Les clips de la semaine #147 – partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, voici la première partie de la 147ème sélection des clips de la semaine.

arthur ely – hello

« hello voici l’homme qui ne résout rien, le seul super-héros qui t’laissera trouver tout seul le chemin ». Après avoir navigué – A raison ou à tort – au gré de son persona de scène égocentré, Arthur Ely se réoriente et change radicalement de cap. Il ne se positionne plus au centre du monde, mais plutôt cerné par le monde qui l’entoure.

Dans la continuité de Carte Jeune, qui faisait déjà écho du changement de paradigme, « hello » – avec un h en minuscule – est un hymne à la normalité et aux vertus que l’on trouve dans l’ordinaire. Plutôt que de chercher à vouloir à tout prix sortir de sa zone de confort (concept très à la mode), ne serait-il pas plus sage d’œuvrer à étendre cette zone et ainsi la prolonger au-delà de notre ligne d’horizon ? Cela nous permettra d’aller plus loin, c’est certain.

C’est ce qu’Arthur Ely a entrepris de faire lors des deux derniers étés, en partant dans une tournée pirate de 15 jours aux quatre coins de la France. Des rendez-vous posés de Marseille à Paris, en passant par la Rochelle, chaque jour une nouvelle ville et à chaque ville, de nouvelles rencontres. La vidéo réalisée par Hector di Napoli, son éternel compagnon de route, retrace cette aventure entre la solitude du voyage et les moments passionnés d’échanges lors des concerts

Arthur Ely se place en observateur de ces instants, avec son regard qui le caractérise tellement, profond avec ses yeux grand ouverts – presque ébahi. La vision qu’il partage, porteuse de bienveillance et de simplicité, agit alors sur nous comme un élixir de réconfort. Et on se dit comme lui, « La vie ordinaire, c’est beau aussi ».

CANARI – Cétaidonkça

Ah ! Cela faisait longtemps, longtemps, que l’on avait plus eu de nouvelles du groupe rock-psychédélique Canari. On commençait à s’inquiéter que cette disparition ne soit le résultat d’étranges concours de circonstances. Et puis pourquoi pas ? Peut-être que c’est possible ? Mais c’est quand même bizarre ! Si vous les cherchez sur internet en utilisant leur nom, vous n’avez quasiment aucune chance de les trouver. D’ailleurs, c’est un peu la même chose pour Chaton. Nous sommes indubitablement, là, en présence d’un signe. Et le fait qu’ils soient ou qu’ils aient été tous les deux liés à La Souterraine en est un autre. On nous cache forcément quelque chose.

Mais défiance, avec Canari, restons sereins, et prenons garde à ne pas tomber dans l’évidence et la trivialité. Et si l’explication de leur absence n’était pas une explication… En s’appuyant sur nos craintes primaires et curiosités malaisantes, Cétaidonkça trouve, sans qu’on ait eu à la chercher, la réponse à nos interrogations. Peu importe que l’on soit grand capitaliste ou druide phocéen, face aux mythes et complots, gardons notre sang froid de reptilien. Jonglant entre les bons du trésor et les éprouvettes bouillonnantes, Canari nous mène tambour battant, en suivant un rythme syncopé, dans les méandres des raisonnements complotistes. Car maintenant, oui, j’en suis certain et vous le savez également : « Cétaidonkça ! »

Agar Agar – The visit

Leur futur album se précise. Player Non Player s’esquisse et se dessine, à l’approche de sa sortie prévue fin janvier 2023. Avec The Visit, Agar Agar teinte son style pourtant si reconnaissable de bribes de Krautrock. Et le mélange s’homogénéise à merveille. Le flow de la voix de Clara claque en suivant les rythmes électroniques orchestrés par Armand. Les visiteurs d’Agar Agar – illusions sonores des Robots de Kraftwerk – inquiètent. Solitaire dans la vie réelle, Odile se laisse envahir et submerger par les multiples contacts de sa vie numérique et les relations ambiguës qui s’y nouent.  Et là où une porte se ferme physiquement, le cloisonnement dans l’espace digital s’avère plus complexe.

Le sujet obnubilant est illustré en boucle – enfermement quand tu nous tiens – par une animation de Flore Balas. C’est simple et bigrement efficace, tout comme le morceau d’Agar Agar. The Visit est une grande réussite, qui laisse entrevoir de belles choses pour leur futur album. En tout cas, on a hâte de découvrir les autres morceaux qui le composeront !  

Deportivo – Révolution Benco

Après 7 ans d’absence, Deportivo a sorti un single jeudi dernier, intitulé Révolution Benco, et accompagné d’un clip qui fleure bon le chocolat de leur enfance.

Après quelques escapades vertigineuses, Deportivo tourne à nouveau et c’est un exercice qu’ils affectionnent particulièrement.  Bien qu’ils ne fomentent en aucun cas l’arrivée d’un nouvel album, un nouveau morceau est bel et bien là, fidèle aux productions qui ont fait leur réputation. 

La chanson parle de révolution, d’audace et d’égarement. La poésie y est toujours engagée, riche en métaphores, à l’image de ce clip résolument tourné vers les 90’s,  bourré de références à des hits populaires de cette époque, où la genèse du groupe a pris forme. 

La caméra tournant autour de ces gamins skateurs aux genoux niqués, des jeunes filles arborant des jeans larges et tee-shirts aux couleurs vives sont aussi au rendez-vous, s’exerçant à une chorégraphie, ralenti MTV compris. En seulement un peu plus de 2 minutes, Christophe Acker réussit à filmer un concentré de l’adolescence d’un groupe qui fête aujourd’hui sa majorité. Dix huit ans après la sortie de leur premier album, Deportivo tourne de nouveau comme une cuillère dans son Benco, formant une révolution dont ils avaient besoin. On ne saurait que vous conseiller de vous procurer des billets.

Chilla – Zouh

Après presque trois années sans projets persos, Chilla est de retour avec son deuxième album, EGO. Un opus très personnel, où la rappeuse suisse livre avec sincérité ses pensées sur sa carrière musicale. Elle accompagne cette sortie avec le clip du titre Zouh, réalisé par Hugo Gatefait et Lucas Courtin

Chilla n’a plus de temps à perdre, et le fait comprendre ! Tantôt dans une maison en train de brûler une poupée, tantôt se baladant dans les rues avec son équipe, ou encore la nuit sur un rooftop, la rappeuse nous fait voyager à travers différents styles dans son nouveau clip. Elle propose à ses fans un refrain ultra efficace, qui pourrait être analysé en deux temps : une première partie avec une voix retravaillée à l’autotune, et une deuxième partie avec des répétitions de « allez zouh zouh zouh zouh” méchamment efficaces.

Le retour de Chilla fait plaisir à beaucoup de fans dans le monde du hip-hop francophone. Zouh n’est qu’un exemple parmi les 16 nouveaux titres de la rappeuse. Après trois ans d’attente, l’artiste suisse a sorti un projet complet, varié et de qualité.

Yellowstraps – notice

Toujours plus proches d’un nouvel album de Yellowstraps, le jeune projet continue son rythme frénétique de nouvelles sorties. Cette semaine, c’est notice qui est présentée, voguant sur les textures analogiques comme un bateau sur une mer calme, avec aisance et sensualité. L’écriture est inspirée, on découvre le récit d’un craquage mis à l’image en noir et blanc de fort belle manière. Un plan séquence de grande qualité avec du jeu sur les focales, les distances de mise au point et donc le flou d’arrière-plan, qui se termine en face à face tendu. Les grooves percussifs du projet belge sont toujours aussi efficaces, et se fendent ici de vibrations qui verraient French 79 se mêler à Otzeki. Bref, on attend l’album de pied ferme !

Jeanne Bonjour – Regrets

Avec son nom qui reflète l’aube qui se lève et le ciel dégagé, Jeanne Bonjour affirme une identité musicale à la fois pop et solaire. Après la sortie de 13 ans, son premier EP, Regrets signe le retour de l’artiste. Un titre qui évoque la relation et le regard que l’on se porte, notamment en ce qui concerne nos regrets, nos actes manqués ou encore nos désirs. Pour donner un ton plus nuancé à la chanson, tout l’aspect pop est porté par la mélodie d’un piano. Une tonalité qui contraste avec sa manière presque parlée de chanter dans des harmonies assez graves. A travers le clip réalisé par Pablo Chevrel, il est question d’ironie et de prendre à la légère les petits drames du quotidien ; par exemple, lorsque la chanteuse chante : «J’vais que dans mes textes, c’est comme ça que je sors de ma tête.» Car on aperçoit Jeanne Bonjour exagérer sa joie dans un ton humoristique, accompagnée par des danseuses venant apporter encore plus de légèreté.

Gatha – Collé Serré

Si Alain Souchon évoque l’ultra moderne solitude, Gatha parlerait plutôt d’ « ultra moderne cohue ». Avec son titre Collé Serré, l’artiste évoque la foule opprimante des grandes villes. Des lieux où l’on choisit pourtant de s’installer, nous créant presque un déracinement : « Toi tu viens d’un doux pays, où l’espace est si grand que le mal s’y referme juste en respirant. » Cet aspect oppressé décalé se retrouve dans un clip réalisé par la chanteuse, épaulée par Rémi Cluzeau. La composition du clip est travaillée, car on y aperçoit des scènes représentant des personnages coincés dans des espaces clos qui en viennent à s’écraser les uns les autres. On se reconnaît dans certaines scènes du quotidien : aux heures de pointe dans le métro, par exemple.

Julia Jean-Baptiste – Le désamour

Quelque temps après avoir sorti un single enivrant, dansant et transportant, Julia Jean-Baptiste ralentit le tempo avec Le désamour. Un titre qui pourrait renvoyer à des peines ou des plaies profondes. Pourtant, ce morceau n’a rien de triste ou de tragique. Il évoque plutôt le temps et les sentiments qui passent dans un mouvement doux, empli de tendresse. Il est question d’une relation qui s’étiole, de deux personnes qui se quittent, comme pour symboliser la fin d’un temps, pour permettre un renouveau. Ce sentiment de nostalgie transparaît dans le clip réalisé par Sylvère Bourjaillat, à qui l’artiste confie des vidéos de son enfance.

Lolo Zouaï – Crazy Sexy Dream Girl

La chanteuse franco-américaine a dévoilé un nouvel extrait vidéo de son nouvel album, Playgirl; avec le titre aux influences 2step, Crazy Sexy Dream Girl. Réalisé par Zhamak Fullad, le clip montre à nouveau toute l’importance que Lolo Zouaï accorde à son esthétique visuelle. 

Utilisant les sonorités dansantes de l’instrumentale, elle ancre son visuel dans une fin de nuit où, casque vissé sur les oreilles; elle déambule aux rythmes de son propre morceau. Cette ballade s’entrecoupe de plans avec un homme, dans lesquels Lolo laisse planer le doute sur la nature de leur relation, d’un regard froid enveloppé de mystère. 

A travers son récit, on comprend soudainement mieux le message : elle aspire simplement à être libre et pour cela, elle a compris qu’elle n’avait pas besoin d’être dans une relation. 

« I never want another boyfriend

They’re no good for me »

Tout en légèreté, elle vient à nouveau poser un message rempli de liberté, racontant, à sa manière, ses désirs. 

Zed Yun Pavarotti – House

Au vu de la physionomie des sorties actuelles, on pourrait presque dire que ce clip sonne le grand retour de Zed Yun Pavarotti. Pourtant, il ne s’est écoulé que deux ans depuis l’album Beauseigne. Entre temps, il a su se faire discret. House annonce donc une reprise d’activité pour le jeune stéphanois. A l’image de ce nouveau visuel, co-réalisé par ses soins et ceux de Charles Leroy, il semble plus que déterminé. A un tel point qu’il ne calcule pas les corps allongés sur son chemin, le regard fixe vers le loin, comme s’il s’y trouvait ce qu’il avait toujours cherché. Un sentiment de confiance, qui se répercute également dans son texte. Appuyant qu’il n’est plus là pour jouer en figuration, mais pour « acheter cette p*tain d’House », avant que sa vie ne se termine…