SMITHEREENS, la mélancolie de Joji

De son apparition dans les années 50’s, avec pour rampe de lancement la musique d’Elvis Presley, à son explosion durant les long-sixties, avec notamment la fameuse Beatlemania, jusqu’à nos jours, la Pop -ou Musique Populaire- n’a cessé d’évoluer. Ce développement s’est naturellement organisé par mouvements de vagues diverses et variées, avec son lot de courants et d’habitus en fonction de l’époque concernée. Ces dernières années, ce que l’on peut appeler une Pop « Alternative » s’est vue émerger, offrant des œuvres polymorphes, aux thèmes et motifs souvent plus sombres et mélancoliques. L’une des figures de proue de cette mouvance a dévoilé le 4 novembre dernier son dernier projet en date. C’est ce même jour que Joji, autrement connu sur Internet sous le pseudonyme de Filthy Franck, a rendu public son troisième album studio : SMITHEREENS.

À vrai dire, le projet de George Kusunoki Miller s’inscrit dans une direction artistique présente depuis ses débuts. Joji met l’accent sur une envie de développer un univers mêlant les balades Pop iconiques du genre, avec des influences tirant leurs origines notamment du R&B ou encore de la lo-fi. Le tout est entouré d’une couche de mélancolie et de thèmes comme les déceptions sentimentales, ou encore les problèmes de santé mentale.

Cet alliage donne dès lors naissance à une musique douce, aux couleurs nuancées. Cette dernière est portée par la voix atypique du japonais, qui fonctionne parfaitement avec les intentions musicales entretenues par ce dernier.

Ce second album, SMITHEREENS, prend la continuité directe de cette tendance, l’album traitant la thématique d’une rupture amoureuse. Musicalement parlant, la couleur du projet tend également vers des ambiances très moroses, avec comme exemple criant le premier single, Glimpse of Us. Ce dernier, notamment responsable d’un raz-de-marrée sur les réseaux sociaux comme Tik Tok, met en avant les souvenirs d’une relation passée que le narrateur peine à oublier.

Une simple balade piano-voix. C’est tout ce que ce morceau contient. Là réside l’une des qualités les plus proéminentes et admirables chez Joji : son aisance à matérialiser de manière simple et épurée une idée précise. Ce facteur fait de ce disque une pièce en vérité assez facilement compréhensible.

De plus, la construction et l’articulation de ce dernier le rend d’autant plus clair et accessible. Ce deuxième album se constitue de deux parties distinctes, marquées notamment par l’effet de style ajouté sur la tracklist, les titres de la seconde moitié étant inscrits en lettres majuscules. Les cinq premières pistes de SMITHEREENS officient dans un registre touchant à celui de la Pop mélancolique, avec des sonorités très modernes et actuelles.

On retrouve en son sein une omniprésence d’instruments acoustiques, tout particulièrement le piano et la guitare. Les quatre derniers morceaux, eux, tendent plus à adopter un spectre sonore proche du R&B, avec notamment des influences directement tirées du Hip Hop en ce qui concerne le travail sur les percussions. Cette seconde moitié est également marquée par ce même air contrit, recouvrant de ce fait la globalité de SMITHEREENS.

Ces deux corps sont constitués de morceaux courts, aux idées et structures simples. On y trouve par exemple des morceaux ne dépassant qu’à peine les deux minutes, voire moins que cela. On peut dès lors citer des pistes telles que 1AM FREESTYLE, Feeling Like The End, ou encore NIGHT RIDER. Ces dernières prouvent à quel point le discours mélodique de Joji peut être concis, sans pour autant ne rien délivrer.

L’un des accents sur lequel est mis l’emphase au sein de SMITHEREENS demeure l’émotion. La parfaite illustration de cela réside dans la troisième piste de l’album, Die For You.

Véritable chef-d’œuvre de composition et d’arrangement, ce titre démontre toute le savoir-faire dont le japonais fait preuve lorsqu’il s’agit de créer des pièces touchantes. Cela est bonifié par une production très soignée, apportant une certaine accessibilité et de la clarté à l’ensemble.

Après plusieurs mois d’attente, Joji nous offre avec SMITHEREENS un projet certes court, mais sachant parfaitement condenser son propos pour le rendre immédiatement frappant et marquant. Avec des idées simples et une véritable envie de leur donner vie de manière épurée, l’artiste donne naissance à 25 minutes d’une grande sensibilité et d’une immense douceur.

Après avoir interprété Glimpse of Us lors des dernières dates de sa tournée fraîchement terminée, Georges Kusunoki Miller est de nouveau attendu en live, cette fois-ci pour défendre ce tout nouvel arsenal sur scène.