of my favourite things in music is when it’s repetitive so as to be almost hypnotic or trance inducing, with subtleties to keep things interesting while simultaneously getting lost in the sound. I find there is a parallel to Impressionism which has also been an influence to me, in that there are so many layers and interesting things going on that appear to be blurry when looked at closely, but are still cohesive and represent clear ideas.

LFB : How did you live the last few months? Have you continued being creative and did it affect your plans as an artist ?

PK : Yes and no. It affected me very much in that I was hoping to be touring right now. So that was a huge effect, but that’s okay. Well I mean, I’m very much looking forward to getting on tour when this is all done.
I’ve been fortunate that I’ve been able to continue working from home for my job, I know a lot of people haven’t been so lucky. But yeah, I was lucky in that aspect, and just trying to get this album off the ground has been taking up quite some time. Those two things have been taking up a lot of my time. But I’ve been working a lot as well on trying to get some good ideas going for the next album, I got, you know, a whole bunch of half-baked ideas that I’m trying to finish up.

And now this album that I just released had been consuming me for quite a few years. So now that that’s gone. It was like a weight that lifted from my shoulders, immediately. Now, I’m slowly getting back into just trying to be creative for completely new stuff without having these thoughts of, you know, tinkering or trying to touch up anything from the album.

LFB : You live in Montreal, how is the music scene over there ?

PK : It’s, I mean, right now it’s a little harder. Yeah. It’s been cool, it kind changes and shifts a bit over the years right before this there was a pretty cool kind of psych influence that was really building up.

There’s this collective called Mothland, they put on festivals and they’re a new label and they’ve been really help and cultivate that scene. And there’s some other great promoters like Blue Skies Turn Black that have been putting on great shows for forever, but as far as the music itself, I find there’s kind of these fragments of different little sounds.
So yeah, it’s pretty interesting there’s a whole lot of stuff going on in the city.

LFB : Is there something that you’ve discovered recently that you would like to share with us ?

PK : Yes… but I am also just waking up… let me think on this…. (We’re doing the interview when it’s early morning in Canada)

There’s, this past week it has been Model Village from IDLES, that video is so cool, and the EP is great.
And there’s an artist named Patrick Krief that I’ve been listening to quite a lot… There’s a great song that I just heard the other day that I’m completely obsessed with. It’s from Sweeping Promises. It’s called Cross Me Out. The second track on there, I strongly recommend Cross Me Out.
Thanya Iyer just released a really great album, and Double Date With Death and Orchids are two really great Montreal bands. Also No Joy just released a great album too and Gulfer are great….

Venus Furs is available here.

Listen to Venus Furs :