Les clips de la semaine #176 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, voici la seconde partie de la 176ème sélection des clips de la semaine.

Varsovie – Perspective Nevski

Les journées estivales commencent tout juste à s’installer qu’on attend déjà presque impatiemment l’automne pour découvrir le cinquième opus des grenoblois Varsovie.  

Premier single de l’album Pression à froid (Icy Cold Records), Perspective Nevski en clin d’œil à la nouvelle du romancier Nicolas Gogol annonce la couleur : noir. C’est sombre et froid, inscrit dans l’identité post-punk du groupe.

Le clip s’ouvre sur une citation de la nouvelle « Elle ment à chaque instant, cette perspective Nevski, mais plus particulièrement quand la nuit dense s’étend sur elle (…) tandis que le Démon lui-même n’allume les lampes que pour éclairer le monde de sa lumière trompeuse. » Gros plan sur une basse vibrante, sur le visage d’un Arnault Destal qui frappe nerveusement les caisses de sa batterie puis sur Grégory Catherina, guitare en mains et casquette vissée sur la tête. Pris en huis clos, les plans alternent sur ces trois éléments sans jamais les montrer ensemble. Ce n’est pas sans rappeler le clip de L’ombre et la nuit à la différence qu’on met de côté le noir et blanc pour les couleurs chargées en grains.

Perspective Nevski semble s’attarder sur une vision fantasmée d’un personnage incarnant un certain pouvoir – peut-être en écho probable aux relations de la nouvelle –. C’est nerveux comme on aime avec une ligne de basse savoureuse. L’opus sortira en étant complètement en adéquation avec la saison qui l’accueille.

The Sherlocks – People Like Me & You

Souvent romancée, la vie d’artiste n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Tout un chacun peut vivre SA vie d’artiste comme il l’entend et c’est un le propos qui nourrit le visuel de People Like Me & You, dernier clip du groupe The Sherlocks compilant des vidéos prises lors de leur tournée. Un caractère brut qui apporte de l’authenticité à cette vie de tournée qui (moment de galères occultées) s’apparente à de bonnes vacances entre potes. On prend plaisir à plonger à leurs côtés dans ce qui pourrait être une géante story amis proches Instagram et on se surprendrait même à s’attacher aux membres du groupe. 

Au final on se dit que nous aussi on a pas mal de petits moments de fêtes sympa à raconter (et ce, sans devoir monter sur scène affronter un public le lendemain). 

St Graal – Le cœur qui cogne  

Le dompteur de dauphins nous balance comme ça un clip pour la chanson qui a donné le nom de l’album : Le cœur qui cogne. On met de côté les drag queens le temps d’un clip plus personnel, plus chargé en nostalgie et on embarque pour mieux laisser le cœur fondre comme un chamallow.

Le garçon nous entraine dans une virée en voiture – retro au possible, la bestiole est équipée d’un lecteur cassettes ! – d’où il multiplie les cadrages en fisheye. Images urbaines, dans la forêt ou sur une route de campagne, le garçon trace son chemin avec son pilote casqué façon Daft Punk. Pour certains, c’est retourner dans une certaine zone de l’enfance.

Sophie Maurin L’Astronaute

Avec L’Astronaute, Sophie Maurin met en images une nouvelle chanson de son dernier album – Longitudes paru en février dernier – en nous embarquant dans un nouveau périple imprégné d’une douce poésie. A la fois plus proche et plus disant qu’un Paris-Melbourne, ce voyage nous conduit vers la Station Spatiale Internationale à 400 km d’altitude. En orbite, l’espace confiné et restreint démultiplie pourtant les perspectives que l’on ne saurait avoir sur notre terre. Sophie Maurin apparaît dans L’Astronaute sereine et affranchie de cette pesanteur qui nous contraint au quotidien : « Peut-être n’étais-je pas faite pour cette planète ? ».

Pour illustrer cette chanson, Sophie Maurin a de nouveau fait appel à Carol Teillard d’Eyry (Catastrophe, Biche…) qui, avec son talent de magicien passionné qu’on lui connaît, escamote pendant trois minutes le tangible. Il est question de bulles que l’on se forme pour s’échapper, en s’ouvrant sur  le chemin de la connaissance, vers de nouvelles aspirations.

Pour ceux qui souhaiteraient se rapprocher des étoiles et qui n’ont pas leurs deux pieds sur terre, Sophie Maurin sera en concert en compagnie de Laura Cahen le 12 juillet à Ramatuelle dans le cadre du Festival Reconnexion. Tentant, non ?

Dombrance – Pompidou feat. Sarah Rebecca

C’est toujours avec un plaisir indicible que l’on découvre les vidéos de Dombrance. Dans Pompidou, nouvel extrait issu de sa République électronique, Dombrance fait des infidélités à l’Institut National de l’Audiovisuel et ses nombreuses archives pour recréer, avec l’aide d’Olivier Tresson une capsule temporelle rien qu’à eux (et aussi pour nous). 1973 est l’année dans laquelle la vidéo nous propulse le temps d’un épisode de 5min sur la 2. Une émission – plus dilettante que 5 colonnes à la une – qui pirate toutes les nuits, à 2 heures 14, les ondes de la deuxième chaîne de l’ORTF (à cette époque les chaînes interrompaient leurs programmes la nuit). Un jeu d’artifice animé par cinq enfants qui profitent du sommeil de leurs parents pour œuvrer en toute discrétion et innocence.  Ils nous montrent ces années comme certains d’entre nous les ont vécues, comme des enfants avec les rêves qu’elles offraient.

Les années Pompidou avaient été celles d’une apparente insouciance où la société se reconstruisait – après-guerre et avant le premier choc pétrolier – en suivant une certaine idée de la modernité amenant ses bienfaits, mais aussi ses biais et ses illusions.

Emporté dans un jerk électronique et psychédélique en clin d’œil à Pierre Henry, Pompidou ravive nos mémoires (pour ceux qui ont connu ces années) ou en modèle de nouvelles (pour les autres). Dombrance se déhanche derrière ses machines pendant que Sarah Rebecca – parfaite – illumine le morceau par sa présence et son accent, so british et tellement sincère.

Pour une France qui danse, laissez-vous entraîner, le temps du morceau, dans cette réjouissante parenthèse temporelle. 

ROSE TIGER Automatic

Ce dont on est certain lorsque l’on écoute un morceau Rose Tiger, c’est que l’on sera forcément surpris par l’horizon musical qu’ils choisiront d’embrasser en notre compagnie. On perçoit dans Automatic toute la nébuleuse sonore qui s’est créée à la charnière des années 70 et des années 80. On pourrait citer Tubeway Army et son Are ‘Friends’ Electric ? ou encore My Sharona de The Knacks. Mais avec son inventivité (certaine) et sa candeur (relative), Rose Tiger nous mène encore plus loin, sur des chemins de traverse encore insoupçonnés.

Avec une vidéo façon VHS, aux teintes incertaines et aux images sautillantes, Lewis Lazar (Oracle Sisters) nous ramène dans un passé analogique dépeint avec 240 point par ligne, une bonne résolution pour laisser sa place à l’imaginaire. Et on finit par se demander si Rose Tiger existe réellement ou s’ils sont – tout simplement – issus de nos fantasmes et illusions.

Rose Tiger sera en concert en juin à Londres (8 juin), Amiens (9 juin), Plouha (10 juin), Dijon (12 juin) et Paris (13 juin au Truskel). Ils auront l’occasion, sur scène, de révéler (ou d’entretenir) leurs mystères !     

November Ultra – corazón caramelo

Douceur et caramel, c’est ce que nous propose l’artiste November ultra. Si la chanteuse fait de la douceur une force et un combat, c’est qu’elle parvient à saisir que la puissance réside dans la beauté. Corazón caramelo évoque l’amour dans toute sa subtilité, celui que l’on attend, celui qui vient : “ Un amour comme je le veux, De ceux qui ne font plus souffrir, Un amour véritable, Qui soit un rêve très réel, Un amour comme le premier, Mais qui dure jusqu’à la fin, Un amour si doux et tendre, Qui me donne envie de chanter. ” Une prière que la voix vibrante et aérienne de November Ultra fait monter jusqu’aux cieux. 

Daejmy x Slimka – Le 5 étoiles

La Suisse, cette nouvelle terre de rap où l’énergie se bagarre avec la technique prouve continuellement qu’elle a de belles choses à offrir. Le récent projet de Mairo ou encore cette collaboration 100% helvétique entre Daejmy et Slimka le prouve bien ! Cette dernière profite même d’un visuel réalisé par YPNOTIST et Daejmy lui-même. Celui-ci commencera également le morceau par un couplet percutant de par ses variations de flows. Une maîtrise bienvenue qui le caractérise et l’aidera à se faire remarquer. C’est aussi de ça qu’il est question dans le clip, se mettant dans la peau de chef de cuisine, ce n’est pas des bons petits plats qui émanent de leurs recettes mais plutôt un plan pour que le plus large public goûte à cette énergie saupoudrée de maîtrise. Bref, Daejmy et Slimka, c’est Le 5 étoiles !  

Rest Up – Drive

Rest Up est un trio d’Angers dans la droite lignée de beaucoup de groupes qui sortent en ce moment. Loin de l’idée du repos évoquée par leur nom, le groupe nous propose un son dont les guitares rappellent Équipe de Foot, pour ne citer qu’eux, et les voix rauques de pas mal de groupe anglais, typiquement shame, mais en un peu plus vener. On se retrouve donc avec une formation ayant un pied de chaque côté de la Manche, et un but ultime, faire du bruit, et un maximum
Le paris est réussi, preuve en est avec ce dernier single, Drive. Ce n’est pas le premier, quelques-un ont déjà éclos depuis une année maintenant. Mais voilà encore un groupe avec une énergie débordante et une envie constante d’envoyer la fosse en découdre.
Drive, au clip qu’on peut qualifier sans euphémisme de très DIY, voit une loufoque poursuite  dans la campagne bien de chez nous se terminer de la plus étrange des manières. On imagine que ce single annonce la sortie prochaine d’un album, pour lequel on ne manquera pas de jeter une oreille.

Shaka Ponk – Dad’Algorythm

C’est la dernière, la dernière d’un groupe qu’on ne présente plus. Shaka Ponk, groupe français qui a animé la scène hexagonale depuis plus de dix ans, a annoncé la sortie de leur dernier et ultime album. Le groupe décide d’arrêter pour se concentrer sur d’autres projets, portés notamment par la catastrophe climatique qui s’annonce.

Le groupe, qu’on qualifiera sans trop se mouiller de -très- politisé, a décidé de sortir ce dernier effort comme un électrochoc, pour tenter, à leur échelle, de faire bouger les lignes. Un premier single en français, Toute le monde danse, qui parle de la servitude populaire. Et voilà le second Dad’Algorythm, qui, sans surprise, nous parle de nos addictions aux algorithmes.

Ce son est parfaitement illustré par son clip. Dans cette vidéo, une danseuse, sous les couleurs du fameux singe du groupe, version The Walking Dead, danse son émancipation. Petit à petit son art, comme apparance et son environnement, évoluent. D’un départ post apocalyptique, on finit sur un rayon de soleil plein d’espoir
Un au revoir intense d’un groupe mastodonte

Angelo de Augustine – The Ballad Of Betty And Barney Hill

Le mois dernier, Angelo De Augustine annonçait un nouvel album, Toil And Trouble, et partageait son premier single, Another Universe. Aujourd’hui, le songwriter californien est de retour avec un deuxième single, The Ballad Of Betty And Barney Hill,  inspiré par l’histoire célèbre d’un couple du New Hampshire qui en 1961 avaient affirmé avoir été enlevés par des extraterrestres.

« Pendant la réalisation de l’album, j’ai vécu une expérience tellement horrible, torturante et inexplicable que les mots me manquent et que l’explication semble impossible« , a déclaré De Augustine, en parlant d’une rare maladie dont il souffrait et que les médecins ne pouvaient expliquer. « Au cours de cette période, j’ai ressenti un lien étroit avec Betty et Barney Hill et leur histoire. […] Lorsque nous vivons quelque chose qui n’a pas de sens logique, l’esprit cherche à évoquer n’importe quelle explication, aussi farfelue qu’elle puisse paraître. »

La chanson est accompagnée d’une vidéo animée par Clara Murray, qui a su capturer ce sentiment de vacillement à travers des événements répétitifs et abstraits, comme si la voiture se déplaçait dans le temps et l’espace jusqu’à ce que ceux-ci se dégradent autour des personnages, coincés dans une boucle, finissant par se retrouver au même endroit qu’ils avaient commencé. Le décor est sinistre, changeant, onirique et montre bien que l’invasion est corporelle, « une hantise à l’intérieur de la chair », comme l’avait décrite le couple Hill.

Marc Desse – Tout contre moi

Marc Desse s’entoure au mieux pour la réalisation de ce clip signé Ella Hermë, dans un registre intimiste un rien mélancolique.

Sur un tempo lourd semblable à des battements de cœur, un homme évolue dans son appartement baigné d’une luminosité de fin d’après-midi, vivant la présence de l’aimée en creux, par les fragments virtuels laissés par elle. Évocation pudique de cet âge entre chien et loup où l’amour a la saveur douce-amère de déjà vu, l’atmosphère tendue d’envies d’y croire se voit finalement tirée en pleine lumière lorsque les amants réunis dansent et s’enlacent. Conjurés par la présence et l’osmose, les questionnements…

La mélopée folk nous laisse touchés au cœur, avec des envies d’aimer – une réussite pour ce tube romantique qui trouve dans la justesse de l’image aux teintes vintage le reflet d’un propos intemporel.