Sommes-nous Alain Bashung #6 : A Perte De Vue

Il y a de cela dix ans, l’éternel Alain Bashung nous quittait. Il laissera derrière lui son dernier souffle : à la fois inspirateur et créateur pour une lignée d’artiste. En hommage, nous avons demandé à certains musiciens de la nouvelle scène française de témoigner sur le chanteur. On a vu courir Bashung, à perte de vue, en milieu des algues et des coraux. Il a couru, jusqu’à disparaître. Si bien que Bast et Chasseur n’ont eu le temps que de l’entrevoir.

Bast

“Je me lève tous les matins avec la furieuse envie de gagner ma liberté. Une liberté que Patti Smith, Bob Dylan, Oscar Wilde, Jim Jarmusch…et évidement Alain Bashung m’ont fait un jour humer le parfum. Avec Bashung, on peut faire un footing au milieu des algues et des coraux, faire ses pompes sur les restes d’un vieux cargo ou encore chanter la mer le long des golfes pas très clairs. Mais que veut il dire par là? Peu importe, les mots sonnent juste et résonnent, m’offrent une manière infinie de les interpréter. La porte est grande ouverte, je deviens ce personnage étrange, à l’élégance auto destructrice, qui s’agrippe au bas de Gaby. Quelques minutes dans un monde parallèle, de quoi s’oublier et se sentir libre! Merci A.B. d‘avoir mené le combat sans jamais te rendre.”

Chasseur

“Je vais jouer en première partie d’Alain Bashung. L’annonce vient de tomber. Ce sera dans le Loir-et-Cher.

Nous sommes en 2004. Cette année-là j’accompagne sur scène la chanteuse Laetitia Shériff. Nous allons ouvrir le bal un soir d’automne pour celui qui effectue sa magnifique « tournée des grands espaces ». Celui-là même qui avait ravi mes tympans quelques années plus tôt avec l’album Novice et qui venait de sortir son chef-d’oeuvre L’imprudence.

Aujourd’hui, en 2020, je n’ai pas le moindre souvenir de notre concert. Peut-être que la présence de Mr Bashung derrière le rideau avait occupée toutes mes pensées? Je me souviens seulement de m’être empressé de quitter les planches. On ne se croisera même pas. Trop de respect pour importuner l’idole. Et tellement hâte de rejoindre la salle pour l’entendre chanter : « désormais je me dore à tes rires, je me dore à tes nerfs, désormais je me dore à l’endroit à l’envers, à la chaleur humaine ».”

Illustrations réalisées par Camille Scali.
Photo de couverture : montage réalisé d’après une photographie de Catherine Faux (SIPA).