Muddy Monk sur la Longue Ride

Dans la vie, il y a des actes libérateurs. Pour Muddy Monk, cela est passé par l’achat d’une moto. Loin de la prudence qui semblait guider sa vie jusque là, cet achat lui a ouvert la route de tous les possibles et notamment celle d’une variété française aventureuse et rêveuse. De sa pochette à ses titres, cette invitation à l’aventure et à la liberté guide sa musique. Partez avec nous en Longue Ride avec Muddy Monk.

Muddy Monk n’est pas un homme d’autoroute. Il ne cherche pas la ligne droite, ni le confort. Muddy Monk, armé de sa moto musicale, est plus du genre petit chemin qui bouge, qui tourne et sur lequel on se perd parfois. Il est plutôt du genre à regarder le paysage et à lever les yeux vers le ciel. Si vous ne comprenez pas la métaphore, on pourrait dire que plutôt que de chercher le succès immédiat qui le mène vers une route où tout va trop vite, le Suisse a plutôt décidé de prendre son temps, d’expérimenter et de divaguer afin d’arriver à un résultat qui lui convienne et qui lui ressemble.

Cette route, cette histoire, ce voyage, il les raconte dans son premier album Longue Ride sur lequel il trace un pont sublime entre synth-pop, expérimentations et variété française.

Pour ce premier effort, Muddy Monk trace sa route en solitaire. Lui qui nous avait hanté avec son couplet sublime sur Le Code de son pote Myth Syzer n’a invité personne à partager une piste avec lui. Un choix conscient et intelligent, tant la musique de l’artiste semble puiser profondément dans son intime et qu’un featuring, aussi commercialement intéressant soit-il, aurait sans doute paru finalement assez artificiel.

Ce qui marque dès le départ dans la musique de Muddy Monk c’est sa voix, éthérée et unique. Elle susurre autant qu’elle scande, habitée à tout moment par les textes qu’elle proclame. Cette voix, cet atout qu’il a fini par amadouer et apprivoiser, il l’allie à ses synthés, ses machines avec lesquelles il joue avec tant d’aisance. Ces deux éléments, importants et majeurs, s’associent à des textes poétiques qui parlent d’amour, d’évasion, d’aventure et de nostalgie. Ensemble, ils forment la sainte trinité de la musique de Muddy Monk. Une musique qui prête au rêve et au fantasme, dans laquelle on se ballade, une musique qui s’écoutera aussi facilement pour guider ses rêves que pour des ballades nocturnes guidées par la lumière des néons.

Et si l’on pourrait craindre une certaine monotonie du style, il n’en est rien tant le garçon a trouvé un parfait dosage dans sa musique. Si Boy part en puissance, la tête dans le guidon avec un côté halluciné et presque épique, En Lea et L’aventura nous emmènent, elles, du côté d’une bossa nova synthétique et réjouissante. Yunko Tabei, hommage à la première femme alpiniste à avoir atteint le sommet l’Everest, calme le jeu dans cette histoire de femme indépendante que l’on perd sans cesse. Niveau mélancolie, un titre aussi beau et doux que Baby nous obsède dès la première écoute et se fait directement intemporel. C’est un sentiment assez irréel qui se diffuse à l’écoute de la musique de Muddy Monk, comme si l’on regardait le monde à travers un voile qui le déforme et le rend différent, plus doux, moins sombre.

Idéalement, on en est sûr, la musique du Suisse est faite pour être écoutée la tête posée sur les cuisses de l’être aimé. Avec des titres comme Circuit 71, Ocean ou Drift, il parvient ainsi à donner du cœur et du corps à un style musical qu’on voit trop souvent de manière distante. En insufflant un souffle intime et habité à sa musique, Muddy Monk touche ainsi le sublime du doigt. Splash nous emmène doucement vers la fin du voyage, la tête définitivement dans les étoiles, le regard perdu vers cet horizon dans lequel nos rêves et le réel se frôlent sans jamais vraiment se toucher.

« Ride » signifie « ballade ». Et autant le dire, cette ballade dans le Longue Ride de Muddy Monk est de celles dont on revient changé. On est sûr que c’est aussi le cas pour lui : à travers cette prise de risque contrôlée, il nous offre un album tout en maîtrise, qui trouve son centre névralgique au croisement des routes de l’émotion, du fantasme et de l’intime. Alors mets ton casque et prends la route pour rider la musique de Muddy Monk.