Les clips de la semaine #19 – partie I

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. Cette semaine ayant été particulièrement impressionnante en terme de clips, on a décidé de manière exceptionnelle de faire une double sélection cette semaine. La première partie de l’épisode 19 commence donc maintenant.

Zoufris Maracas – Sa majesté la mer

Dans leur nouvel album Bleu De Lune, le groupe sétois Zoufris Maracas s’insurge et interroge Sa majesté la mer, grande prêtresse de l’injustice et de la cruauté. La mer, puissante, décime et sépare des frontières et horizons que tout oppose. Chaque jour, le contraste se fait plus fort entre l’opulence et la survie au cœur de son écume « Ne pourriez-vous pas pour une fois, couler ces yachts de milliardaires plutôt qu’ces p’tits radeaux en bois où entassés rêvent mes frères ?  » interroge le groupe. Et comme pour rendre hommage à tous ces exilés, le groupe nous offre ses plus belles sonorités de musique du monde, bercées par les vagues des ondes d’une guitare manouche, des trompettes et autres cuivres. Comme à son habitude, Zoufris Maracas frappe fort à travers des propos provocateurs et n’a pas sa langue dans sa poche. Une verve que l’on retrouvera sur le nouvel album du groupe, prévu pour le 13 mars prochain, et en tournée dès le mois prochain à travers toute la France. 

King Krule – (Don’t Let The Dragon) Draag On

Nous n’avions plus entendu parler du petit génie britannique Archy Marshall  aka King Krule depuis son dernier album (The Ooz, 2017) jusqu’à novembre dernier où une vidéo intitulée Hey World! émergea présentant 4 morceaux en vue d’un possible nouvel album. Cette sortie s’est officialisée ce mardi et Man Alive! est prévu pour le 21 février.
L’annonce est accompagnée par la parution de (Don’t Let the Dragon) draag on le premier single de l’album et la première vidéo écrite et réalisée par Archy Marshall himself. Le film tourné en une seule prise en noir et blanc commence par le gros plan de l’œil du musicien dans lequel on discerne des flammes. La caméra s’éloigne lentement au fil du morceau et laisse peu à peu découvrir sa situation… on n’en dira pas plus pour ne pas spoiler. (Indice: #inspirationJeanned’Arc)
King Krule sera de retour sur scène avec un passage à Paris le 4 mars à L’Olympia et les 24 et 25 mars à Londres à la Brixton Academy. 

Big Mountain County – Somewhere Else

Non mesdames et messieurs, le rock n’est pas mort. Si on a voulu vous faire croire cette supercherie, sachez qu’on vous a menti, on vous a trahi, on vous a dupé. Il est temps de rétablir une vérité pure, simple et qui ne souffre d’aucune contestation : le rock est bel et bien vivant et brille d’une diversité et d’une vitalité assez folle. La preuve cette semaine dans notre sélection ou l’on commence le retour des italiens de Big Mountain County. Si ils viennent de la botte européenne, la musique du quatuor sent la poussière d’Austin, le psychédélisme et le souffre qui les rapproche de leur camarades de The Black Angels. Les voilà donc de retour avec Somewhere Else, quatre ans après Breaking Sound, les romains reviennent donc en grande forme avec un titre psychédélique au possible, dans une ambiance hypnotique et pesante qui pourrait nous pousser jusqu’à la transe. Le titre s’accompagne d’une vidéo de Andrew Knives qui a l’image du titre s’attache avec force aux ambiances et à l’interprétation, pour nous emmener doucement mais surement vers un état second, nous transformant, nous tenant la main comme un guide bienveillant vers une contrée inconnue.

Murman Tsuladze – La flemme de danser \ მოდი წავიცეკვოთ

A la face B, on aime les mélanges de genre, la musique sans frontière et les omnis (objets musicaux non identifés). On peut dire sans conteste que Murman Tsuladze a coché avec bonheur les trois cases pour un bingo musical réjouissant et dansant. Il le dit lui même en géorgien : « C’est en dansant qu’on oublie les problèmes. Allez Viens ! On danse toi et moi !« .
Si le titre s’appelle La flemme de danser, il est pourtant difficile de résister à son rythme effrené et à son saz irrésistible. Pourtant, derrière cette nonchalance et cette apparente joie de vivre se cache en réalité une histoire d’amour qui se joue à contretemps, de désirs pas accordés et de moment ratés. Un peu triste, mais c’est souvent sur les thèmes les plus tristes qu’on danse le mieux.
Mais en plus du titre, il faudra regarder avec bonheur cette vidéo délirante ou l’on voit le trio se balader au cœur des manifestations contre la rforme des retraites, en parfait décalage avec le monde qui vibre autour de lui. Un petit plaisir régressif qui nous amuse et qui annonce un premier ep prévu pour le printemps.

Son Little – Neve Give Up

La naissance d’aloha, le nouvel album de Son Little tient en un concept : sortir de sa zone de confort. Suite à la perte de ses maquettes et démos, l’artiste a en effet dû créer et composer un tout nouvel album, repartant de zéro et cette fois-ci loin de chez lui dans un studio parisien avec un nouveau producteur : Renaud Letang. En une petite semaine, il a ainsi composé des pépites telles que Neve Give Up. Pour ce titre, il nous raconte l’histoire de son grand-père et par effet de miroir, un peu la sienne également. Celle d’un homme parti de rien qui traverse déserts et petites villes pour se construire une vie et arriver dans la grande ville. En guise de clin d’œil et d’hommage, Son Little a d’ailleurs fait résonner la voix de son grand-père au début du clip. Et c’est dans une version animée et tout en simplicité que le chanteur a choisi d’illustrer cette histoire. 

2PanHeads – Square

Il ne faut parfois pas grand chose pour installer une ambiance. Une caméra fixe, un lieu aussi étrange que familier et 2PanHeads nous emmène ailleurs. Le diable est toujours dans les détails et c’est sur ça qu’il faut s’appuyer ici pour laisser notre imagination divaguer. Un lieu qui rappelle un cabaret, un jeu d’échec, de la bière, du vin et des personnages aussi dissonants que complémentaires, entre un guitariste tranquille, un luchador qui rappellera des bons souvenirs aux fans d’OSS 117 et Supernacho et un chanteur proche du vampire, le tout nous emmène à Moscow & Jerusalem, ville imaginaire qui sera le théâtre des aventures de 2PanHeads pour leur nouvel EP. Et on peut dire que l’histoire commence de fort belle manière avec Square titre aux couleurs electro-rock qui n’est pas sans nous rappeler les bonnes heures de Soulwax ou Prodigy et qui annonce donc la couleur pour cet EP dont la sortie approche (on nous glisse d’ailleurs dans l’oreillette que des surprises sont à venirs sur la face B).

Born Ruffians – I Fall In Love Every Night

Cette semaine, c’est la semaine des retours très attendus ! Parmi eux, les incontournables Born Ruffians. Après plus de 15 ans de présence sur la scène indie-rock outre-Atlantique, les Canadiens n’ont jamais cessé de faire de la musique. Et ce n’est sûrement pas ce tout nouveau morceau , I Fall In Love Every Night, qui sera le témoignage d’un quelconque essoufflement. On retrouve donc les membres de Born Ruffians sur le plateau de ce qui ressemble à une parodie du David Letterman Show. Le clip très kitsch contraste pourtant avec une chanson des plus sérieuses, puisque Luke Lalonde (le chanteur) y raconte les longues nuits à penser à la chance qu’il a d’aimer, mais aussi d’être aimé.
Juice le nouvel album du trop est prévu pour le 3 avril avec un passage à Paris le 30 mai au Point Éphémère.

Mélodie Lauret – elles avaient 15 ans

Les premiers amours laissent toujours une trace indélébile. Si on est pas sérieux quand on à 15 ans, il y a pourtant des choses, des éléments fondateurs d’une existence en devenir. Quand le cynisme n’a pas encore pris de place dans la vie, les sentiments explosent, débordent, grouillent d’une vie qu’on pense immortelle … jusqu’à ce qu’elle s’arrête. C’est ce que nous raconte Mélodie Lauret dans elles avaient 15 ans, ces premiers instants, ces premiers moments ou tout devient absolu, ou le je devient nous pour un instant fugace, intense mais qui finit toujours par se terminer en pertes et fracas. 1 an d’amour fou, d’osmose, d’unité sous les mots et la voix posée de Mélodie Lauret qui ici tend vers le slam, vers l’épure, pour que les mots deviennent une arme autant qu’une force motrice. La vidéo de Guillaume Genetet rajoute une pièce au puzzle des autres vidéos déjà présentées, présentant la jeune femme au plus près, au cœur de ses souvenirs, dans le silence et la simplicité d’un voyage solitaire pour retrouver le monde et la vie.

Gabriel Auguste – Coups bas

Il y a des chansons qu’on écoute et qu’on oublie dans l’instant. Et puis il existe des chansons qui installent une tension, une ambiance qui oscille entre le malaise et l’opprésion et qui finissent par nous obséder autant qu’elles nous effraient. Après avoir ouvert la porte au soleil avec Tu Danses, Gabriel Auguste nous dévoile une facette plus inquiètante de sa personnalité avec Coup Bas. On se retrouve ici dans des ambiances de polar noir pour un titre très cinématographique, porté par des saxophones qui groovent et qui jouent le contrepoids de cette ambiance très sombre. Dans le texte, le garçon nous raconte de manière abstraite et poétique une vengeance qui ne se mange pas froide mais se déguste plutôt de manière brulante. La vidéo de Camille Roy, Antoine Hilaire et Bruno Grosso nous emmènent sur un terrain familier, Instagram, et nous présente une histoire d’harcèlement, de compte miroir (honnêtement, la vidéo nous fait furieusement penser à Enemy de Denis Villeneuve) qui bascule progressivement vers l’horreur. On a pas envie de vous en dire trop, on ne peut que vous conseiller de la découvrir par vous même.
Vous pourrez retrouver Gabriel Auguste en février au Grand Mix dans le cadre du Pop Factory.

Swing – Gris

Cela fait quelques temps qu’on avait plus entendu Swing, que cela soit en solo ou dans son groupe L’Or du Commun. Mais ce n’est pas pour autant que le belge ne travaillait pas. Il est revenu cette semaine avec le clip de Gris, premier extrait d’un futur projet. Un morceau 100% belge, car on peut retrouver De La Fuentes aka Krisy à la production. Le clip débute dans une épicerie, où un garçon et armé, pointe son arme. Le début d’un braquage qui n’aura jamais lieu, car ce jeune garçon s’en va s’en avoir rien dérobé. Dans cette épicerie, se trouve aussi Swing. Ce petit commerce de proximité est mis en opposition avec un bâtiment à la décoration plus élégante. Ce qui concorde avec la première phrase du morceau « Train de vie parallèle » où Swing laisse songer que la vie d’artiste qu’il mène ne l’aide pas à se situer entre la vie qu’il a pu mené auparavant, une vie simple et dur imagé par l’épicerie à sa vie d’artiste symbolisée par un bâtiment imposant. Mais, ce dernier n’est beau que par endroit, car quand le plan s’élargit on peut s’apercevoir que les murs sont délabrés. Comme si au final la vie d’artiste n’était qu’agréable qu’en façade. Ce sentiment est confirmé par les questionnements de l’artiste. Des questionnements qui seront surement éclaircis dans son futur projet.

SCRTCH – Monica

Le duo le plus barré de la région de Maubeuge est de retour. SCRTCH nous présente son deuxième clip issu de son premier EP INTRO: Monica. On parle ici de Monica Bellucci mais contrairement à la belle Italienne, il n’est nullement question de sensualité. Au contraire, il est question d’obsession, par l’intermédiaire d’un personnage interprété par Yohann Martinez (Obsolete Radio) obsédé par le duo basse batterie et qui va les traquer jusqu’à les trouver et… à vous de découvrir le reste. La folie est présente, incarnée par la réalisation et le jeu d’acteur on ne peut plus convaincant. Ça crache, ça bave dans les mirettes et ça fait secouer frénétiquement la tête. On leur souhaite en tout cas le meilleur pour leur audition à venir cette semaine dans le cadre des inouïs du Printemps de Bourges à L’Aéronef !

LA Priest – What Moves

On a beau être qu’en janvier, on a déjà trouvé le morceau qui dominera la bande originale de notre été 2020. Décidément, tous nos chouchous font leur grand retour cette année car c’est après de longues années d’absence que LA Priest revient parmi nous autres. Et bien que Soft Hair eu le temps de trouver la lumière du jour entre temps, il s’avère que ce n’était véritablement pas assez pour nous sustenter. Mais voilà que, MIRACLE, un album est prévu pour le 24 avril prochain chez Domino Records. What Moves se dévoile ainsi au grand public accompagné d’un clip en stop-motion afin d’animer ce morceau plus groovy que jamais et qu’on n’a pas pu s’empêcher de glisser dans notre playlist spéciale « soirées entre copains ». Et alors que le britannique chante I can feel the pressure on your heart / I can feel the pressure on your soul, nous on ne peut que conclure en disant I can feel le retour imminent et notre sourire est béat. A très vite Sam Dust !

Eminem – Darkness

Nous sommes dans une époque ou tout se sait. Du moins, c’est ce qu’on essaie de penser. Pourtant il arrive parfois que le monde soit pris par surprise. Cette semaine, Eminem est revenu dans le game avec MUSIC TO BE MURDERED BY. Et on peut dire que le bonhomme frappe fort avec son premier extrait et le clip qui l’accompagne. Inspiré de la tuerie de Las Vegas pendant un concert de country, le titre est un choc autant musical que visuel. Alors qu’on a la sensation au début du titre et de la vidéo qu’Eminem se la joue introspectif face à ses propres démons, au réalise au fil du morceau qu’il est en réalité dans la peau du tueur. Storytelling assez fou, flow posé et vibe mélancolique, le titre provoque l’effroi au fur et à mesure qu’on découvre ce qu’il dénonce et ce qu’il représente : une plongée dans la folie d’un homme et une charge monumentale contre le lobby des armes aux Etats Unis. Comme souvent avec l’artiste de Détroit, l’art et la politique se mélange et offre un retour en force pour un artiste qui prouve une nouvelle fois qu’il n’a pas volé sa place au sommet et qu’il sait l’utiliser pour pointer du doigt des sujets importants, quitte à créer la controverse .

Les Deuxluxes – Everything of Beauty

On continue avec les guitares avec le retour de Les Deuxluxes. Le duo de Montréal est revenu cette semaine avec Everything of Beauty, ballade rock toute guitare dehors qui annonce un nouvel album, Lighter Fluid pour le 28 février. On se laisse porter par la vibe 70’s de ce titre qui tire parfois vers un psychédélisme rock proche de lynyrd skynyrd. La vidéo de JF Galipeau s’amuse de ces références, utilisant des lentilles et des prismes kaléidoscopiques pour renforcer ce côté psychédélique et rêveur. Il profite aussi des superbes décors naturels canadiens et de ce petit miracle qui les fait passer de l’automne à l’hiver en un clin d’oeil. En une respiration, la neige d’un blanc éclatant remplace ainsi la verdure et le ciel passe d’un soleil éclatant aux nuages chargés de froid. Le tout ponctué par un sens du décallage qui semble être la marque de fabrique de Les Deuxluxes .

Cathedrale – Gold Rush

 » Les choses qu’on possède finissent par nous posséder « . Chuck Palahniuk.
On commence rarement par une citation pour parler d’un clip, mais finalement on devrait le faire plus souvent. Surtout quand il s’agit de citer le grand Palahniuk et son génial Fight Club. Et honnêtement, la citation colle parfaitement au Gold Rush de Cathedrale.
Le pied sur l’accélérateur, le quatuor nous balance un petit pamphlet contre la course au pognon, et le fait qu’on est fatalement dépendant de son taff parce qu’il nous amène ce dont on a besoin pour vivre. Ou du moins c’est ce que l’on croit. Visuellement, le groupe s’associe à Alison Flora et prolonge la métaphore avec une vidéo animée ou l’on suit un personnage qui cherche à faire pousser une plante sans succès. Cherchant encore et encore une solution pour arriver à ses fins, il finit par signer un pacte avec le diable et finit par se faire bouffer par une plante devenue incontrolable. La boucle est bouclée, les choses que l’on possède finissent par nous posséder.
Avec Gold Rush, les toulousains annoncent la venue d’un troisième effort, House Are Built The Same, enregistré en Angleterre et prévu pour mars chez les excellents Howlin’Banana Records.

Jean Tonique – menari

On termine notre première partie de sélection avec du groove et de la danse. Quelques semaines après avoir dévoilé son mini album, Jean Tonique est déjà de retour avec un nouvel EP, scambled eggs. L’idée derrière ces trois titres est assez géniale puisque Jean Tonique a utilisé des samples de ses morceaux pour les réorienter vers le dancefloor, un peu à la manière du Nite Versions de Soulwax. En résulte donc menari, titre solaire et jouissif à l’efficacité totale. Et quitte à avoir une bonne idée, autant pousser le vice jusqu’au bout : Jean Tonique a donc décidé de « sampler » aussi son clip, utilisant des extraits des vidéos de sunny side up et like you pour leur offrir une nouvelle vie et un clip tout neuf sur lequel il appose une bonne couche de psychédélisme façon kaléidoscope délirant.