Une conversation avec Blumi

En cet fin d’été, nous avons retrouvé Emma Broughton aka Blumi dans un salon de thé non loin du Studio Galande et de la librairie Shakespeare & Co. Alors qu’au dehors les éclaircies jouaient avec les averses, nous avons pris le temps d’échanger sur ses compositions, les festivals d’été qui se finissaient et sa façon de ressentir la musique.

Crédits : Damien Breton

La Face B : Comment cela va en cette fin d’été qui ressemble à un automne sans fin ?

Blumi : C’est vrai que le temps est vraiment pourri, on est complètement d’accord. On n’a pas eu assez de soleil, pas assez d’été. Mais sinon question boulot, c’est plutôt cool en ce moment. Pour moi et les gens autour de moi, on bosse beaucoup en ce moment. Depuis mai-juin, tout reprend. Il faut même que l’on fasse attention, c’est intense. Je n’aurai jamais pensé faire autant de dates, autant de trucs cools avec un petit EP que personne ne connaissait vraiment.

Franchement, j’ai eu pas mal de concerts cet été et ça continue car il y en a tout le mois de septembre. Après, en octobre, novembre c’est plus calme. Un peu en décembre et ça va reprendre l’année prochaine. C’est super, franchement je ne me plains pas.

LFB : Moment d’accalmie dans cette crise sanitaire que j’espère durable, la vie reprend et les projets aussi. Que ressens-tu à retrouver la scène –La salle Gaveau avec La Chica, les festivals d’été Chorus, Midi Festival, La Route du Rock ?

Blumi : Il y avait aussi, le lendemain de la Route du Rock, à Rennes un petit festival qui s’appelle les Embellies – trop bien. Franchement, tout était trop bien. Tout le monde était trop sympa.

Oui j’ai fait pas mal de festivals. Vendredi prochain, je joue à FGO hors les murs et le lendemain au Coconut. Après il y aura Niort – Nouvelles scènes– au festival Hop-Hop-Hop à Orléans. Je ne fais encore que des festivals.

LFB : Tu prends plaisir à retrouver la scène.

Blumi : Je n’avais jamais vraiment commencé à me produire sur scène en tant que Blumi. Et puis je suis une grosse traqueuse. Les débuts sont durs. Je perds dix ans de vie à chaque fois que je fais un concert, tellement je stresse. Là je sens – je touche du bois -que je commence petit à petit à m’installer dans mon concert, à prendre plus de plaisir, à être plus dedans, plus détendue. J’ai fait plein de petits aménagements grâce aux retours que j’ai eu de mes copains « Tu devrais faire ça ». Ça m’aide vraiment. 

J’ai l’impression que ça commence à être plus cool. Mais c’est super d’être sur scène. Jusqu’ici je n’ai que de bons retours. En fait ce qui est sympa quand tu n’es pas très connue, c’est que tu fais les ouvertures de festival. Après le concert, les gens viennent te voir. Tu peux discuter avec eux. Franchement, jusqu’ici c’est super, beaucoup de beaux moments.

LFB : Au Midi-festival, je confirme, c’était extra !

Blumi : Yes ! Tu vois j’ouvrais le festival et c’est une position hyper jolie. C’était au tout début, c’était beau, il y avait du soleil. Les ouvertures, j’ai fait ça au Midi, à la Route du Rock. C’est très agréable. Une place un peu toute douce.

LFB : On a eu l’impression de te découvrir avec ton projet Blumi. Mais pour autant on te connaissait déjà au travers de tes nombreuses participations/collaborations. Je les rangerai en trois cercles un peu comme je les ai découverts. Le premier cercle est celui qui nous apparaît dès que l’on cherche à en savoir un peu plus sur ton projet Blumi. Il s’agit des collab à internationales comme avec Bon Iver ou Feist. Par quel concours de circonstances t’es-tu retrouvée à leurs côtés ?

Blumi : C’est marrant parce que c’est dans toutes mes bios. C’est vrai que cela envoie ! C’est trop classe de dire ça. Mais en vrai, on se connait c’est certain ; ils savent qui je suis c’est sûr mais je ne suis pas pour autant dans leurs cercles proches de musiciens. Les rencontrer a vraiment été un coup de chance. J’ai une très bonne copine musicienne, Pauline, – connue sous son nom de scène Mina Tindle – qui est mariée avec un musicien américain Bryce Dessner qui joue dans The National. C’est lui qui connait Bon Iver, Feist, c’est le même cercle de connaissances. Un jour Bryce a organisé une soirée spéciale à la Philharmonie du genre « Écritures américaines contemporaines » [American Music : from Murder Ballades to Moondog] qui concernait autant la pop que la musique contemporaine classique. Il avait invité Bon Iver à faire un concert. Or il souhaitait qu’il y ait une chorale féminine. Bryce a demandé à sa femme Pauline de trouver les filles qui la composeraient. Comme Pauline est quelqu’un qui partage tout le temps les trucs super qui lui arrivent, elle a appelé ses copines « Les filles, il faut faire une chorale pour Bon Iver, ça vous dit ? ». Et là, je me suis quasiment évanouie car c’est une de mes idoles.

Après la Philharmonie, je me suis donc retrouvée incluse dans un groupe de gens qui se retrouvait autour de Bon Iver et d’autres beaucoup plus importants que nous comme Feist, les frères Dessner. Une année sur deux il y avait un festival à BerlinPeople Festival – et un festival à Cork en Irlande – Sounds from a Safe Harbour – dont s’occupaient les mêmes équipes. Ces festivals étaient principalement basés sur des improvisations. Je me suis retrouvée à chanter, à faire les chœurs pour Bon Iver, à chanter sur un projet avec Feist. Ça a été un truc de chance.

Là, ça s’est un peu terminé parce que les festivals se sont arrêtés. Les gens qui s’en occupaient ont pris des chemins différents. Mais pendant quatre années de ma vie, j’ai eu l’impression d’être sur un petit nuage – genre « Mais qu’est-ce que je fais là ! ». Franchement, c’était la folie. C’était génial.

LFB : Tu avais l’impression d’être une petite souris. 

Blumi : Totalement, et je suis vraiment rentrée par la petite porte parce que le premier festival à Berlin, je n’étais même pas programmée. C’est juste que j’avais plein de copines qui jouaient dans le festival – Pauline, Kate [Stables]de This Is The Kit, plein de potes comme Olivier. Et donc je me suis dit, j’y vais. Le festival avait lieu samedi-dimanche et je suis partie le jeudi soir. J’ai prévu de squatter dans la chambre qu’Olivier occupait avec tout le groupe en espérant qu’il y ait bien un petit lit pour moi.

Quand je suis arrivée, toutes mes copines étaient là « Emma, viens, viens chanter ». J’ai tout appris au dernier moment alors qu’eux étaient là depuis le lundi. Et du coup je suis restée dans le cercle.

En fait, je suis presque rentrée par effraction. J’aurai jamais dû y être.

LFB : Dans le second cercle, il y aurait les projets – tout aussi intéressants – que tu accompagnes – Thousand, Olivier Marguerit, Orouni. On y ressent une forte implication.

Blumi : On est une petite galaxie. On se connaît tous, on joue pour les uns et les autres. Ce sont mes supers copains ! Amis à la vie – Olivier [Marguerit], Stéphane [Thousand], Maud [Halo Maud], Rémi [Orouni] et puis tous les gens avec qui on joue.  On est vraiment très proches. Olivier, Stéphane et Maud ont participé à mon EP, ils ont joué dessus.

Vous vous apportez mutuellement quelque chose ?

Blumi : Olivier, Stéphane ou Rémi ne choisiraient jamais quelqu’un qui ne serait pas bon. Mais je pense qu’à compétence égale, ils ont fait appel à moi parce qu’on s’entend très bien et que du coup les concerts, les tournées se passent trop bien. On partage de supers moment ensemble, on s’aime trop. Après je ne sais pas trop ce que j’apporte. Je ne suis pas très forte pour savoir cela. Il faudra le leur demander.

En tous les cas, ce qui est certain c’est que l’on s’entend hyper bien. On adore être ensemble et ça c’est génial. Je n’ai jamais tourné avec des gens qui ne m’étaient pas très proches. Je pense que ce serait difficile pour moi de le faire avec des gens qui ne seraient pas mes amis.

LFB : Le dernier cercle serait celui de tes autres amis – même si les précédents le sont aussi – comme This is the Kit avec qui tu as partagé la programmation et la scène au Midi Festival. On sentait une réelle complicité. C’est un petit monde.

Blumi : Kate [Stables / This Is The Kit] est une amie un peu plus récente que j’ai découverte au People Festival de Berlin. Franchement Kate – il ne faut pas l’écrire car ça la gênerait au plus haut point – mais c’est vraiment mon modèle. Par rapport à Olivier, on a passé un peu moins de temps ensemble mais je l’adore. Si je pouvais avoir plus de temps avec elle je le ferai mais tout le monde est surbooké. En tant qu’être humain et en tant que musicienne, c’est vraiment mon modèle. Dans la vie, elle ne critique jamais personne. Elle est hyper positive, hyper douce, hyper gentille, hyper détendue. Pourtant c’est quelqu’un de très connue en Angleterre et en Europe aussi. Elle fait des supers tournées. C’est quelqu’un d’important et elle a une posture par rapport à son art qui est d’une humilité et d’une simplicité. Je ne suis pas la seule à le dire. Tout le monde a envie d’être pote avec elle. A chaque fois que tu passes du temps avec elle, tu as comme l’impression de t’être ressourcée auprès d’un Bouddha.

LFB : C’est vraiment l’impression que l’on a eu lorsqu’elle est montée sur scène souriante.

Blumi : Elle est incroyable. Elle est presque magique, alien comme si elle venait d’une autre planète ou qu’elle avait déjà vécu cinq vies. Elle est super.

Et puis Kate c’est aussi une inspiration artistique. Olivier, j’adore ce qu’il fait – tout comme Orouni – mais on ne peut pas dire qu’ils soient musicalement des inspirations parce qu’on est pas dans le même style. Pourtant j’apprends trop, trop de choses avec eux. Avec Stéphane ou Kate, on est un peu plus dans le même style de musique donc, oui, cela m’inspire davantage pour écrire, pour arranger.

Crédits : Damien Breton -Midi festival 2021

LFB : Et il y a ton projet personnel Blumi – tout nouveau, tout beau. Je suppose que l’envie de composer t’est venue de façon naturelle – une suite logique de ce que tu as expérimenté

Blumi : Tellement pas. Rien n’est simple chez moi. Plus je vieillis, plus c’est simple, c’est ce qui est bien avec la vieillesse. En fait j’ai toujours fait de la musique, conservatoire, musique classique, chant et tout. Mais je me disais que je ne pouvais pas faire de la musique professionnellement parce que premièrement ce n’était même pas une possibilité et deuxièmement j’avais l’impression de ne rien avoir à dire. Je me sentais complètement inintéressante.

De manière assez classique, j’ai écrit mes premières chansons assez tardivement après une rupture. J’avais 22-23 ans. Mais jamais je ne me suis dit que j’allais en faire quelque chose.  Ce sont toujours mes amis qui m’ont poussée « va s’y, il faut que tu le fasses ». Blumi The Darknest, Cold War sont des chansons hyper vieilles. Elles ont quasiment dix ans. Je les traînais, je les traînais et puis au bout d’un moment j’ai pris un peu plus confiance en moi, je me suis mise à ne faire que de la musique et mes potes m’ont aidé. Maintenant j’ai un peu plus confiance en moi, je me dis « ah peut-être que je suis pas une grosse quiche ». Tu vois là, j’ai quasiment terminé les chansons pour le prochain EP et je me dis « Ok j’ai réussi à en faire un autre ». Mais je vois toujours ça comme quelque chose de fragile. Je ne considère pas trop comme une compositrice. A la fin de chaque EP je me demande si je vais réussir à écrire d’autres chansons. Est-ce que je suis faite pour cela ? Ça risque d’être comme cela jusqu’à la fin de ma vie.

LFB : En te retournant tu peux voir ce que tu as fait et le chemin – non négligeable – que tu as déjà parcouru !

Blumi : Tout à fait. C’est assez satisfaisant. Je progresse doucement mais sûrement. Je progresse [Rires]

LFB : Sans vouloir enfermer ta musique dans un genre, comment définirais-tu ta musique ? Et plutôt que de le faire classiquement je te propose de la définir en utilisant les cinq sens, ou plutôt quatre si on en met l’ouïe de côté. On peut commencer par la vue. Si tu devais associer ta musique à une couleur quelle serait-elle ?

Blumi : Une couleur… C’est marrant parce que je pense à une couleur que je n’aime pas trop et que je ne mets jamais et pourtant il y en a partout dans mes clips. Je pense au bleu. Je ne l’aime pas mais il est vrai que j’ai un rapport assez fort à l’eau en tant qu’élément. C’est quelque chose qui revient souvent dans mes chansons, dans mes textes. C’est un élément – je nage depuis toujours – qui fait vraiment partie de ma vie. Donc je dirais comme bleu, le bleu de l’eau. Ou bleu et noir peut-être. C’est un peu sombre mais peut-être que le prochain sera plus rouge.

LFB : L’odorat ?

Blumi : J’ai un odorat un peu pourri. Ce n’est pas le sens qui est le plus développé chez moi. Spontanément, je pense aux odeurs du bois. Il y a une atmosphère assez boisée. L’odeur du cèdre, des forêts, l’humus – quelque chose comme ça. Peut-être aussi l’odeur de la paille.

LFB : Le toucher ?

Blumi : La peau ! Je trouve que même dans les sonorités, dans la voix, il y a plein de trucs très proches avec un grain de peau. Il y même – on comprend pas que c’est cela – des sons ajoutés qui sont des sons de frottements.

LFB : Le goût ?

Blumi : instinctivement, je pense à un verre d’eau fraîche mais ce n’est pas vraiment proche du goût.

LFB : Ça reste une sensation.

Blumi : Je dirai un verre d’eau fraîche. Je ne suis pas très forte. Pareil que pour les odeurs, je pense que quand tu n’as pas un super odorat tu n’as pas non plus un super goût.

LFB : Pour revenir à ce que tu as évoqué avec le toucher et les sons de frottements ajoutés, tes compositions sont loin d’être linéaires et la production fourmille de détails – ne serait-ce qu’en prenant les premiers et les derniers sons de ton EP : les bruits de la nuit en intro de Blumi The Darkness ou le saxophone d’Adrien Soleiman dans The Dream.

Blumi : En fait tout se construit sans que je m’en rende compte. Parce que si je m’en rends compte, je n’y arrive pas. Dans les personnes qui m’ont aidé à faire naître mes chansons, à les arranger, il y a un super groupe de gens. Tiens, encore un nouveau cercle. Ce sont les gens d’Arte Radio. En fait, Arte a une radio et ils ont commencé à faire des podcasts bien avant tout le monde. Il y a peut-être vingt ans. Et ils sont hyper forts. Ce sont des esthètes du son et du sound design. Dans Arte Radio, il y a le directeur qui s’appelle Sylvain Gire, une super équipe et un des réalisateurs – ce sont des gens qui habillent les reportages faits par les journalistes – Samuel Hirsch qui est aussi musicien. On se voit plus trop à cause je ne sais pas, de la vie mais que je considère vraiment comme mon ami. Avant de me mettre à Blumi, j’ai fait des reportages radio pour eux – des petits textes, des petites pastilles – et à chaque fois je travaillais avec Samuel. On s’est mis à faire plein de sound design et à triper ensemble.

Ce sont les premières fois où je me suis autorisée -grâce à Samuel qui a une superbe personnalité – à dire « Ah, moi j’ai envie de ça » et d’assumer mes goûts. Alors qu’avant qu’il me dise « Oui va s’y, suis ton intuition », je ne l’avais jamais fait.

On a sound designé ensemble, enfin c’était surtout lui mais j’ai beaucoup appris.

Du coup au moment où j’ai commencé à arranger Blumi, j’ai eu envie de mixer les deux parce que pour moi cette découverte avait été trop importante. Ainsi il y a plein de sons d’ambiances dans Blumi. Il y a des pas dans la neige – c’est Samuel qui les avait fait mais j’étais à côté de lui. L’ambiance de la nuit également. Idem c’est Samuel qui a fait le sound design mais on a composé ensemble.

Et puis le sax. Je construis énormément mes chansons en fonction du texte. Je les arrange en fonction de ce que je raconte. Cette chanson, The Dream, parle d’un couple super amoureux et où, à la fin de la chanson, – tu ne peux pas comprendre si je ne te le dis pas – une des personnes meure. C’est quelque chose que je n’arrivais pas à exprimer avec mes mots. Je me suis dit qu’un instrument pouvait signifier ce truc-là. Un instrument qui fait mal. Du coup comme je connaissais Adrien [Soleiman], je l’avais rencontré dans d’autres projets, je lui ai proposé de faire un solo. Je fonctionne beaucoup comme ça.

LFB : Adrien Soleiman, lui aussi on le voit partout.

Blumi : Alors lui, il est stratosphérique. A ce moment-là, ça allait et aussi c’est un peu un ami. Il était ok pour faire une session. Ça lui a pris deux secondes. Ensuite, avec Olivier on a fait plein de coupes. On a couper, copier-coller son solo pour qu’il soit vraiment, non pas dégueu, mais qu’il fasse mal. J’adore ce solo. Je le trouve trop, trop beau. Ce sont des sons très marqués. Cette fin est assez dure.

LFB : Les thématiques abordées dans les chansons sont plutôt mélancoliques.

Blumi : A la Route du Rock, j’étais au concert d’H-Burns en hommage à Léonard Cohen. Ils ont monté un spectacle. Il y avait Renaud [Brustlein ] des H-Burns avec Antoine [Pinet], son un acolyte de toujours le Stranger Quartet – quatre filles qui chantent et qui jouent – et aussi des extraits de Leonard Cohen. Tu l’entends parler. Il était avec un journaliste qui lui disait qu’il y avait beaucoup de mélancolie dans ses chansons. Leonard Cohen lui a répondu qu’il préférait utiliser le mot sérieux. Que ses chansons parlent des choses sérieuses, des choses du cœur – au premier degré et de façon sérieuse. Et les choses du cœur sont profondes. Il y a des moments durs, des moments beaux.

Je parle de ça, avec sérieux, avec gravité. Il y a de la mélancolie mais pas que. Je suis aussi quelqu’un de très premier degré, d’assez grave – pas quelqu’un de léger.

Ça parle des choses du cœur avec sérieux. J’aime bien cette définition. Sans trop insister sur la tristesse mais une façon d’aborder frontalement les choses du cœur. Au premier degré – genre Jeanne d’Arc – frontal !

Crédits : Damien Breton

LFB : Le rythme semble aussi important. Il reprend souvent celui d’une respiration. Pourtant il y a une force que l’on ressent dans tes compositions – sur disque et encore plus en concert.

Blumi : J’aime quand il y a du groove, un mouvement, quelque chose qui drive. J’écris souvent des chansons qui sont un peu lentes mais je crois que dans mon phrasé il y a une forme de groove, dans la façon de chanter. C’est vrai que c’est hyper important pour moi. Donc tant mieux si tu retiens ça.

LFB : Dans ton EP tu as fait participer des personnes avec lesquelles tu collabores par ailleurs, Stéphane Milochevitch, Olivier Marguerit, Maud Nadal par exemple. Comment leurs interventions se sont articulées dans la conception de ton EP

Blumi : Comment a-t-on fonctionné ? A un moment j’ai organisé deux séances de répétition/exploration avec Maxime [Doaud / Ojard] à la basse, Arnaud [Biscay] à la batterie, Olivier aux claviers et Maud à la guitare juste parce que je ne savais pas comment arranger mes chansons. Je me suis dit, je prends deux jours de studio, on y va ensemble et on joue les morceaux, on les fait vivre et on voit ce que cela donne. Et en fait, c’était super. On a eu et gardé plein d’idées, surtout pour I Know About You. D’ailleurs je vais refaire la même chose pour le prochain EP.

Après pour Blumi The Darkness et The Dream on les a faites plus avec Stéphane [Milochevitch / Thousand]. Je suis allé chez lui. J’avais préparé les synthés. Parce que ce sont des morceaux – le premier et le dernier de l’EP – qui sont beaucoup basés sur des synthés. On a tripé comme ça. Ensuite on est allé en studio enregistrer les basse/batterie – puis les synthés avec Olivier et Stéphane – et ensuite les voix. Après j’ai demandé à Maud et à Adrien de faire les solos. Maud a un solo de guitare et Adrien son solo de saxo.

En fait, ça s’est fait assez simplement.

Bizarrement, à chaque fois qu’il s’agit de faire un EP je ne me souviens plus comment faire. Mais cela se fait naturellement. Pas de façon désorganisée, juste comme ça.

LFB : Cela veut dire que chaque chose est à sa place.

Blumi : Oui peut-être. On va voir pour le prochain !

LFB : Pour le moment tu joues seule sur scène. As-tu envisagé de t’entourer d’autres musiciens ?

Blumi : C’est prévu. Normalement en 2022 je jouerai surtout en groupe. Il y aura les deux mais on va lancer le groupe. Le truc c’est que Maxime et Arnaud sont hyper pris parce qu’ils tournent avec Malik Djoudi. Arnaud fait aussi des remplacements sur Philippe Katerine. Il commence à être trop star.

Du coup, je galère un peu. Il faut que je trouve un band. Je ne sais pas du tout qui en sera. C’est une de mes problématiques du moment.

Ce serait bien que je trouve les gens d’ici la fin de l’année. Que l’on commence à répéter pour pouvoir jouer l’année prochaine. Ça va être complètement différent. Aujourd’hui c’est cool. Je trouve que je vais un peu au bout de ce que je peux faire en solo. Normalement en 2022 je vais avoir pas mal de dates. Je vais pouvoir aller approfondir le truc et en même temps explorer autre chose avec le groupe.

LFB : C’est l’occasion de réinventer ses morceaux.

Blumi : Carrément et j’adore faire ça. C’est intéressant en plus.

LFB : L’anglais s’impose dans tes paroles. Cela m’amène à te demander ce que ta double culture anglais/française – saxon/latine t’apporte ?

Blumi : Latine pas trop. Côté français je suis plutôt normande- il y a un peu de racines pyrénéennes mais bon…

Musicalement, le fait de venir en partie d’une culture anglo-saxonne marque. Je n’ai jamais écouté de variété française. Ce n’est que maintenant que je commence à m’intéresser à des trucs en français que je trouve super. J’ai aucune culture là-dedans.

Je me suis tout de suite dirigée – ça m’a ouvert plein de truc grâce à l’anglais – vers. Les Beatles, même si tu peux faire pareil quand tu es français. Et puis ça a été beaucoup plus simple pour moi de me dire que j’écrivais des textes en anglais plutôt qu’en français. Ça m’a facilité les choses. L’anglais est une langue qui est, pour moi, plus poétique. Parce que comme ce n’est pas une langue que je j’utilise tous les jours, tu es un peu plus libre. Ce n’est pas ta langue maternelle même si mon père nous a toujours parlé en anglais. J’ai vraiment commencé à bien parler anglais plutôt vers 12/13 ans, quand je suis entrée au collège et que j’ai réalisé que c’était bien de parler anglais. C’est une langue qui est pour moi celle du jeu, de la lecture, de la musique – une langue plus libre. Du coup ça m’a aidé à oser écrire.

Et puis en fait j’en sais rien. En tout cas, je sais que j’aimerai vraiment jouer devant un public anglais. Voir ce qu’ils pensent. Je n’ai aucune idée si ça leur plairait ou pas. Je suis hyper curieuse de cela.

LFB : Il n’y a pas de raison

Blumi : Je n’en sais rien. Peut-être qu’en France, comme je fais un peu de la folk à l’anglaise, les gens trouvent cela soit ringard soit exotique. « Ah, on n’entend pas souvent ça ». Mais en Angleterre, si cela se trouve ils ont un milliard de gens qui font ça, ils trouveraient cela banal. J’en sais rien. J’aimerais bien savoir comment ils réagiraient.

LFB : Tu vas devoir te trouver un festival là-bas.

Blumi : Mais c’est dur de tourner en Angleterre. Déjà je vais faire mon passeport anglais parce que jusqu’à présent je n’ai jamais eu besoin d’en avoir un. Je suis justement en train de le faire pour que ce soit plus facile de tourner, surtout après le Brexit.

LFB : As-tu envisagé d’écrire des chansons en français ? Si cela était le cas, comment cela pourrait influer sur tes compositions ?

Blumi : C’est clair. Je l’ai clairement envisagé. Pour le moment je ne le fais pas parce que je suis trop occupée à construire Blumi. Si je commence à me poser la question de la langue je vais exploser en vol. Il ne faut pas me mettre trop de choix.

Donc pour le moment je ne le fais pas. Même si j’ai déjà écrit des textes en français pour des potes et que j’ai super aimé. Ça fait écrire complètement différemment. Pas avec des jeux de mots mais plus sur les sonorités. Il y a un côté un peu plus décalé alors qu’en anglais je suis plus frontale. C’est sûr que cela me ferait aller sur des sujets différents.

Pas évident que cela changerait la compo, quoique si sûrement. Pour le moment je me concentre sur l’anglais et on verra. Quand j’aurai deux, trois albums derrière moi peut-être que je ferai « Allez, explore le français ».

LFB : Il faut en avoir l’occasion.

Blumi : Exactement, puis quand tu en as un peu marre ; que tu es trop coincée dans tes trucs en anglais, pourvoir te dire « Allez va-s’y je vais écrire en français. Je vais voir ce qui sort ».

Crédits : Damien Breton

LFB : Quelle est ton actualité à venir ? Il y a encore pas mal de concerts de prévu, des chœurs sur le troisième album de Malik Djoudi.

Blumi : C’était trop bien. Il est trop sympa Malik et son album est hyper beau.

LFB : Le Coconut où tu vas retrouver tout le monde.

Blumi : C’est vraiment mon festival préféré. En fait ce que j’adore c’est que j’y trouve mes deux styles de musique préférés. Il y a des trucs assez folk, un peu barré – en anglais ou en français – et il y a des méga Rap/RnB, des nouvelles musiques qui sont groove à fond. Tu danses à fond, c’est génial. Et puis l’ambiance est trop sympa.

Du coup j’ai les chœurs sur l’album de Malik Djoudi, j’ai aussi fait des flûtes sur le prochain album de Bon Voyage Organisation. Je crois que c’est tout pour les collaborations.

Et sinon oui j’ai des concerts. Tout le mois de septembre, en octobre il y a le Mama Festival et aussi je fais une pièce de théâtre avec ma cousine. Je fais de la musique pour sa pièce de théâtre. Ça va bien m’occuper pour le mois d’octobre. Puis après novembre/décembre c’est arrangements et enregistrement du prochain EP.

LFB : Théâtre, es-tu tentée par d’autres formes d’art ?

Blumi : Là, c’est avec ma cousine chérie avec laquelle on s’entend ultra bien. On en a déjà fait une, une pièce de théâtre tout public plus ou moins pour enfants. C’est une pièce de théâtre qu’elle a écrite. Du coup je joue un peu et je mets en musique. C’est tellement cool de faire cela, franchement j’adorerais le faire plus mais honnêtement je ne suis pas assez forte techniquement pour bien faire une musique de théâtre. J’ai plein de potes qui le font mais je ne me sens pas encore assez forte. Mais peut-être que je vais développer cela pour le futur. Prendre des cours et m’améliorer, mettre les mains dans le cambouis.

Concernant le prochain EP, les chansons sont composées. Il y en a pas mal que j’ai déjà joué sur scène. C’est super de pouvoir les jouer avant de les enregistrer. Comme pour l’EP précédent, il y a un ensemble de cinq à six chansons qui fonctionnent très bien ensemble. J’aime bien. Et puis je vais explorer d’autres choses. J’aime beaucoup faire des EP parce que tu peux explorer des trucs et puis celui d’après en explorer d’autres.

Pour l’instant je me sens, même si je ne suis pas du tout si jeune que cela en âge, très jeune dans mon parcours musical perso. Donc j’ai envie d’essayer plein de trucs.

LFB :  Et pour finir que peut-on te souhaiter ?

Blumi : J’aimerais bien – mais je vais y arriver – être un peu plus sûre de moi sur quel type d’arrangement je vais faire pour le prochain EP. Plus sûre de moi en termes d’arrangement et de l’assumer.

C’est toujours bien les interviews car c’est comme des mini points. Tu sors et tu es là « c’est ça que je dois faire », « c’est ça qui est important ».

LFB :  Tu as tes objectifs !

Blumi : Si tout le monde me le souhaite – ceux qui vont lire cet article – peut-être que ça arrivera ! Il y a l’énergie pour !

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