Les clips de la semaine #78 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. Tout de suite, voici la première partie du soixante dix-huitième rendez vous des clips de la semaine.

Chevalrex – Une rose est une rose (feat. Thousand)

Lorsqu’on a découvert Providence, le dernier album de Chevalrex, notre curiosité nous a presque immédiatement menée vers son duo avec Thousand. Parce qu’ils sont, à notre humble avis, ce qu’il se fait de mieux sur la scène pop française à l’heure actuelle, voir ces deux artistes croiser leur univers avait fait exploser le compteur de l’attente.

Et autant dire qu’une rose est une rose a plus que comblé nos attentes. Individuellement d’abord, la chanson est une petite merveille pop, un do 100% masculin assez rare où les deux voix se confondent et se répondent. Pris dans la globalité de l’album, le morceau faisait exploser tout son charme homo-érotique et créé une sorte d’ambivalence bienvenue parfaitement après la superbe valse, dis à ton mec.

Le morceau avait tout du parfait single, et c’est désormais chose faite avec ce clip à l’esthétique très DIY. Une volonté affirmée par Rémy Poncet qui met en scène cette conversation en split-screen, se transformant avec Thousand en cowboys modernes qui se parlent à travers leurs écrans. Deux chapeaux, un parc et une dégustation de banane plus tard, le tour est joué, le clip jouant avec bonheur des allusions et des références que le morceau peut amener dans nos esprits.

Felhur x Andro – Bonne Planque

Un tout nouveau son pour le duo Felhur x Andro. Instru épurée et rythme frénétique, Bonne Planque est un son qui te transporte directement dans l’univers des deux rappeurs. Leur but ? Faire passer des messages simples, directs et sans langue de bois. Des punchlines sorties du monde réel, des réalités qui ne surprennent plus et un jeu du chat et de la souris entre arnaqueurs et arnaqués qui n’est même plus dissimulé. 

Avec leurs associés, tous réunis autour d’une table, Andro et Felhur se livrent à une discussion ouverte pour trouver la meilleure planque. Leur stratégie : trouver le bon pays, la bonne industrie, le bon effet de mode derrière lequel se cacher. A table, on place des pions, on mise de l’argent… et on joue gros ! Une stratégie digne d’un hybride entre jeu de Risk et poker clandestin, une ambiance douteuse et une réunion secrète. 

Felhur et Andro annoncent avec ce titre la sortie de leur album, prévue en juin 2021. Et quelle annonce ! Des thématiques fortes, une certaine envie de révéler au grand jour les plus grands secrets des puissants de ce monde… Bonne Planque est une entrée en matière détonante.

2Zer – ViperGTS

Certes plus discret ces derniers temps, 2Zer bien accompagné par Hugz Hefner (on ne change pas une équipe qui gagne) vient réveiller le moteur qui sommeillait en lui pour un retour à toute vitesse dans le clip de  Viper GTS  produit par une équipe qu’il connaît aussi très bien, celle de Saboteur Records. 

Le parisien prend à peine le temps de faire chauffer le moteur qu’il démarre le morceau avec un flow énergétique sur une instrumentale tout autant sauvage. Entouré par des véhicules sportifs, le rappeur montre qu’il n’a pas perdu la main et que lui aussi en a sous le capot. Le clip minimaliste permet à l’artiste de laisser éclater tout ce qu’il a gardé en lui depuis son dernier projet et qui n’attendait visiblement qu’à être lâché. Jouant avec le champ lexical tournant autour des véhicules motorisés, il l’annonce, rien ne va le ralentir. 

2zer prouve à nouveau qu’il n’a rien perdu de son énergie et de son rap et revient asseoir sa polyvalence avec un titre beaucoup plus agressif que ce qu’il a pu proposer sur Décisions, son dernier EP beaucoup plus aérien. 

Blood Wizard – Halo

Il y a un côté magique un peu perché dans Halo, le nouveau single de Blood Wizard. Des riffs de guitare lancinants qui s’enlacent et se superposent, une voix mi ange mi malicieuse, Halo est une plongée atmosphérique dans un monde enchanté. Le morceau folk aux accents post punk parle d’un sorcier qui utilise un peu du « halo » de son amie pour lui des fois. Cai Burns écrit: « C’est l’histoire d’un sorcier maladroit poursuivant une entité angélique qui franchit la ligne entre vision, monument et réalité. Cherchant constamment le ‘Halo’ et ne l’atteignant jamais vraiment, le sorcier commence à perdre de vue ce qu’il cherche, et la raison pour laquelle il le cherche. »

Le clip réalisé par Adrian Vitelleschi Cook tourné sous la pluie aux Nine Ladies Stone Circle dans le Peak District prend des tours de conte féérique où l’on peut voir le musicien déguisé en étrange magicien, répondre aux mouvements de Faye Rita Robinson (aussi directrice artistique et créatrice des costumes de la vidéo) dans un paysage de forêt et de roches mystiques… Un titre planant, rêveur et décalé qu’on ne se lasse pas d’écouter/regarder…

Halo figure sur Western Spaghetti, le premier album de Blood Wizard aka le musicien anglais originaire de Nottingham Cai Burns (aussi 1/3 de Kagoule) en écoute partout.

LABOTANIQUE – Le syndrome du banlieusard

Les dernières nouvelles de LABOTANIQUE dataient d’il y a deux ans. Une missive directement venue du 47e parallèle qui transformait nos deux nantais en explorateur des plantes et des sons.
Deux ans plus tard, et un nouveau crowdfunding rondement mené, Ronan et Tom repartent pour de nouvelles aventures et annoncent leur expressions végétales prévue pour juin avec un premier single, le syndrome du banlieusard.

« Je suis de la mauvaise herbe braves gens » nous disait Brassens. Repris par LABOTANIQUE près de 50 ans plus tard, cette expression pourrait presque sonner comme un aveu d’échec, la preuve que finalement les choses n’ont pas changé. Mais plutôt que de noircir le tableau, le duo préfère se poser en observateur, créant des ponts entre la réalité des uns et les fantasmes des autres. Sur une production qui leur ressemble au carrefour de la pop, du rap et de la musique électronique, ils nous racontent une histoires, celle d’une vie vouée au brassage, aux mélanges des cultures et des fleurs qui poussent dans le béton. Car en bon botanistes, ils savent bien que c’est souvent dans les croisements que naissent les plus belles plantes.

Toujours adeptes du storytelling et de la mise en image classieuse, LABOTANIQUE se transforment aujourd’hui en activistes verts, gangs à vélo qui part braver le béton pour y ramener de la verdure et distribuer ses manifestes entre les points et les pilonnes électriques tandis que nos deux héros cherchent dans leur laboratoire un moyen de ramener de la vie et du réel dans le monde. Des parallèles intéressants toujours porté par une vraie note d’espoir, c’est un peu ça LABOTANIQUE.

Di-Meh – 4×4 Diplomatique

Connu pour son énergie, notamment celle qu’il a l’habitude de dégager sur scène, le jeune Suisse Di-Meh a du se contenir en ces temps difficile pour les pogos qu’il a l’habitude de lancer. Une énergie qui a eu le temps de germer pour mieux exploser dans 4×4 Diplomatique, le nouveau clip du rappeur réalisé par Léon Santana et qui colle bien à l’univers du rappeur entre sa débordante énergie et son amour du divertissement. 

Sac sur la tête et mains liées, Di-Meh est dans une salle posture, kidnappé par une association mystérieuse géré par une chose toute aussi intrigante. Heureusement pour lui, il maitrise son art et envoie crochet sur crochet pour assommer ses rivaux. Il peut compter sur son fidèle skate pour leur échapper, même s’il ne semble pas très utile sans l’énergie que lui apporte l’artiste. Une fois débarrassé des hommes de mains, il va falloir se confronter au grand méchant et il parait bien plus costaud que prévu. Heureusement, fin tacticien et fin technicien, le suisse s’en débarrassera aisément et jubilera en fumant le cigare du grand méchant. 

Si Di-Meh montre ici qu’il sait se servir de ses poings, il ne laisse rien au hasard avec ce banger technique qui annonce un retour en grande pompe, bien servi par ce clip à l’ambiance cinématographique.  

OBI – Turn Around

Après son excellent premier single Slave We, OBI re-débarque comme une onde de choc avec Turn Around, un nouveau titre qui confirme l’énorme potentiel de l’artiste nigérian. 

À l’inverse de notre monde qui semble parfois ne pas tourner bien rond, Turn Around porte fièrement un message lourd de sens, plein d’espoir et de gratitude. Le titre mélange langues et influences, devenant ainsi un hymne universel et fédérateur. 

Côté clip, direction Lyon, sa ville d’adoption. Sous la caméra agile de ZenZel et avec une facilité déconcertante, OBI parvient à s’approprier l’espace d’une immense Halle Tony Garnier vide (on commençait à avoir l’habitude en ce moment) grâce à une énergie et une prestance étonnante.

Bien accompagné (Horizon Musiques, Un Plan Simple, Le Printemps de Bourges et bien d’autres), il est en pleine préparation d’un album et d’un live qui risquent de nous bousculer sévèrement (et dans le meilleur sens du terme). 

6osy – Drift

Après Tambora, leur projet conceptuel qui invitait la crème des artistes qu’ils affectionnent, après leur collaboration avec le festival Hip Hop Is Red, le jeune média 1863 continue de décupler ses activités. Ils sont à la production du dernier clip du lyonnais 6osy épaulé par le réalisateur Alexandre Atamian.

C’est en traversant divers routes que le clip commence, visiblement c’est un long périple qui attends le jeune rappeur qui se voit contraint de dormir dans sa voiture qui étonnamment bien équipée devient son lieu de vie. Il ne semble pas vouloir la quitter de si tôt reprenant la route de nuit bien accompagné par une petite montagne de billets sagement agglutinée sur le siège passager. Seul durant son périple, il s’occupe comme il peut, sortant même un jeu de cartes pour faire passer le temps, loin de ce qu’il le tourmente. 

Ce clip et le voyage cloisonné dans cette voiture qu’il raconte peuvent dire plusieurs choses. Cela peut-être le long et surement difficile parcours qui attend 6osy dans le rap qui l’amènera à se confronter à lui-même mais également à savoir quand prendre la route et quand changer de direction et donc « drifté ». 

En tout cas peut importe la signification de ce visuel, il prouve à nouveau la volonté qu’à cette scène d’exploser avec les moyens mis à leurs dispositions même s’ils savent que la route peut s’avérer longue. 

LE NOISEUR – Relax

On avait laissé LE NOISEUR avec Musique de Chambre, un EP au titre prophétique tant il annonçait notre façon de vivre la musique depuis bientôt un an. On le retrouve aujourd’hui avec Relax et on se dit définitivement, le bonhomme a le chic pour les noms qui percutent.

Avec Relax, LE NOISEUR nous offre une nouvelle petite perle pop, entre une instru lumineuse et un chant nonchalant qui traine un spleen de surface. Car sa musique, loin d’être neurasthénique, a tout du mantra, du refrain que l’on reprend encore et en chœur. Avec ce morceau, l’artiste nous rappelle que oui, le temps passe et qu’il faut s’y faire parce que c’est ça la vie, une fuite en avant face à laquelle on ne peut pas grand chose,

Une nouvelle fois derrière la caméra, Aurélien Ferré perpetue sa belle histoire avec LE NOISEUR, permettant aux vidéos de s’offrir une belle continuité visuelle . Après nous avoir invité dans son salon, s’être incrusté dans une boulangerie, un mécanicien ou un thé dansant, on le retrouve cette fois-ci là ou tout se crée : sa chambre d’adolescent. En résulte un clip touchant, où l’on suit l’artiste à la recherche des souvenirs et des sensations de son enfance, faisant doucement le deuil d’une partie du monde qui n’existe plus, comme une vraie libération émotionnelle. C’est beau, tendre et humain, tout ce qu’on aime chez LE NOISEUR.

Gama Boonta ft Dawg Sinatra – Memphis

Si Dawg Sinatra ne cache pas l’avancée de son projet avec le beatmaker Kon Queso, il se retrouve aussi au côté de Gama Boonta pour un petit crochet qui amènera le rap des deux rappeurs à Memphis dans un clip mis en image par Ndola JR et lecrapaud. 

C’est après s’être donné rendez-vous, les deux rappeurs partent barauder dans la capitale française pour y faire véhiculer leur rap. Dawg Sinatra entame le titre avec son flow reconnaissable mais également sa plume bien affutée jouant avec les références et un égo-trip d’un nouveau genre. Un univers à part qui est également renforcé par les sonorités proposées par Kon Queso qui joue habillement avec les codes de la trap pour apporter une touche en plus au morceau. 

Gama Boonta vient apporter une touche de mélodie bien amenée et qui s’entremêlent à la perfection avec son collègue Dawg. 

La ballade à travers les ruelles parisiennes semblent avoir creuser l’estomac des deux jeunes rappeurs affamés qui se feront un gouter à base de pancakes et d’Hennessy. C’est autour de cette bouteille que ressort leur alchimie déjà bien présente sur le morceau. 

Une plume, une ambiance musicale, une alchimie, la connexion a tout d’une réussite, en attendant le projet qui réunira Dawg Sinatra et Kon Queso.  

Vladimir Cauchemar – BRRR feat. Laylow, Rim’K & Asdek

Une fois de plus, Vladimir Cauchemar se fait remarquer avec une collaboration inattendue avec trois rappeurs qui n’avaient a priori rien en commun : le rappeur du groupe 113, Rim’k, le toulousain Laylow et Asdek.  Sans surprise, le clip sorti cette semaine envoie une vraie claque visuelle.

Le producteur masqué prouve encore une fois qu’il sait bien s’entourer, le prodige Quentin Deronzier prête son savoir-faire pour illustrer « Brrr ».  Le morceau déjà explosif pouvait prédire un clip délirant et c’est le cas. Sous une lumière bleue artificielle, les plans se succèdent comme des swipes frénétiques.

La post-production visuelle extrêmement soignée nous place sous l’angle d’un smartphone. Cette idée brillante rappelle à quel point cet objet renferme tous nos secrets et s’agissant de secret, j’attends que soit révélé le visage qui se cache sous le crâne blanchâtre de Vladimir Cauchemar. 

TAUR – Stay

On n’arrête plus TAUR. À l’aube de la sortie de son premier album Half Somewhere, il nous en révèle un nouvel extrait : Stay. Plus rythmé que ce qu’on pouvait connaître de lui auparavant, on conserve cet univers synthétique entraîné par sa voix reconnaissable parmi mille.

Moins groovy, on découvre TAUR dans une fuite en avant très joliment mise à l’image par Quentin Tavernier dont la variété des plans et l’utilisation des couleurs est remarquable. On apprécie cette montée qui fait accélérer le rythme cardiaque, taper du pied et ne donne qu’une envie : découvrir au plus vite le reste de l’album.

Rendez-vous donc le 7 Mai pour découvrir les 14 morceaux de Half Somewhere, nous on a déjà hâte.

Peter von Poehl – Behind the Eight Ball

Pas le temps de niaiser pour Peter Von Poehl. Après un nouvel album Songs From the Other Side sorti plus tôt cette année, il revient déjà avec un nouveau single : Behind The Eight Ball.

Au programme, un groove très folk qui fleure bon le dimanche matin de Printemps, arrangé de cordes et d’une production de haute qualité. Côté image, on assiste à l’aventure de la conquête de l’espace depuis les yeux d’un jeune spectateur. Le mélange entre images d’archives et séquences tournées spécifiquement pour le clip est magnifique et lance une réflexion sur le complotisme, l’alunissage qui aurait été truqué par les équipes américaines et toutes les conséquences d’un canular de cette ampleur.

On a notre avis sur la question mais en attendant, on passe un très agréable moment en compagnie du chanteur dont on espère avoir des nouvelles rapidement !

Entropie – Teenager Summertime

Porté par le chants des oiseaux et la douceur du vent, les garçons d’Entropie apparaissent mystérieusement. Tout d’abord au loin, puis déformés dans le reflet d’une flaque d’eau, le quatuor s’efface pour laisser place aux vrais héros de leur nouveau clip : les adolescents.

Dans une longue introduction, ils leur laissent la parole, posent les base de ce qu’est Teenager Summertime : une ode à l’âge pas si ingrat. À une époque d’hyper-connectivité et de combats la jeunesse porte en elle tous les combats et les espoirs de demain. Si on y entend la fraicheur et l’insouciance, on y voit aussi la conscience de ce qu’ils portent en eux.

Puis le morceau d’Entropie démarre en douceur d’abord, puis dans des explosions sonores solaires et épiques, les parisiens font la démonstrations de leur savoir faire, dévoilant une musique aux influences anglo-saxonnes qui emporte tout sur son passage, portée par un refrain en forme de revendication qu’on a déjà envie de reprendre en concert.

La vidéo de El-Hadji Kalidou suit cette énergie à toute épreuve, nous embarquant avec elle au plus près de cette jeunesse qui n’a plus peur de rien.

Le premier EP d’Entropie, lui aussi financé par une campagne de crowdfunding, est attendu pour plus tard cette année. On suivra leur aventures avec attention.