Les clips de la semaine #142 – partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la seconde partie de la sélection numéro 142 des clips de la semaine.

Dehd – Eggshells

Trio de Chicago acclamé depuis la sortie de Water en 2019, Dehd est aujourd’hui de retour avec un nouveau single ! Alors qu’on a trop longtemps collé l’étiquette bedroom pop à leur projet, ces derniers nous prouvent qu’ils savent s’en détacher et qu’ils restent, de toute évidence, les meilleurs dans leur domaine.

Nouveau morceau supposé figurer sur Blue Skies, leur dernier album en date, Eggshells est un titre où le groupe brise la coquille et laisse ainsi le besoin d’évasion et l’euphorie être.

Derrière la caméra, on retrouve Emily Kempf elle-même et Kevin Veselka, déjà présent sur nombreuses des dernières vidéos du groupe. Inspiré des films de Jodorowsky, ce clip nous présente Dehd en monochrome, parcourant le désert en quête de catharsis et de libérté absolue, toujours.

Le trio sera par ailleurs de retour à Paris le 14 novembre prochain à la Gaîté Lyrique, dans le cadre du Pitchfork Festival. Ne les manquez surtout pas !

Stuffed Foxes – Drift 

Stuffed Foxes est de retour, pour notre plus grand plaisir. Premier extrait clippé de leur second album, Songs/Motion Return qui sortira le 18 novembre, Drift est un de mes morceaux favoris. 

En live, c’est le moment où les six musiciens nous enjoignent à la bagarre. Bagarre bigarrée et acérée. 

Et en effet, ce sont 3 minutes et 44 secondes denses et intenses. Où les guitares rugissent, tout de suite, tandis que les nappes synthétiques nous enveloppent. 

Réalisée par Flavie Herbreteau à l’aide d’un fond vert, la vidéo dévoile les musiciens, déchaînés, tandis que derrière eux, des images en noir et blanc s’enchaînent. Images d’un autre temps, dominées par la vitesse et l’urgence. Car si le morceau s’appelle Drift, on peut aisément imaginer la référence à cette pratique sportive, où le pilote fait glisser sa voiture de part et d’autre de la piste bitumée, sur la brèche. Et avec Stuffed Foxes aussi, tout tangue. Eux, le bateau projeté derrière les musiciens, le train ou encore la luge. 

Tout tangue et nous, on en redemande. 

Ysé – Les acacias

L’artiste Ysé revient avec le clip du morceau pétillant et entraînant Les Acacias. Le titre est rendu solaire par ses synthétiseurs chic et ses guitares groove. Il est également entraînant et entêtant, avec ses refrains et ses chœurs qui se présentent comme une invitation à fredonner avec l’artiste. Les paroles sont emplies d’espoir, d’erreurs qui se rattrapent et de confiance à construire, à écrire. Un texte à la fois intimiste mais dans lequel chacun se reconnaît. Un aspect qui fait des Acacias un chant collectif, universel, presque fédérateur.

Pour ce qui est du clip, réalisé par Nicolas Garrier-Giraudeau, il évoque avec finesse et subtilité la liberté qui se retranscrit dans le morceau. On y voit Ysé comme perdue entre les tours de la Défense avant de reprendre sa légèreté, sa douceur, entre des paysages de champs infinis.

Warhaus – Desire

Petit à petit s’approche de nous la date de sortie du nouvel album de Maarten Devoldere ou Warhaus (ou encore ½ Balthazar). Le Belge nous gratifie d’un second single et clip après la sortie remarquée de Open Windows il y a quelques semaines. Aujourd’hui, on parle donc bien de Desire et de son groove nonchalant et suffisant. Il est toujours intéressant de s’interroger sur la quantité de travail nécessaire à faire paraître un morceau comme évident et s’imposant de lui-même. Cette simplicité éprouve toujours notre capacité à imaginer qu’il puisse y avoir des centaines d’heures de travail derrière.

C’est la force de Warhaus depuis ses premiers morceaux et il la cultive au gré des années et des albums. L’écoute est aussi naturelle que les épaules qui vont de gauche à droite au rythme de Desire et son côté old school. Côté images, le décor d’un centre de communications sert de scène au clip, dont l’éclairage renforce ce côté vintage qui transpire des nouveaux morceaux du chanteur.

Romane – Home

Romane revient avec son nouveau clip illustrant le morceau Home. Un titre évocateur, comme si la musique devenait pour la chanteuse un abri, une maison. Ainsi, ce n’est pas par hasard que la réalisatrice du clip Tamina Manganas aura choisi certaines images d’illustration. En effet, on voit l’évolution de Romane défiler sous nos yeux. On reconnaît des images de concerts, de festivals, comme la grande scène des Francofolies de la Rochelle, du Chorus, ainsi que des images plus intimes en coulisses de ses concerts ou les applaudissements du public.

Zoomy & Abel31 – FREE RIO

Tout droit sorti d’OBLIV!ON, le projet commun entre le producteur Abel31 et l’artiste Zoomy, FREE RIO en est également le premier extrait vidéo. Ce projet s’ancre dans une sphère du rap où tout se joue dans l’onirisme. Subtilement, il arrive à nous emmener dans un nouveau monde, au croisement d’une multitude de sonorités difficiles à nommer tant elles sont déconstruites pour mieux être rassemblées. Certains y verront un aspect futuriste, qu’on ne peut nier mais qui serait réducteur tant il y a une vraie maîtrise et connaissance des sonorités et outils actuels. 

Ce n’est donc pas un hasard si @brandon.grn, réalisateur de ce clip, a décidé de miser une bonne partie de ce visuel sur de la post-prod, incrémentant effet 3D (co-réalisé avec @hhhworkshop et Zoomy), grain, effet fisheye et nombres d’autres effets. 

Tout se mélange en symbiose : les images, les effets, la mélodie dégagée par Zoomy et les longues 808 grésillantes d’Abel31. Un sacré mélange qui peut faire peur mais qui est savamment dosé, ouvrant une porte à un pan du rap francophone où créativité et efficacité ne font qu’un. 

MIA GLADSTONE – SOCIAL MEDIA (FEAT. Trent the HOOLiGAN)

C’est un véritable anthem contre les réseaux sociaux que Mia Gladstone nous propose avec Social Media, dans lequel elle clame haut et fort “F*ck Instagram, F*ck Twitter”. En featuring avec Trent the HOOLiGAN, qui apporte un couplet rappé au morceau, ce dernier dénonce les méfaits d’Internet, qui nous détourne de ce qui est réellement important.

Zooms, transitions pixelisées, personnages flottants en 3D, saturation poussée au maximum, le clip apporte son lot d’éléments visuels assez durs à digérer au vu de leur quantité. Sûrement une métaphore au surplus d’informations avec lesquelles les réseaux sociaux nous submergent, toutes plus ou moins utiles et sensées.
Une originalité revendiquée par Mia Gladstone, partagée par Trent the HOOLiGAN, qui se tourne en ridicule en revêtant un masque rose, un bob, des lunettes fluos,  et en faisant mine de lire les paroles, avant de jeter les feuilles sur lesquelles elles étaient vraisemblablement écrites. Une bonne alchimie de laquelle ne pouvait résulter qu’un excellent morceau !

Binks Beatz x Laylow – Dennis Rodman

La filiation entre Laylow et le basketteur Dennis Rodman peut se faire sur plusieurs points : souvent en décalage par rapport aux codes établis, ils ont toujours été accompagnés d’une faim et d’une confiance en eux, et cela aussi bien pour le meilleur que le pire. Si des références avaient déjà été faites par le rappeur précédemment (sur OTO en 2016, par exemple), il a décidé d’ouvrir le projet Drip Music 2 du producteur Binks Beatz avec ce titre directement référencé pour l’ailier iconique des Chicago Bulls. 

Une introduction qui a vu le jour ce vendredi, accompagnée d’un clip dans la soirée, réalisé par Tinoki. A l’instar du morceau, aux accents froid et caverneux, c’est dans cette ambiance précise que le clip prend ses quartiers. Dans les fins fonds d’une grotte, entourés de requins, les deux artistes composent. L’ambiance est sombre, propice à la concentration, mais une atmosphère oppressante ne peut s’empêcher de s’y dégager. Une fois le morceau composé, il remonte à la surface terrestre, pour profiter de la fin de la nuit pour multiplier les références au sportif à travers un égo-trip mesuré. 

Laylow se joue de l’instrumentale minimaliste du producteur aussi facilement que de la caméra du réalisateur, prouvant à nouveau que, que ça soit au son ou à l’image, il maîtrise son art. 

Solal Roubine – Une meuf comme toi

C’est une réécriture des « Locataires » de Doisneau, 1963, que nous propose le dernier clip de Solal RoubineUne meuf comme toi. Le chanteur nous régale de sa prose traînante mi-douce mi-amère, mise en images par Valentin Pitarch.

Au gré d’une superposition de saynètes, un immeuble aux couleurs de néons ultrapop dévoile les vicissitudes des existences contemporaines qu’il abrite. On y voit le protagoniste démultiplié se débattre dans un décor néovintage avec l’amour qu’il peine à retenir, les tentatives de se mettre au sport, et puis : la flemme. La jeune fille au Monstrera entre en scène, mais seulement pour mettre en lumière la juxtaposition de deux solitudes, prises au piège dans leurs chambres respectives, évoluant de concert, ajustées mais séparées. Le ton reste léger, l’image léchée conforte l’envie de continuer à danser et faire danser. 

Leo Fifty Five – Rois du monde

Les rêves ne deviennent pas toujours réalité, mais rien ne nous empêche d’essayer encore et encore. Voilà le message positif que véhicule Leo Fifty Five dans Rois du monde. Si le temps passe et que le monde se fracasse parfois sur les fantasmes, rien n’empêche de continuer d’y croire ou de faire évoluer sa pensée vers des nouveaux objectifs, des nouvelles montagnes à gravir.

Le belge dévoile ce nouveau titre, au rythme entêtant et au groove parfait qui nous entraîne sur la piste de danse et nous livre un refrain qui se grave dans notre tête dès la première écoute. Un titre parfait qui lance l’aventure d’un premier album attendu pour le printemps 2023.

Visuellement, Colin Donner transporte Léo Fifty Five entre territoires solitaires et grandes fêtes stylées entre Bruxelles et Ténérife, comme pour le confronter de manière symbolique à ses rêves et à ce qu’il doit traverser pour les atteindre. Une vidéo au style affirmé qui permet d’étendre un peu plus l’univers de Léo.

s8jfou – Soft

Il y a des associations aussi inattendues que finalement assez évidentes. Voir s8jfou se lier avec Vincent Castant est au final une rencontre pleine de bons sens, tant la musique toute en nuances de l’un se prête parfaitement à l’étrangeté visuelle de l’autre.

La preuve avec Soft, extrait du futur Op Echo de s8jfou. On se retrouve dans ce morceau qui ne cesse de grandir, d’évoluer, de changer et on le confronte à des images de plage.

Ca vous semble ridicule ? Laissez donc Vincent Castant passer le tout à sa moulinette, retirant les têtes de tous les intervenants, étirant les corps, les faisant bouger, tourner, les maltraitant un peu par moments et on se retrouve face à un grand moment de malaise fascinant dont on ne peut ni détourner le regard, ni se fermer les oreilles.

Une belle leçon de son et d’images qui méritait bien sa place dans notre sélection de la semaine.

King Wizzard & the Lizzar Wizzard – Ice

La formation australienne s’apprête à sortir son 8e, 9e et 10e album de l’année, soit un total de 173 en 10 ans. Et c’est le titre Ice, d’une durée minimaliste de 10 minutes, qui déboule sur toutes les plateformes aux abonnements premium afin de ne pas subir la publicité.

King Gizzard and the Lizzard Wizzard part sur des hectares loin du Larzac. Un gars débarque tel une star sur les côtes. Le cadre le pose en jar sur des différentes pas de danses de tsar. Sans mettre le bazar autour du lui, on le sent heureux d’être hors de portée de la ligne 8 en direction de Balard. Le groupe semble avoir plus d’une flèche à son arc avec ce single à l’opposé du dark.