Mou – Nirvanana : « C’est l’amour que je chante »

Juste avant la sortie de son deuxième album, Nirvanana, nous avons rencontré Mou pour parler amour, humour et fontaines à Cheddar. Et puis comme nous n’étions pas très loin du Jardin des Plantes, nous l’avons embarqué pour quelques photos dans l’univers onirique des sculptures des Mini-Mondes du Muséum national d’Histoire naturelle. C’était floral !

La Face B : Comment vas-tu ?

Mou : Ça va très bien. On est dans la dernière ligne droite avant la sortie de mon deuxième album. Je suis très content que cela sorte enfin. Ça fait un moment que c’est prêt. Maintenant, il faut que cela sorte !

La Face B : C’est un moment un peu particulier que tu dois vivre avec la sortie de ton deuxième album, Nirvanana, sachant que le premier, Bijoux d’Amour, était sorti pendant le confinement.

Mou : Oui, c’était en avril 2020, le 24 avril. On était au début du confinement strict.

La Face B : Tu avais quand même réussi à le partager ?

Mou : On a profité du fait que les gens soient plus présents sur les réseaux. J’ai géré les envois des vinyles en y joignant des petites notes afin d’avoir un contact plus proche avec les gens. Le confinement a permis cela. Et puis, s’il avait fallu attendre la fin du confinement, je me serais retrouvé noyé parmi beaucoup d’autres artistes. Ça a été l’occasion de faire une sortie de premier album proche des gens et, en évitant la vague des reports dus au covid, de toucher un maximum de personnes.

La Face B : Un second album est toujours un exercice délicat. Le premier bénéficie de ce qui constitue le fondement du travail effectué depuis le début de son projet. Le deuxième ne bénéficie pas, en général, de ce recul. Comment l’as-tu abordé ?

Mou : Le deuxième album, je l’ai finalement abordé de manière très naturelle. Je ne me suis pas posé trop de questions. Je suis parti avec, en tête, le thème du rêve qui était déjà présent dans Bijoux d’Amour, avec des textes très imaginaires. De façon suggestive, toucher à l’idée du nirvana – du Nirvanana – de cette femme qui est rêvée et dont on rêve. J’ai donc abordé mon deuxième album sereinement sans trop me poser de questions. Je ne me suis pas demandé : « Est-ce qu’il faut faire ceci ou cela ? ». Ma musique est simple. Tout est donc venu naturellement.

La Face B : Tes chansons nous parviennent tels les mets d’un repas. On en vient à se demander, quels sont les ingrédients que tu utilises pour les élaborer ? Parmi ceux qui me viennent en tête, beaucoup se terminent par « our ». Et pour commencer, forcément, l’amour ?

Mou : L’amour, oui. De toute manière, je pense que c’est l’amour que je chante. Toutes mes chansons en sont proches. En fait, l’amour est un thème très présent dans la chanson française. Il y a toujours eu des chansons d’amour. Et, de mon côté, j’ai essayé d’aborder ce thème d’une manière différente, décalée. Comme dans ma chanson Chemise, présente sur mon premier album. J’ai essayé d’évoquer l’amour en ayant une autre vision, sans dire : « Je t’aime », mais en parlant d’une chemise. C’est ce décalage qui m’intéresse dans la chanson. Je fais des chansons d’amour sans pour autant utiliser le mot amour, mais en le suggérant : « j’ai fait cet effort pour elle (par amour) », « je lui ai fait un gigot d’agneau (par amour) » … Je trouve intéressant d’aborder la chanson d’amour avec un autre regard.

La Face B : Pour continuer avec les mots qui finissent en « our ». On trouve également dans tes chansons une bonne dose d’humour et une profusion de calembours.

Mou : Pareil, c’est très important pour moi. J’aime qu’il y ait du second degré dans ma musique. Que ce soit drôle. Que les gens prennent du plaisir. Avant, j’étais cuisinier. Quand on me demandait « Quel est ton plat signature ?», je ne savais pas quoi répondre. En fait, j’aime surtout faire plaisir aux gens quand je prépare mes plats. La notion de plaisir vient du partage. C’est ce que je souhaite faire dans la musique. Que les gens ne se prennent pas la tête. Qu’ils se laissent aller quand ils m’écoutent. Que cela ne soit pas éloigné de leursquotidien et que ce soit, pour eux, l’occasion de passer un bon moment. Le second degré, l’humour et l’amour jouent avec des choses drôles et touchantes. Je trouve cela nickel.

La Face B : Un dressage glamour.

Mou : C’est l’image que je veux donner. Mettre du vernis à paillettes, c’est très bien aussi. Ce côté décalé que je peux avoir dans la musique, on peut le retrouver dans mon image.

La Face B : Un soupçon de troubadour. 

Mou : On rejoint cette envie de faire plaisir aux gens. Je trouve que c’est sain de ne pas les emmener vers quelque chose de trop mélancolique. Quoique la mélancolie puisse être très belle et touchante également. Partager des histoires simples où tout le monde pourrait se retrouver. Qu’ils puissent se dire « ah ben, j’ai vécu ça » ou « je m’identifie là-dedans ». C’est plus intéressant que de raconter des histoires qui ne les atteignent pas.

La Face B : Un troubadour peut aussi cacher en arrière-plan de ses chansons une critique de la société. Pour reprendre les termes en « our », on pourrait parler de détours ou de contre-jours. C’est un sujet que tu abordes également.

Mou : Il existe des choses qui ne me touchent pas, comme les Victoires de la Musique. Il y a également des trucs plus « personnels », mais que je tourne toujours en rigolade comme dans Ça va le faire. Cacher une espèce de meurtre sous une instrumentale très joyeuse où l’on pourrait à la limite danser ; ces nuances qui apparaissent quand on chante quelque chose de triste sur un truc enjoué, ou a contrario sur une musique ultra mélancolique quand je chante quelque chose de drôle.

La Face B : Et tous ces ingrédients, amour, humour, glamour, troubadour, tu les mélanges, les lies dans tes chansons.

Mou : Pour créer l’ensemble.

La Face B : Mais qu’est-ce qu’il fait que finalement cela sonne Mou ?

Mou : Il y a la nonchalance qui s’en dégage. Ce point d’humour, cette pointe d’amour mélangés avec ce que je vis et avec beaucoup d’imagination. Dans mes chansons, c’est 80% de fiction et 20% de ma vie. Mais grâce à des choses du quotidien, on peut partir dans un imaginaire qui peut dépasser tout le truc. Trouver des choses qui atteignent tout le monde. Ce qui fait Mou, c’est vraiment la nonchalance, l’amour et l’humour. C’est un bon résumé. Je pense que je cache ma vision de l’amour en la contournant et en parcourant tous ses à-côtés plutôt que de l’aborder de façon directe.

La Face B : Au printemps, pour coller à l’actualité politique, tu avais sorti George Bouffe. Cette chanson ne figure pas sur l’album, parce que je suppose qu’elle avait été sorti pour coller à l’actualité électorale.

Mou : George Bouffe est sorti pour relancer le projet Mou. Il fallait que cela tombe pendant les élections présidentielles, pour avoir ce côté décalé. On a choisi de ne pas le mettre dans l’album parce que je souhaitais rester dans la cohérence. Je voulais que Nirvanana soit Nirvanana. George Bouffe n’y avait pas sa place. J’allais dire que je ne parle pas d’amour dedans, mais en fait non, j’en parle aussi inconsciemment, alors que ce n’est pas le thème abordé. George Bouffe, c’était le retour de Mou, les élections présidentielles, le débat de l’entre-deux tours. « Je ne vous raconterai pas de salades », un discours électoral vu côté cuisine. Cuisine que j’ai, d’ailleurs, lâchée il y a maintenant un an pour ne faire que de la musique. Ça me faisait du bien de déballer ça avec ce second degré qui m’est cher.

La Face B : Si tu avais été élu président de la graille, quels nouveaux ministères aurais-tu mis en place ?

Mou : J’aurais mis en place le ministère de l’Amour, un ministère de l’Humour. Et un autre pour assurer l’entretien de toutes les fontaines à cheddar, avec un pôle cuisine assez dense. Ça me paraît déjà bien.

La Face B : Et les premières mesures que tu aurais prises ?

Mou : Et bien les fontaines à cheddar [Rires]. En vrai, je ne sais pas. Peut-être aucune mesure.

La Face B : Tu as quitté Nantes pour venir à Paris. Ton cadre de vie a donc changé.

Mou : J’ai toujours vécu à Nantes. Il y a des cercles qui se créent. Ici, c’est tout nouveau pour moi. Je trouve cela très intéressant. C’est la ville où il faut être. Je ne pense pas que ce soit une légende, même si cela cache énormément de travail. Il y a des gens qui sont en province et qui se débrouillent. J’en suis aussi la preuve. Au début, cela a très bien marché alors que j’habitais à Nantes. Là, c’est un nouveau départ. Cela fait du bien.

La Face B : Une nouvelle structure ?

Mou : Non, ce n’est pas prévu. Avec Nirvanana, je suis toujours sur Futurs Records.

La Face B : Tu vas donc commuter entre Nantes et Paris.

Mou : Je pense que cela va se faire ainsi.

La Face B : Tu as aussi mis de côté le métier de cuisinier pour te consacrer pleinement à la musique.

Mou : J’ai décidé de faire cela parce que je ne voulais pas avoir de regrets de ne pas avoir consacré une, deux ou trois années de ma vie à ne faire que de la musique. C’est un choix que je n’avais pas fait tout au début, lorsque Mou avait percé. On m’avait dit : « Vas-y, il faut que tu quittes ton taf ». Je ne l’ai pas fait parce que je pense que j’en avais un peu peur. J’avais beaucoup d’amis autour de moi qui me disaient « L’intermittence, c’est compliqué, je galère ». Quand tu vois ta musique marcher et que tu as un boulot qui te plaît, tu ne te poses pas vraiment la question de l’abandonner.

Là, avec du recul, je peux me dire que depuis mes 18 ans j’ai donné 13 ans de ma vie à faire de la cuisine. Une pause ne peut pas me faire de mal. Et puis, je ne regretterai pas de ne pas avoir suffisamment consacré de temps à faire de la musique.

Et cuisinier, c’est un taf que je peux reprendre facilement. Demain, si je vais dans un resto, ils ne seront pas réticents à m’embaucher. C’est un secteur en recherche d’emploi.

La Face B : Tu auras peut-être des concepts à inventer

Mou : Oui. Des restos-concerts où les cuisiniers formeraient un groupe. Et où l’on ferait de la musique en cuisinant !

La Face B : Quelles sont tes prochaines actualités ? Hormis bien sûr la sortie de ton album, tu as également des concerts de prévu.

Mou : Il y a la release party, à Paris, au Pop-Up du Label le 11 janvier. Normalement, il y a aura également une release à Nantes. On est dessus en ce moment. Et puis on verra. Tournée ou pas. Mais que cela bouge ! [Rires]

La Face B : Et pour finir, que peut-on te souhaiter ?

Mou : Une longue vie à Nirvanana et à Mou. Que Mou reste dans sa nonchalance et dans son humour-amour [Rires]