Majeur.e.s : « Nous devons montrer l’exemple pour créer une lame de fond et un vrai mouvement sociétal profond »

Le 26 mai dernier, Majeur.e.s, un annuaire inclusif destiné aux professionnel.les femmes, personnes trans et non-binaires s’installait dans le paysage musical français. Nous avons interrogé Caroline Decroix, co-cheffe du projet au sujet de cet outil, qu’elle qualifie de concret et de vivant. Un échange aux effluves de féminisme, de colère et de radicalité. Afin d’essayer de sortir de cette société hétéronormée, capitaliste et patriarcale.

La Face B : Majeur.e.s est le 1er annuaire inclusif en ligne des professionnel.les femmes cis, personnes trans et non-binaires dans l’industrie musicale. Il a été lancé le 26 mai 2022, pour accélérer le changement au sein d’une filière musicale encore profondément inégalitaire. Est-ce qu’il y a un fait en particulier qui a lancé le projet ?

Caroline Decroix : Le projet est plutôt venu d’un constat. Majeur.e.s est porté par shesaid.so France, qui est l’antenne française d’un réseau international, présent dans 18 pays et qui agit dans l’industrie musicale. L’idée est de créer du lien entre les femmes cis, personnes trans et non-binaires, en réaction aux boys club. Dès 2017, un groupe Facebook a été crée afin de partager des offres d’emplois et s’entraider. Il en a découlé des actions concrètes et des soirées furent organisées. On découvrait alors qu’il y avait un réel besoin mais aussi beaucoup d’angles morts à travailler au sein de cette industrie.

Aujourd’hui le groupe compte un peu plus de 4500 personnes (inscription ici). Donc l’idée a émergé qu’il y ait une suite logique à ce que tout faisait shesaid.so France. Je précise que le collectif s’est constitué en association loi 1901 en 2019, dans l’idée de renforcer et s’imposer, comme une actrice majeure dans le paysage musical.

Très naturellement, on a souhaité avoir un annuaire. On entendait souvent des phrases du type : « on adorerait travailler avec mais on ne sait pas où les trouver » ou : « il n’y en a pas dans les métiers techniques ou d’expertises musicales « . Alors, on a voulu montrer que si, les femmes cis, personnes trans et non-binaires, sont là.

Puis il y a eu un alignement de planètes puisque Spotify France avait la volonté de créer aussi un outil pour les techniciennes de la musique, en complément de tout l’accompagnement qu’ils font déjà avec la playlist Equal. Marie-Anne Robert, active au sein de shesaid.so discutait avec la plateforme à ce moment-là et a donc créé la rencontre. Le fait d’avoir un poids lourd de l’industrie avec nous a été un élément déclencheur. On a eu des financements et des partenaires importants comme le Ministère de la Culture, le CNM, la SACEM, l’ADAMI et aussi beaucoup de festivals.

Ils nous accompagnent aussi d’autres aspects : de la logistique, de la mise en relation, des conseils. Donc ils ne sont pas du tout avares de partager tout ça avec nous. Et on s’est aussi beaucoup appuyées sur leur ingénierie. Outre l’aspect financier, ils nous ont aussi apporté tout un accompagnement et une expertise. C’est un travail qu’on a fait ensemble

On a tout de suite mis au point un mode de fonctionnement. C’est-à-dire que c’était nous qui étions à l’origine du projet et c’était nous qui le pilotions. Ça a toujours été très clair et il n’y a jamais eu de volonté de récupération ou de vouloir tirer la couverture à soi. Ça a toujours été une relation extrêmement saine avec eux.

Les inégalités ne se positionnent pas qu’à l’endroit du genre.

Caroline Decroix – Majeur.e.s
Portrait de Caroline Decroix par Clara de Latour
Caroline Decroix, co-cheffe du projet. Crédit : Clara de Latour

LFB : Caroline Decroix tu es co-cheffe du projet. Peux-tu revenir sur ton parcours dans l’aventure ?

C : J’ai rejoint le projet Majeur.e.s au tout début. Je devais faire une mission de deux mois pour faire une étude de prévisualisation et voir si le projet était réaliste, comment on pouvait le financer, et cetera. Finalement, il s’avère que je suis tout de suite partie dans l’aventure. Et on est très vite rentré en production. J’ai donc travaillé avec les membres bénévoles actifs de shesaid.so, qui ont été indispensables au démarrage du projet. Alice Deleporte, co-cheffe de projet et moi, étions les deux chevilles ouvrières. Et on a vraiment travaillé en binôme, sur le front. Aujourd’hui, elle a rejoint le lieu de musiques actuelles l’Echonova, comme responsable de la communication.

De mon côté, j’ai presque 20 ans d’expérience dans l’audiovisuel. Je suis très multitâche, à naviguer dans les industries culturelles, d’un métier à l’autre, d’une industrie à l’autre. Je ne tiens pas en place.

LFB : Pourquoi avoir choisi le nom Majeur.e.s ?

C: Claire Morel, la présidence de l’association, l’a trouvé lors d’un brainstorm collectif.  On voulait un nom qui soit épicène. On l’a féminisé en écriture inclusive pour que tout le monde s’y sente vraiment bien. Évidemment, il y avait aussi Majeur.e.s pour les majors de l’industrie musicale puis, le fait qu’on est nombreux et nombreuses et qu’on veut le faire savoir. 

LFB : Le geste aussi ?

On peut aussi imaginer ça. On nous a parlé d’émancipation : quand on devient majeur, on s’émancipe et ça, je trouvais ça super intéressant. Il y a aussi cette notion là, s’émanciper du patriarcat, du boys club, du joug qu’on peut ressentir dans nos vies, nos métiers, et cetera.

LFB : Shesaid.so a 5 antennes en France.

C: La volonté n’est pas tant d’avoir un nombre précis d’antennes mais plutôt de rayonner sur tout le territoire. On œuvre pour davantage d’égalité entre les genres mais les inégalités ne se positionnent pas qu’à l’endroit du genre. C’est intersectionnel. Elles peuvent être sociales, ethnoculturelles ou encore territoriales, et en particulier dans les industries culturelles qui sont très parisiano-centrées. On souhaite donc montrer qu’il se passe des choses ailleurs qu’à la capitale. Mais aussi qu’il s’en passe de plus en plus. Et donc agir à cet endroit-là. On a souhaité avoir des représentant.e.s dans chaque grande ville de France. Nous sommes donc à Paris, en Île-de-France, Lyon, Grenoble, Toulouse, Strasbourg, Rennes, Vannes, Nantes. Hors donc des réseaux classiques de l’industrie.

Majeur.e.s permet aux femmes de faire réseau, de s’empouvoirer, de se rencontrer.

Caroline Decroix – Majeur.e.s

LFB : Pourquoi s’inscrire sur l’annuaire ? Qu’est-ce que vous auriez envie de dire à celleux qui hésitent ? Et est-ce qu’il y a une place pour les bénévoles de la musique ?

C: On a imaginé Majeur.e.s comme un outil pour permettre aux professionnel.les de la musique d’agir à leur endroit et œuvrer pour plus d’égalité. Donc, si tu t’offusques qu’il n’y ait pas assez de femmes sur certains métiers, si tu es heurté.e.s par les chiffres inquiétants de la représentativité des femmes et des minorisés de genre, si tu as envie que ça change mais que tu ne sais pas du tout comment t’y prendre, et bien justement, tu vas tout simplement sur Majeur.e.s.

L’annuaire est pensé de manière très intuitive, pour que les recherches soient aisées et rapides. On a eu envie de créer une vitrine pour participer à l’empouvoirement des femmes et des minorisées de genre, parce que très souvent on les retrouve à des postes dit supports, « les métiers du care ». Ce sont des fonctions de soutien, d’accompagnement, d’accueil où elles vont rassurer, encadrer et organiser. Ce sont des métiers absolument indispensables au bon fonctionnement de l’industrie sauf qu’ils ne sont pas du tout valorisés.

Pendant très longtemps on a cru – et certains le croient encore – que ces métiers font appel à des compétences typiquement féminines. Alors que c’est tout simplement parce qu’on vit dans une société patriarcale qui nous conditionne depuis notre plus jeune âge à tenir ce rôle-là et à développer toutes ces qualités. Qualités qui ne sont pas liées à notre condition de femme physiologique mais bien à notre place de femme dans la société.

Majeur.e.s permet donc de remettre en avant les compétences et le savoir-faire afin de sortir de cette binarité où les hommes sont à des postes de responsabilité et d’expertises musicales (la direction artistique, la programmation) tandis que les femmes, néanmoins indispensables, sont adjointes ou à des fonctions supports, pour que les métiers d’expertises puissent eux, rayonner et s’étendre. 

Majeur.e.s donne donc la possibilité aux femmes et aux minorisées de genre de faire réseau, de s’empouvoirer, de se rencontrer. Mais on a aussi bien conscience que cette industrie est très challengeante et qu’il y a beaucoup d’exigences. Pour nous, un.e professionnel.le de la musique, ce n’est pas quelqu’un qui a 600 fiches de paie liées à ce métier mais plutôt celle qui dispose d’une expertise ou d’une expérience quelle qu’elle soit. Majeur.e.s souhaite redonner sa place aux compétences, au savoir-faire qu’on acquiert en étant multi-casquette, multi-métiers, multi-statut. Dépasser ainsi les codes du monde du travail pour ouvrir les esprits et créer des opportunités pour les gens. Si tu es bénévole, alors tu as parfaitement ta place sur le site.

On essaie aussi d’être très proches de notre communauté d’utilisateurices. L’idée est de co-construire l’outil avec elleux, donc leurs retours et les nouvelles idées sont les bienvenues. On souhaite donner la possibilité à tout à chacun d’agir.

On est actives quand on vient sur Majeur.e.s.

Caroline Decroix et Alice Deleporte, co-cheffes du projet – Lancement de Majeur.e.s
Crédits photos : Ellie Brightside

LFB : Huit mois après la création de l’annuaire, où en sommes-nous ? Il y a plus de 1000 profils créés et des retours très positifs. Est-ce que tu as des exemples concrets de choses qui ont évolué ? A l’inverse, est-ce qu’il y a selon toi des choses à améliorer ? 

C: On commence à recueillir des témoignages positifs et éclairants et on a déjà plusieurs améliorations mises en œuvre dont une qui nous tenait énormément à cœur et qui fait écho à ce que tu me disais au début, que nous étions le premier annuaire en ligne. De cette façon-là, c’est vrai, mais on n’aurait jamais pu lancer cette plateforme sans l’ensemble de toutes les initiatives déjà présentes. Donc on a pris le temps de rencontrer tout le monde afin de concevoir un maillage extrêmement solide, confortable et puissant. 

On a donc créé la possibilité de filtrer les recherches par des tags que l’on appelle partenaires. C’est-à-dire qu’on collabore avec des collectifs et organisations féministes qui travaillent sur ces questions. On voudrait vraiment que Majeur.e.s soit un outil pour ces collectifs-là, qu’il serve de catalyseur afin qu’il y ait un écosystème féministe et égalitaire qui se développe dans la musique. On se met donc aussi au service de toutes ces organisations.

LFB : C’est intéressant que tu ne viennes pas du secteur musical car tu as donc un spectre beaucoup plus large. Est-ce que tu constates que la culture dans son ensemble est impactée par un manque de visibilité des femmes cis, personnes trans et non-binaires ?

Évidemment, et ça se retrouve aussi dans la société. Je suis sûre que si on discutait deux secondes avec les serveuses (ndrl : l’entretien se passe dans un bar restaurant), on entendrait exactement la même chose que ce qui se passe dans le cinéma, la musique ou la littérature.

On a, je pense, une sorte de devoir de représentativité et représentation par rapport au reste de la société. C’est une chance de pouvoir partager le fruit de notre travail de façon publique. On se doit donc d’avoir une forme d’exemplarité, même si cette notion est un peu dévoyée maintenant parce qu’on la brandit à tort et à travers. C’est très important d’ouvrir la voie. On peut s’exprimer et on nous écoute, voire même on nous attend. Les artistes et celleux qui accompagnent la création sont admiré.e.s. Que ce soit dans le cinéma, la musique, la télévision ou encore la danse, il faut absolument qu’on montre l’exemple pour créer une lame de fond et un vrai mouvement sociétal profond. 

#Meetoo par exemple a été extrêmement fort, allant jusqu’à ébranler toute la société. Dorénavant, personne peut dire que ça n’existe pas, même si certain.e.s ne comprennent pas bien la différence entre le genre et sexe. Ce qu’on pardonne totalement car ce sont des nouvelles notions. Iels sont quand même conscient.e.s que quelque chose se passe. Et il faut en profiter parce que les changements de cette nature sont très fragiles et très éphémères. L’histoire du féminisme à travers les époques et dans le monde de l’art en est la preuve : c’est une éternelle répétition. Ce sont les mêmes mouvements, les mêmes prises de conscience, la même envie d’agir de quelques personnes, et cetera. Cette fois-ci, je trouve qu’il y a quelque chose de beaucoup plus massif, aussi grâce aux nouveaux moyens de communication.

LFB : #Metoo bouleverse le secteur musical, Lola Frichet lance More Women On Stage & Backstage et Lucie Marmiesse crée le compte Instagram Go Girls pour une meilleure visibilité des femmes cis, personnes trans et non-binaires dans le milieu culturel. Est-ce qu’on est pas en train d’assister à un changement, où les femmes cis et minorisées de genre s’affirment et osent ?  Comment est-ce que Majeur.e.s s’intègre dans cet écosystème ?

C : Nous, on est à la fois la mère et l’enfant de tout ça. shesaid.so a grandement participé à cette prise de conscience. Et même si ce n’est pas le cœur de notre action, on a beaucoup œuvré pour donner de la force et créer un vrai changement dans les pratiques professionnelles de l’industrie musicale. 

Mais comme je le disais tout à l’heure, on n’y arrivera pas seules. Donc pour que ce maillage se fasse, il faut que cette galaxie s’étende. Nous, on observe avec plaisir et attention toutes les initiatives qui ont les mêmes objectifs que nous. On apprend aussi beaucoup et on essaie de s’inspirer des autres.

On ne se sent pas du tout en position de leadership et c’est justement parce qu’il y a toutes ces initiatives aux formes variées qu’on touche de plus en plus de gens. Il y en a qui vont être sensibles à l’image et aller vers Go Girls. D’autres vont être plus sur de l’objectivation chiffrée et vont se tourner vers des études faites par le ministère et par le CNM. Il faut vraiment que ça vienne de tous les côtés.

LFB : Dans le dossier de presse, vous donnez quelques chiffres : 36% des actifs dans la musique et le spectacle sont des femmes et elles n’évoluent pas depuis 15 ans. Certains métiers restent fortement masculinisés : il y a uniquement 27% de techniciennes, 36% sur les emplois artistiques et seulement 9% de femmes ont des postes à haute responsabilité (direction d’établissements culturels). Quand on est face à ces données, on n’a pas un peu la rage ?

C : Évidemment. Et encore, ce ne sont pas les pires. Il n’y a que 12 % de femmes programmées dans les festivals en France. Et, à poste et compétences équivalentes, une femme va toucher environ 5 % de moins de salaire qu’un homme. C’est aussi encore et toujours la femme qui sacrifie ses ambitions, sa carrière, ses projets personnels pour prendre soin de sa famille et de ses proches. 

Mais moi, ça me fâche beaucoup. Ces dernières années, il y a une prise de conscience globale qui s’est faite au niveau de la société et notamment de l’industrie musicale. Mais le temps des constats est derrière nous et il faut maintenant passer à l’action et être radical. Nous, on veut vraiment qu’il se passe quelque chose dans une forme de pérennité et d’action profonde et réelle. 

D’ailleurs, on est très admiratives du discours que porte l’ancienne haute fonctionnaire Reine Prat, qui a beaucoup œuvré pour l’État à cette prise de conscience. En effet, elle a piloté les premiers rapports sur l’égalité femmes-hommes et les inégalités entre les deux sexes dans la culture. Elle a écrit un livre inspirant : Exploser le plafond. Maintenant elle milite pour la désobéissance civile.

LFB : De votre côté, vous participez à un certain nombre d’évènements : le BISE festival, MaMa mais aussi cette soirée aujourd’hui autour du podcast Cherchez la femme, qui s’intéresse aux femmes artistes. C’est important pour vous l’engagement ? Et c’est quoi s’engager ?

C : On est très engagées, sur tout. On a voulu faire de Majeur.e.s un outil concret et vivant. Et puis on a créé une plateforme en ligne. Mais on ne voulait pas d’une messagerie interne parce qu’on on croit beaucoup à la rencontre dans la vraie vie. On souhaite que les gens puissent s’appeler mais aussi se voir et discuter.

Donc, évidemment, chaque événement fait sens. C’est là où tu vas toucher des gens qui ne sont pas forcément au courant du projet, ni même particulièrement convaincus qu’il a du sens. Et ça ouvre plein de perspectives, c’est hyper important. 

Quand tu choisis de travailler sur ces sujets-là, c’est clairement parce qu’il y a une forme de colère. Ou en tout cas d’envie de créer un réel changement. Et moi, est-ce que je suis engagée ? J’essaie, dans tous les instants de ma vie personnelle et professionnelle. Mais je suis comme tout le monde, avec mes faiblesses et mes contradictions. Parce que ce n’est pas facile dans cette société patriarcale et capitaliste, de lutter contre toutes les sirènes qui sonnent autour de nous. Mais j’essaye d’être cohérente, d’avoir une forme d’engagement dans mon quotidien et de le transmettre à mes enfants. Je dirais que je suis très engagée, presque trop parfois. Mais est-ce qu’on peut être trop engagée ? Je ne crois pas.

C’est bouleversant de se rendre compte que ce qu’on a pris pour quelque chose de très solide, qui a construit notre façon de se représenter le monde et de le comprendre finalement, c’est de s’appuyer sur la domination, la violence, l’agression, la maltraitance. Somme toute, les belles valeurs du patriarcat.

Caroline Decroix – Majeur.e.s

LFB : Enfin, est-ce que tu as fait une découverte musicale féminine récente dont tu souhaiterais nous parler ? Et est-ce que de manière plus générale, il y a une œuvre féminine qui te touche et t’atteint ?

C : Je fais beaucoup de découvertes musicales, en particulier grâce à mon compagnon. Il dig beaucoup et c’est une manière, finalement, d’accompagner mon engagement. Récemment j’ai beaucoup aimé Meryl, Mara et Piri.

J’ai aussi parlé plus tôt du livre de Reine Prat, Exploser le plafond, qui m’a beaucoup inspiré. Les quatre filles du docteur March de Louisa May Alcott a été aussi un de mes livres préférés pendant des années. Quand tu y penses, c’est très féministe et émancipateur. Je lisais aussi Georges Sand lorsque j’étais jeune et j’en parle maintenant à mes fils. 

Actuellement je découvre le livre dirigé par Juliette Drouar et Iris Brey, La culture de l’inceste. Et ça, c’est assez bouleversant. 

J’aime beaucoup aussi Delphine Saltel sur Arte Radio, Vivons heureux avant la fin du monde. Ce n’est pas toujours entièrement féministe mais il se pose beaucoup de questions sur la société, d’une façon pour le coup triviale mais toujours bien menée.

Et puis récemment, j’ai aussi écouté Vénus s’épilait-t’elle la chatte ?  qui est un podcast sur l’histoire de l’art. J’ai été très bouleversée par l’épisode sur Picasso qui est d’une violence infinie. C’est tellement représentatif de tout ce qu’on a porté aux nues ces dernières décennies. Comme l’achievement, la réussite totale, le génie absolu. Picasso est admiré à travers le monde entier. On l’étudie dans les écoles et on retrouve ses œuvres et sa figure sur des trousses, des stickers, des tee-shirts, etc.  Et il suffit d’écouter ces 45 minutes d’épisode pour ranger, voire jeter à la poubelle chaque objet griffé Picasso que tu pourrais avoir chez toi. Il fait partie, je pense, des personnes les plus horribles de la terre. 

C’est intéressant et aussi bouleversant de se rendre compte que ce qu’on a pris pour quelque chose de très solide, qui a construit notre façon de se représenter le monde et de le comprendre finalement, c’est de s’appuyer sur la domination, la violence, l’agression, la maltraitance. Somme toute, les belles valeurs du patriarcat.

Crédit photos : Clara de Latour et Ellie Brightside

Suivez l’actualité de Majeur.e.s sur Facebook et Instagram.

Rejoignez l’annuaire de Majeur.e.s.