(EXCLU) polon, trouble Vert & Gris

Il y a des morceaux qui s’imposent à nous et face auxquels on ne peut fermer les yeux, ni se boucher les oreilles. Des morceaux importants et nécessaires qui frappent au corps, au cœur et à l’esprit. Vert & Gris de Polon est un de ces morceaux et nous sommes fiers de pouvoir vous en parler en exclusivité ce matin.

Lorsqu’on nous a envoyé le morceau de Polon, Vert & Gris, un grand trouble s’est glissé en nous à la première écoute. Au delà des qualités musicales et visuelles évidentes, il y avait ce recul, cette chose dont le morceau parle ci-bien et qui nous donne envie de regarder ailleurs, de faire comme si tout cela n’existait pas, une sorte de protection humaine pas forcément légitime et qui heureusement, se dissipe très vite.

Parler des agressions sexuelles n’est jamais une chose aisée, parler d’un morceau qui le raconte l’est encore moins. Il faut peser ses mots, réfléchir et faire preuve d’empathie. Il faut marquer à la fois son respect pour l’œuvre d’un artiste tout en n’oubliant pas la gravité du sujet qu’il traite. Il y a une forme d’équilibre à trouver, une pudeur aussi qu’il faut effacer pour se faire l’écho d’un sujet brulant et important.

Encore plus lorsque l’on parle d’agression sexuelle entre hommes, sujet souvent invisibilisé, sur lequel plane souvent une chape de plomb entre la honte, la violence et l’idée stupide de la virilité.

Accompagné de Navire Argo, Polon propose une œuvre totale, une symbiose entre le son et l’image qui fait germer en nous des sensations diverses allant de la fascination à la douleur et au dégout. Une ambiguïté sourde qui montre bien le talent musical et visuel qui découle de cette association.

Si il se veut poétique par moment, Vert & Gris n’en reste pas moins une œuvre frontale, portant en elle un discours clair et évident. Polon traite la violence et la dissociation d’une agression sans rien occulter. On se retrouve alors proche de cet état, on le ressent, on le partage. Sans rien renier à son esthétique musicale, à ce besoin d’offrir des nappes électroniques parfois oniriques, il porte avec lui le poids des mots, leur puissance et leur importance.

Vert & Gris est une plongée en apnée dans les maux d’une personne en souffrance, troublée et brutalisée. Une œuvre politique qui s’impose à lui et qui s’impose à nous, comme ce corps qui force l’autre qui disparait, qui se dissocie pour survivre et échapper à l’horreur.

Cette force évocatrice, Navire Argo la porte aussi à bras le corps, poussant la aussi l’esthétique. Dans un univers blanc, presque ouaté, l’image se divise comme l’esprit. Rien n’est occulté, on vit au plus près l’évènement traumatique, se sentant par moment presque voyeur, ce qui augmente le trouble et le poids visuel de ce qui nous est donné à voir. Comme une boucle sans fin, un souvenir qui ne disparait jamais réellement, même si on le voudrait, la vidéo nous force à faire face à la sauvagerie d’une agression et à ses conséquences.

Vert & Gris est un morceau intense et nécessaire, qui pose aussi la question plus importante du rapport de la justice à ces agressions qui se multiplient par rapport au nombre de condamnations effectives. Il y a encore beaucoup de chemin à faire, et ce morceau de Polon est une étape importante, une mis en lumière des actes et de leurs conséquences.

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