Une conversation avec Nerlov

Au coeur du confinement de 2020, on avait fait la rencontre de Nerlov. Coup de foudre immédiat pour l’angevin dont la musique cache des trésors de tendresse derrière une bonne couche de cynisme et d’humour. L’histoire d’amour continue cette année alors qu’il vient de dévoiler Prophéties. On lui a posé quelques questions lors de son passage au Crossroads Festival.

La Face B: Salut Nerlov, comment ça va ?

Nerlov : Content d’être là ! Content de jouer ! D’être dans le camion, de faire un peu de route. Là, c’est beaucoup de route en l’occurrence mais c’est cool.

LFB : Tu peux enfin défendre ta musique sur scène. Comment tu te sens par rapport à ça ?

Nerlov : C’est cool. Ce projet, pour l’instant on n’a pas vraiment eu l’occasion de le faire. Notre premier concert, c’était décembre 2019. On a fait deux, trois dates et puis c’était le confinement. Sortie de l’EP en plein confinement… on aurait du faire une date ou deux l’été dernier et puis là, depuis Juillet ça a repris, on fait plein de concerts.

LFB : Est-ce que tu n’as pas une petite frustration de ne pas avoir pu défendre correctement ce premier EP ?

Nerlov : Si, carrément ! Surtout que ça partait bien. Il y avait une bonne réaction, de belles dates de prévues. On commençait bien et ça nous a bien coupé les pattes. Donc là, on repart de zéro. Mais ça va.

LFB : On va parler de Prophéties. Il y a un an, quand je t’ai interviewé pour le premier EP tu me disais que tu n’avais pas vraiment d’espoir dans le monde mais pourtant j’ai l’impression que cet EP est légèrement plus doux que le premier.

Nerlov : Peut être … moi, je le trouve un peu darkos. Il y a prophéties qui sort un peu du lot, qui est un peu plus fun et moins sombre, encore que… mais sur un ton plus léger.

LFB : Je trouve qu’il y a un côté organique dans le production du son.

Nerlov: Oui, c’est normal. Il y a de la batterie. Certains morceaux avec de la vraie basse, d’autres avec du ukulélé. Notamment le morceau Mac Leod, c’est une commande que j’ai fait à Chahu. Oui il y a un côté organique. Des drums sur quasiment tous les titres.

LFB : Comment tu vois l’évolution entre le premier EP et le deuxième ? C’est une suite logique ?

Nerlov : Oui mais on est allé plus loin dans la prod. Je suis content et j’espère qu’on va vraiment avoir autant de presse ou même plus que sur le premier. Mais bon tout le monde sort un truc en ce moment. Même à la face B, vous êtes saturés de trucs qui sortent.

LFB : T’inquiètes ! On te gardera une place. (rires)

Nerlov : c’est sympa (rires).

LFB : Si je te dis que qu’on perce plus ta carapace, qu’il y a plus de sincérité dans les paroles, est-ce que tu es d’accord ?

Nerlov : Oui oui. J’aborde des thèmes persos. Des trucs qui me touchent et qui me font mal. Et ça me fait du bien.

LFB : Tu te caches moins derrière l’humour et l’ironie dans tes paroles.

Nerlov : Oui. Je vois ce que tu veux dire. Sur un morceau comme je vous aime tous, il y a un peu de cynisme. Je ne suis pas quelqu’un de cynique mais à manier dans le texte, je trouve ça amusant. J’ai envie de continuer à garder cet esprit espiègle. Mais il y a aussi des trucs plus sérieux. Je parle notamment de trucs pas cools comme la déception amicale. Mac Leod c’est  sur le temps qui passe, sur le fait que je continue à m’accrocher à des trucs alors que je prends de l’âge.

LFB : Est-ce que c’était important pour toi d’écrire un EP avec une histoire et un thème global ? Parce que c’est ce que j’ai ressenti. D’une manière ou d’une autre, tous les morceaux parlent d’amour. Même si c’est positif ou négatif, ce sont des formes d’amour.

Nerlov : C’est ça, oui. L’amour dans le couple. L’amour dans l’amitié. L’amour de la musique. L’amour du doute. Des trucs récurrents. Et il y a un cœur dans mon logo (rires).

LFB : Ca parle aussi d’acceptation. Envers toi et envers les autres. Est-ce que le fait que le premier EP ait été bien reçu, ça t’a permis d’aller plus loin et d’avoir moins de doutes ?

Nerlov : Ça m’a conforté dans l’idée de défendre un truc en français. J’avais chanté essentiellement en anglais. Le fait d’avoir de bons retours sur le premier EP en français m’a donné envie d’aller encore plus loin, de me mettre à nu…

LFB : Justement, tu parles de sujets sérieux et de thèmes qui te tiennent à toi. Est-ce que tu vois ça comme une thérapie ou une sorte de catharsis quand tu fais tes textes ?

Nerlov : Bien sûr, c’est un exutoire. Quand je passe des semaines à ne pas écrire, à ne pas composer, je me mets à me sentir mal et à déprimer. C’est salvateur. Mais la musique a toujours été un exutoire, pour moi. Quand j’ai commencé la musique, je faisais du métal et j’ai jamais été aussi bien.

LFB : Peux-tu nous parler de ta relation avec Atome et Chahu ?

Nerlov : Chahu est fraichement arrivé dans l’équipe mais Atom et moi, on adore ce qu’il propose. Que ce soit Chahu, Atom ou moi qui composons un morceau, on prend le truc, on le déconstruit dans le studio. On l’emmène là où on veut aller et ça marche très bien. On est tous les trois assez contents de cette façon de faire. Et ça n’est fermé à personne. Déjà, avoir bossé avec Chahu, ça m’a fait du bien. Ça m’a emmené vers autre chose. Moi, quand je compose un morceau, j’emploie toujours les mêmes recettes, et je tourne un peu en rond. Alors bosser avec d’autres gens, ça m’inspire.

LFB : Tu sens la patte de Chahu sur un morceau comme Mac Leod mais ça reste un morceau de Nerlov. Tu gardes un socle que tu ramènes sur ton projet.

Nerlov : Pour Mac Leod, j’avais demandé un morceau du genre de « Je ne suis pas juge ». Et Chahu a eu l’intelligence et la force de faire du Nerlov mais avec sa touche à lui. Il écrit très bien, de belles mélodies qui m’inspirent. On a d’ailleurs fait plusieurs morceaux ensemble. Des morceaux qui ne sont pas encore sortis de terre . Mais on a pour projet de faire un concert en prison, à deux. On est pas mal pris de notre côté mais on sera amené à faire des projets ensemble.

LFB : à propos de collaboration, Il n’y a pas de featuring sur cet EP. Est-ce ce le fait que les chansons soient un peu plus personnelles ou alors un hasard ?

Nerlov : C’est un hasard complet. C’est vraiment tombé comme ça. Il y a derrière encore une dizaine de morceaux qui ne sont pas sortis.

LFB : Tu gardes des cartouches !

Nerlov : Oui, quelques cartouches ! Quelques chargeurs !

LFB : Est-ce que tu peux nous parler de l’importance du visuel chez Nerlov ? Tes clips sont hyper soignés mais donnent souvent une autre perspective aux morceaux.

Nerlov : C’est intéressant parce que moi, les clips ça me fait très peur. J’ai vu tellement de projets naissants où il n’y avait clairement pas de thunes pour les clips. Le problème, c’est que les gens veulent faire des clips souvent trop ambitieux. Et c’est ma grande crainte. Du coup, je préfère les anti-clips. C’est plus de l’image sur de la musique qui va servir et non desservir le morceau. Donc l’objectif n’est pas de donner une autre perspective mais plutôt de poser une image. C’est très simple, ça ne prend pas trop de risques. Ça doit être joli mais ne pas te sortir du morceau.

LFB : Je trouve que dans Acide, il y a un côté hyper inquiétant, apocalyptique même, qui ne correspond pas au titre.

Nerlov : Oui, c’est une volonté de décalage.

LFB : D’ailleurs à propos d’Acide, que peux-tu nous dire sur la santé bucco-dentaire ?

Nerlov : Ah ben c’est important de se brosser les dents tous les jours, surtout quand on est jeune. Les remontées acides, c’est un problème auquel je suis confronté. Comme une personne sur cinq ! C’est important d’avoir une bonne hygiène.

LFB : Tu fais souvent beaucoup de citations de truc pops ! des références ancrées dans le monde moderne comme Star Wars, Picky Blinders… c’est important pour toi d’ancrer ta musique dans le réel ?

Nerlov : Ouais ! Je ne veux pas faire de la poésie. Je veux faire un truc cru. Avec du franc-parler. Quand tu dis Star Wars, il y a un côté manichéen dégueulasse et affreux si tu l’appliques dans la vie réelle. Parce que la vie réelle est plus nuancée que dans Star Wars.

LFB : Justement, si la prod amène des sons, la musique ramène des images. C’est important pour toi, ces retours d’images ? Comment tu le travailles ?

Nerlov : C’est peut-être lié à mon amour du cinéma. Je bouffe énormément de films. J’adorerai ajouter une musique à l’image, pas forcément avec des textes.

LFB : Là tu vas faire un concert, moi je ne connais ta musique qu’à travers les EP. Comment est-ce que tu retranscris ta musique pour les lives ?

Nerlov : Avec un batteur, mon pote Simon. C’est une formule très légère. J’adore faire ça. J’avais découvert ça lors d’un festival, le batteur, le chanteur et ses machines… et puis c’est devenu quelque chose d’ultra standard, du coup je suis dégouté. Donc mon nouveau projet c’est pas un batteur mais deux batteurs. Ne le dis pas, on va me piquer l’idée ! Visuellement, ça claque en plus.

LFB : Avec l’EP qui sort, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour l’avenir ?

Nerlov : Des dates ! des dates ! Beaucoup de dates et encore des dates qui me permettraient de faire essentiellement de la musique, plus de morceaux, que ce soit Nerlov ou d’autres projets. Un groupe à la batterie, un groupe à la basse…plus de temps,  et puis un peu de thunes aussi, ça serait bien.

LFB : Pour finir, est-ce que tu as des coups de cœur culturels que tu veux nous faire partager ?

Nerlov : J’ai revu Youth sur Netflix et j’ai repris une baffe. En musique, je suis à fond dans l’album de Cory Hanson, Angeles. Il fait un truc très « Radioheadien » et je suis un fan de Radiohead. Et puis des potes artistes qui font des trucs magnifiques sur Angers. Des œuvres graphiques très intéressantes.  

Crédit Photos : David Tabary (nerlov)