Les Moïse Turizer rêvent ils de moutons électriques?

Le duo de post punk hybride est de retour avec Cc : Dream, un EP plus percutant que jamais. Moïse Turizer semble apprécier particulièrement ce format et les enchaîne, permettant sans doute plus d’expérimentation, de nous embarquer dans une ambiance différente à chaque fois, voire même de tenter les collaborations. Le monstre bicéphale s’est du coup associé au DJ expérimental Ouai Stéphane pour composer des titres ultra électriques Cela semblait une évidence tellement ils partagent un goût commun pour l’innovation, la mise en scène et les rythmiques qui tabassent. Le résultat ? Un Cc : Dream totalement fou qui sort Moïse Turizer de leur zone de confort. Une percée dans les cartes mémoires et les pensées d’une intelligence artificielle….

Après une pochette sans couleurs illustrant le blanc de l’œil, le duo décide de s’afficher, mais toujours le visage déformé. Digitalisé, laissant apparaitre une façade dorée, le duo semble opérer une transformation vers des sonorités plus lumineuses. Habités d’une énergie post punk aux relents industriels et sombres, la collaboration avec Ouai Stéphane fait émerger des séquences électroniques pensées pour taper du pied et une clarté qu’on ne leur connaissait pas encore.

En guise d’inauguration, Oc3an débute avec une rythmique à la The Prodigy qui nous fait directement rentrer dans le vif du sujet. Ça va être la grosse teuf bien vénère. Le groupe est toujours armé du vocodeur qui donne à la voix une allure très digitale, insaisissable et ainsi irréelle. Sur ce morceau, elle s’élance dans des refrains aussi accrocheurs que de la bonne pop, mais accompagnée de tout un attirail électronique. On ne peut que s’émerveiller de la richesse de la production, entre drops parfaitement placés et pépites instrumentales à profusion. C’est la parfaite combinaison de l’efficacité et l’expérience d’un Ouai Stéphane avec la créativité et l’énergie punk des Moïse Turizer.

Amateurs de gros beats ultra efficaces, le duo décide de nous catcher directement avec les percussions latines et tribales de Some30ne 3lse. Difficile de ne pas taper du pied. Là, on arrive presque au trip psychédélique qui nous fait voyager en bonne et dû forme. Entre ponts planants et refrains fédérateurs, on est vite pris dans le vertige.

Titre éponyme, Cc : Dream est aussi le plus contrasté de tous. Sans doute choisi pour représenter à la perfection le combo des deux univers artistiques ? Entre touches de claviers dissonants, basses industrielles, ponctuées de cris reçus tels des coups de poing, l’intro promet une brutalité comme on les aime. Le coup de génie se trouve là où l’on ne l’attend pas. Après nous avoir brusqués, le groupe s’élance dans des ponts ultra planants évoquant le domaine du songe électronique. Un mélange d’une vraie puissance, toute en montée.

Afin de finaliser en beauté, Telev1si0n est un titre électro dans la pure veine. Seule quelques voix robotiques viennent transpercer cet attirail de tuyauteries qui explosent, rouages qui crissent et moteurs qui vrombissent. Un titre tout en tension qui vient percuter le cerveau jusqu’à nous transformer en machines qui ne sont plus libres de leurs mouvements. Les Moïse Turizer nous ont définitivement endoctrinés.

Plus électronique que jamais, mais surtout plus digital, Moïse Turizer s’empare de l’imagerie, des codes et des sonorités d’une machinerie folle. Un ordinateur pensant, piégé dans une condition matérielle représentée musicalement par ses sonorités industrielles, mais qui se prend à s’échapper en songe dans un univers éthéré. Une thématique terriblement futuriste, à l’image du son du duo. Avec Cc : Dream, on assiste sans aucun doute à l’avenir et peut être aussi à celui du rock.