Metz, à bout de bras

Caractérisé par son énergie explosive, ses coups frénétiques et ses guitares saturées, le son de Metz est un bonbon punk qui semble ne pouvoir se déguster dans les meilleures conditions qu’en live. Le pari de porter un nouvel album dans un milieu privé de concert est donc un véritable challenge pour le groupe, qui s’en sort avec majesté. 

Pourtant en cette rentrée, il y a nom qui a résonné comme un écho dans les discussions de comptoirs des rares bars rock. « T’as écouté le dernier Metz? ». Le groupe de Noise punk Canadien serait-il devenu un incontournable? Ou cet album en particulier a-t-il réussi à décrocher un véritable engouement? Sorti le 9 septembre dernier, Atlas Vending marque un véritablement tournant. 

Quelques singles ont pu teaser l’arrivée imminente d’un renouveau du genre. Des lignes mélodiques plus claires, des sons moins distordus, des chansons qui prennent plus de temps pour s’installer… Sans jamais rogner une fois sur la rage et l’électrique. 

Tout d’abord une pochette: un jeune homme couvert de boue s’agrippe à une barrière. Impression figée et statuesque. Photographie du père d’Alex Edkins, elle représente ces difficultés que l’on surmonte avec courage. Le nom Atlas Vending reste quant à lui un mystère, que l’on pourrait néanmoins relier avec le destin du titan grec qui porte le monde du bout des bras.

En cette période impitoyable, c’est une thématique qui ne peut que parler à chacun d’entre nous. 

L’album débute de façon fracassante avec Pulse. La batterie sonne comme un étranger souhaitant s’inviter brutalement chez vous, cordes de guitares frappées de façon convulsive, voix brisée qui tour à tour psalmodie et crie de détresse… Ce morceau est à l’image de ceux qui suivront. Des identités fortes, aux tonalités désespérées. 

Blind Youth Industrial Park fait crisser les guitares et permet de véritablement se rendre compte des changements opérés dans cet album. Une voix moins saturée, plus assumée. Mais aussi des morceaux construits de façon plus traditionnels avec un refrain plus mélodique, des reprises et temps morts qui permettent (enfin) cette petite respiration essentielle entre deux pogos de l’enfer, mais aussi de relancer la machine. Un superbe clip très cinématographique accompagne ce morceau, dans un environnement post apocalyptique froid mais éblouissant de beauté.

Toujours aussi fort, The Mirror est marqué par ses accords de guitares dissonants terriblement accrocheurs. Sa batterie presque tribale mène à la guerre. Critique des médias, et hymne à l’esprit critique, Metz est plus que jamais engagé.

No Ceiling est un titre terriblement court qui sonne bien différemment. Presque pop, pour du Metz entendons-nous bien, il laisse entrevoir des accords plus positifs, une mélodie assez punk californienne, et puis une rengaine sur l’amour.

Entrevue de courte durée puisque le groupe revient dans riffs désespérés avec Hail Taxi. Le titre est accompagné d’un clip de toute beauté dans lequel une femme navigue dans une eau noire et jette à la mer ses souvenirs encombrants. Encore une fois, sous couvert de notes très sombres, le morceau laisse entrevoir une vraie lueur d’espoir avec des guitares plus célestes sur les refrains. Une construction qui peut se retrouver dans Framed by the Comet’s Tail. Cette ambiguïté entre le très sombre et l’éclat bref est décidément ce qui caractérisera le plus cet album. 

Les riffs peuvent même devenir plus psychédéliques à la manière de Draw us in, façon bad trip désespéré, ou hystériques avec un Sugar Pill. On peut ainsi accrocher plus ou moins à certains morceaux, mais il est indéniable que chacun ont une vraie patte assumée, et le son de Metz de plus en plus identifiable.

Batterie déchainée, guitare dissonante venue tout droit des enfers, Parasite est ce petit coup brutale histoire de réveiller bon coup avant la fin. Parce que la suite, elle est dantesque. 

A Boat to Drown In est le résumé parfait de l’évolution de Metz. Le groupe prend son temps pour installer une atmosphère, toujours aussi lourde et répétitive, entrecoupée de breaks bien violents qui relancent à la perfection cette machine électrique. A la fois tourmenté et belliqueux, le morceau possède aussi des moments de grâce, où les guitares s’envolent et permettent à la chanson de prendre une autre dimension. A l’image de son clip, on retrace un parcours, une histoire et ainsi un morceau de vie. Ce moment de perdition totale, plus ou moins chaotique, qui permet de remettre notre vie en question et de tout envoyer valser. Un final puissant et poétique. Alors qu’on pensait avoir compris l’album, Metz nous surprend et nous chamboule un peu.

Atlas Vending est une vraie réussite. Une atmosphère se dégage, une maturité aussi. Metz a évolué, a pris suffisamment de confiance pour proposer des sons différents, sans jamais perdre l’identité de leurs débuts. Bien que la longueur des titres se rallonge, on sent une urgence se dessiner. Une volonté de partager tous ces récits aussi, de les livrer en live et d’avoir l’écho de la foule. Album sur l’adversité, le courage et la résilience avant de mener le combat contre soi même, il est le plus profond et personnel du groupe. Sans nul doute que ces titres trouveront parfaitement leur place dans les prochaines setlists, qu’on ne peut que tarder de découvrir. C’est lourd, c’est bruyant, et c’en est même beau.