Les clips de la semaine #155 – partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, la seconde partie de la 155ème sélection des clips de la semaine.

COUTURIER – Amoureux de toi

Une flèche en plein cœur. Voilà l’image qui ouvre le clip de COUTURIER et qui représente à elle seule l’effet que nous fait son nouveau titre : Amoureux de toi.

Un morceau lancinant, attirant, où les nappes synthétiques et hypnotiques se mêlent à la voix superbe de l’artiste. Une vague mélancolique s’empare au fur et à mesure de nous, à l’image de ce que le morceau raconte. Les turpitudes amoureuses, les émotions trop fortes dans le positif comme dans le négatif et le temps qui passe et qui, à notre plus grande surprise, détruit tout au fur et à mesure.

Esthète sonore, COUTURIER nous embarque dans cette échappée folle et amoureuse dans laquelle il entraîne avec lui Charlie Motto, Zaho de Sagazan et Clou, qui l’ont aidé à écrire les paroles poétiques et directes d’Amoureux de toi.

Visuellement, Antoine Wibaux nous entraîne dans un univers saturé, jouant de la thématique de Cupidon qui rate sa cible. La vidéo se joue en deux temps, le jour et la nuit, les éléments oniriques et la réalité plus fébrile. L’univers développé ici nous touche et nous bouleverse, tout comme le morceau.

COUTURIER finit 2022 en beauté, on image déjà que 2023 s’annonce éclatant.

T.F.T – We’ve Been Here For Nothing

Simon et Antoine, deux des membres de Stuffed Foxes, ont aussi un autre projet, qu’ils mènent avec Benjamin. Ils s’appellent T.F.T et s’apprêtent à sortir le 24 février leur premier album, Withering Times, chez Reverse Tapes (le label de nos renards préférés).

Aujourd’hui, on vous dévoile le premier extrait clippé, We’ve Been Here For Nothing. On y retrouve en figurants d’autres compères des Stuffed Foxes ainsi que leurs potes, qui officient également dans divers groupes (Sodom et Sagesse).

Avec cette vidéo, réalisée par Flavie Herbreteau et Léo Dumoulin, on pénètre au sein d’un club de country. Partie d’échecs qui vire au drame, petit déjeuner sur l’herbe entre amoureux transis, commérages ou encore séance de yoga en plein air, on va dans le cliché et on le fait bien.

Multitude de groupes épars, qui se réunissent finalement pour assister à un match de tennis entre deux femmes survoltées. Antoine appose sa voix sur ce morceau un brin pop où il est question d’amour. C’est beau, c’est doux, c’est chaud. Et c’est tout ce dont on a besoin actuellement.

KALIKA ft. Yelle – Les glaçons

Quelques jours après avoir dévoilé leur association géniale (et fort logique) Kalika et Yelle débarquent cette semaine avec un clip pour Les Glaçons.

Une passation de pouvoir assumée, tant Yelle semble avoir eu une influence évidente sur Kalika et qui s’en ressent dans les paroles, qui vont même jusqu’à effectuer un lien de filiation entre les deux.

Les glaçons, c’est tout ce qu’on aime chez Kalika : une petite bombe électro-pop dansante qui cache sous ses apparats efficaces un sous-texte sociétal et politique assez évident.

Ici, c’est le regard de l’homme sur la femme et le harcèlement de rue que nos deux héroines passent à la sulfateuse, et cette idée se ressent aussi dans le clip de Mohamed Chabane. Certains signes de la masculinté toxiques sont présents ici : le flipper, les tentacules et les langues qui pendent jusqu’à l’excès. On flirte parfois avec l »mauvais » goût mais ces influences permettent surtout à Kalika et Yelle de renforcer leur propos et de l’exprimer visuellement à grand coups d’humour et de délire pop.

Un nouveau sans faute pour les deux reines, en attendant de retrouver Kalika à la Cigale en juin.

Bank Myna – The Open Door

Le quatuor Bank Myna est de retour avec une live session signée Stellar Frequencies, enregistrée dans une grange en Haute-Loire. L’occasion de découvrir ou redécouvrir The Open Door, extrait de leur dernier album VOLAVERUNT, sorti en février 2022. Avec une introduction réarrangée, le groupe instaure une ambiance oscillant entre puissance mélancolique et ravageuse luminosité.

Grâce au merveilleux travail de Joan Sabatier, toute l’ambivalence de la musique de Bank Myna ressurgit. Filmés au plus près, révélant des détails insoupçonnés, caressant la poésie d’une note, c’est une caméra à l’épaule qui nous guide vers le violon ou l’horloge, vers les cymbales ou la force de la basse. Vers un post-rock cathartique, intense et sombre, vibrant et séduisant. Une vidéo à ne pas rater.

Spider ZED – 25 ans

Spider ZED continue son introspection. Alors que Club de Coeur risque de marquer le début de l’année 2023, Spider ZED continue de le dévoiler cette semaine avec 25 ans.

Une rythmique lente et mélancolique habitée par une guitare et un morceau qui joue comme un lent crescendo vers la sincérité et l’intime. 25 ans, c’est une porte ouverte sur le cœur de l’artiste, il s’y dévoile totalement, sans pudeur et sans peur. Une manière de faire qui nous touche forcément, tant tout ce qu’il raconte a un écho assez étrange sur ce que nous vivons aussi.

Cette sensation de solitude et de quête intérieure se vit aussi dans la vidéo de C14BONE. On y retrouver Spider ZED seul, dans une sorte de retraite volontaire, seul face à la nature, comme si il cherchait autant à se retrouver lui-même que d’éviter au maximum le monte qui l’entoure et qui le détruit à petit feu. Une solitude comme un basculement, cherchant ainsi à avancer dans la bonne direction, comme pour se recentrer à nouveau sur ses idées et ses ambitions.

Little Simz – NO THANK YOU

À l’instar de Kendrick Lamar, le Rap se cinématographise également de l’autre côté de la Manche. Déjà accoutumée de la pratique, Little Simz a rendu public ce vendredi soir le court-métrage accompagnant la sortie de son nouvel album, tous deux intitulés NO THANK YOU. Investigateur de thématiques touchant à l’anxiété, mais aussi au rejet du star system et de l’industrie, les dix minutes de vidéo se retrouvent coupées en plusieurs parties.

Toutes ces considérations sont illustrées avec un œil de cinéaste aiguisé. La mise en scène est très soignée, comme d’habitude avec les travaux visuels de la rappeuse. Ces dernières sont dépeintes par le biais de l’utilisation de différents grains d’image, marquant les ruptures entre les branches de la vidéo. Les thématiques prédominantes étant la condition de la population noire ou encore l’anxiété généralisée, la londonienne se livre encore plus. Une ouverture que vous retrouverez très prochainement sur La Face B.

Paprika Kinski – Love In The City

Il règne un doux parfum de laisser aller dans cet été passé dans le camping du Portet. Paprika Kinski, songeuse dans son peignoir blanc à cœurs roses, caresse de son regard distrait les objets disséminés dans son mobile-home et s’éveille à leurs formes suggestives. Au loin, la mer de la côte d’Opale prend alors les reflets azur du désir et de la tentation.

Ceux du Boulonnais way of life, où kitsch et glamour se confondent dans un tourbillon jovial et coloré. Les images aux tons argentiques filmées par Florimond Debove nous mènent au sein d’un marivaudage qui voit se croiser les trois protagonistes de l’histoire. Dans Love in the city, la pop solaire et sensible de Paprika Kinski irradie. Elle est simple et réconfortante comme le hug final à six bras et trois épaules.

Lomepal – Decrescendo

Le rappeur parisien Lomepal continue de mettre en images le matériel issu de son dernier album : Mauvais Ordre. C’est cette fois-ci au tour de Decrescendo de se voir gratifié d’une vidéo promotionnelle. Qualifié par Antoine Valentinelli lui-même de clip le plus ambitieux de sa carrière, cette déclaration tient finalement toutes ses promesses. Réalisé par Dario Fau, le clip dépeint l’artiste à l’arrière d’un véhicule enregistrant le dit-morceau.

Mis en image avec une steady cam, le morceau est illustré sous la forme d’un trajet sur les routes parisiennes aboutissant sur un accident. Quoi de mieux pour mettre en image une rupture amoureuse qu’un véhicule s’engouffrant dans la langoureuse Seine ? Effectivement très ambitieux dans son acuité visuelle, le clip est convaincant en ce qui concerne les effets spéciaux mis en œuvre. En guise de preuve de son dévouement, Lomepal continue de nous gratifier de son art alors qu’il coule progressivement dans les eaux profondes de la capitale.

Leo Leonard – Nirvana

Leo Bear Creek, la moitié des Pirouettes, se lance dans un nouveau projet qu’il mène désormais en solo. Dans Leo Leonard, figurent les particularités qui lui sont chères. Un sens de la mélodie servant une bluette où se s’entremêlent les sentiments par moments fragiles et parfois maladroits. Nirvana aborde un thème universel, celui d’un amour que l’on aimerait voir partagé et qui ne l’est pas.

Des aspirations qui font que l’on se sent un peu idiot, en décalage entre souhait et réalité. Arthur Bouet met en images ces sensations que l’on éprouve alors. Le temps s’accélère suivant le rythme de nos battements de cœur. Mais comme enfermée dans une bulle, l’histoire se vit entre deux temps. « Comment tu vas, cool, cool, cool,cool, je ne m’attendais pas à te voir là ».

Avec Nirvana, Leo Leonard continue à nous faire découvrir son premier EP, Vérités, paru en octobre dernier, qu’il a brillamment présenté au Pop-Up du Label la semaine dernière, lors d’un premier concert épatant, où les morceaux accompagnés à la guitare par Alex Van Pelt prenaient des teintes exutoires. C’est de bon augure, non ?

8ruki – Many Mane

Sur Many Mane, le rappeur 8ruki signe une nouvelle collaboration avec l’un des magnats de la production du Rap français : Blinks Beatz (Alpha Wann, Laylow, Hamza…). Ce dernier s’est vu gratifié d’un clip sorti en milieu de semaine. Une vidéo dépeignant le rappeur dans les rues de Montréal, nous présentant l’artiste parcourant la ville canadienne une fois la nuit tombée.

Dans un style très actuel, DirectedBySerge met en avant le rappeur en alternant entre point de vue de pure mise en scène et moments de captations live. L’esthétique propre et lisse se mélange avec celle plus granuleuse. Cette démarche offre une vraie sensation de fluidité qui anime le clip pendant ses quatre minutes. 

-M- & Gail Ann Dorsey – À toi

M révèle enfin le clip de À toi, reprise de la célèbre chanson de Joe Dassin en duo avec Gail Ann Dorsey, intégrée à son album onirique Rêvalité, révisé il y a peu en  Rêvalité Augmentée.  

Déjà que nous remercions M d’offrir une seconde vie à cette chanson tant aimée de Joe Dassin et jubilions d’en entendre sa version joyeuse et entraînante revivre sur les ondes, trois mois après survient en complément un véritable court-métrage d’animation, surprenant de créativité et de poésie. 

Aux manettes, on salue le réalisateur Stéphane Berla, (Jack et la mécanique du coeur), grâce à qui le clip prend la tournure d’un film captivant où l’on suit la trajectoire de deux antagonistes dont l’un ressemble comme deux gouttes d’eau à M, bien qu’il semble incarner un autre élément : le feu, quand l’autre incarne la force contraire : l’eau. 

Les personnages s’affrontent dans une suite ludique de jeux d’enfants  -comme cette balançoire penchant de droite à gauche – ou s’envoient des lettres depuis l’espace, projetés dans l’univers ambigu des songes, ses créations de l’esprit, ses charmes attribués à l’enfance, sa magie et son ambivalence. Dans ce rêve de trois minutes se croise une nuée de symboles que l’on attrape au vol, faite de créatures mystiques et de formes imaginaires, et tous ces éléments se répondent et s’unissent en symbiose, pour qu’enfin toute l’histoire d’une correspondance universelle résonne avec le titre : À toi

Oxlade & Camilla Cabello – KU LO SA

La Pop se montre comme étant la tête d’affiche de nos étés depuis maintenant quelques années. L’artiste nigérian Oxlade fait partie de cette nouvelle vague d’artistes émergeants et un nom à suivre. En s’associant avec Camila Cabello, l’artiste se charge de continuer à placer le continent africain sur la carte des scènes qui comptent.

Très esthétisée et filmée en 4:3, la vidéo démontre une vraie volonté de créer un univers à part entière. On peut y apercevoir de nombreux danseurs, des plans aux décors différents et plusieurs tenues portées par les protagonistes. Les 2:28 sont divisées en trois actes.

Un premier avec Oxlade, un second avec Camila Cabello, puis un dernier réunissant les deux artistes. Avec un certain travail adonné à la chorégraphie, l’extrait visuel de KU LO SA est dans l’ère de son temps fidèle à son milieu et à ses comparses. 

Cosmopaark – Can’t Wait

Annoncé pour le 20 janvier 2023, and I can’t breathe enough : le premier album de Cosmopaark approche à grands pas et une curiosité grandissante de le découvrir s’empare de nous. Afin de nous faire patienter, le groupe bordelais a offert, le 31 octobre, un extrait de ce projet à venir avec le titre Haunted House, et ce 14 décembre est sorti un second intitulé : Can’t Wait.

Can’t Wait possède des riffs de guitares saturées et distordues, rendant un ensemble mélodieux et puissant.
En s’inspirant de groupes comme My Bloody Valentine, Ride, Revolver ou encore Slowdive, Cosmopaark réussit parfaitement à poursuivre l’héritage musical de ces groupes, tout en maîtrisant le style de ses prédécesseurs, et en y apportant leur propre univers. Ce premier album est une belle promesse pour l’avenir.

Le clip de Can’t Wait a été mis en image par Clément Pelo, qui nous présente une esthétique toute droit sortie des années 90, avec une qualité et un format d’image en 4/3 que l’on retrouverait sur les vieilles télés cathodiques. En ajoutant également des effets d’images au ralenti et décalées, le clip nous rappelle les clips passant sur les chaînes musicales des différents groupes cités plus tôt. Nous replongeons instantanément dans cette décennie, qui a été l’essor du genre musical du Shoegazing, d’où est puisée l’inspiration du groupe.

Can’t Wait est un petit bijou nous donnant un sentiment d’impatience de découvrir and I can’t breathe enough, qui parviendra à nos oreilles le 20 janvier 2023.

BRÖ – Moderne Féministe (Live Session)

Dans sa live session parue le 14 décembre dernier, la chanteuse et rappeuse BRÖ nous propose un hymne sensible et contemporain. Dans une mise en scène épurée, le duo guitare-voix, sur un fond uni, ne nous invite à rien sinon qu’à une l’écoute attentive, sans distraction aucune, de cette ode aux combats de l’extime

Habité par un timbre parfaitement maîtrisé, habillé d’arpèges aussi légers que mélancoliques, le texte parlera à toutes les féministes aux prises avec leurs contradictions… Entre devoir militant et injonctions dont on peine à se départir, la part belle est faite aux stéréotypes, notamment celui de la femme vénale – pour mieux les clouer au pilori.

L’amour hétéronormé y est aussi abordé, dans ce qu’il peut apporter de questionnements dans le rapport à son intégrité et à son désir d’être vue, aimée, sans fards ni apparats. Le « j’existe », lancinant, crié presque, porte en lui une revendication aussi simple qu’universelle. Le féminisme est un humanisme.

Luke ANGER – Orange

Luke Anger revient avec un nouveau clip pour son titre éponyme tiré de son album Orange. La vibe dreamy-funky caractéristique de l’auteur-compositeur déploie un univers toujours plus polymorphe, se mariant à merveille avec la gamme chromatique choisie. 

Déclinée tout au long de la vidéo, elle teinte les différents plans qui se succèdent et se superposent : l’alternance des cadrages resserrés sur le visage du chanteur et des images d’archives composent un patchwork neo kitch rafraîchissant. Convoquant les années 80 et ses documentaires sur VHS, les couchers de soleil guitares psyché 70’s en toile de fond en plus, Luke confirme une esthétique marquée, qui l’inscrit dans une dynamique entre références et création.  Du cool en héritage.