Les clips de la semaine #134

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici notre 134ème sélection.

Charlène Juarez- First Love(r)- It’s not over

Ce n’est pas un clip au sens habituel du terme que nous propose cette semaine Charlène Juarez, mais une vidéo performance d’un medley de ses deux titres First Love(r) et It’s not over. Une vidéo plan séquence en noir et blanc tout en délicatesse où l’on se laisser glisser sur les notes précieuses du piano dans un décor industriel à l’abandon. Pianiste, compositrice, issue du Conservatoire de Boulogne- Billancourt, Charlène nous expose toute sa sensibilité, associant les codes du classique et de la danse à la simplicité du commun. Une démarche qui démystifie la pratique trop souvent cantonnée aux décors luxueux, un contre-pied favorisant l’accessibilité d’une musique qui demande avant tout à être écoutée sans préjugés, et c’est juste beau.

[OHM] – 3’39 » Love

[OHM, trio nantais naviguant entre rock et noise punk, vient de sortir il y a quelques jours son clip, 3’39 » LovePremière révélation de l’album Of Hymns and Mountains, attendu pour le 25 novembre prochain.

À la base, il y a Theo Brachet à la guitare et Anton Brachet à la batterie. Deux frères qui rencontrent en 2017 leur chanteur et bassiste, Neige. Passionnés par le rock et la soul des années 60 et 70, mais néanmoins portés par la mouvance musicale actuelle, le groupe construit un son puissant, oscillant entre ombre et lumière. Entre fuzz qui s’étire et douces accalmies. Batterie, basse et guitare s’emmêlent dans un délicieux assemblage sonore. 

Le clip, réalisé par Quentin Lateral a été tourné dans un hangar désaffecté, où la nature semble avoir repris ses droits. Les musiciens s’en donnent à cœur joie sur leurs instruments, alternant avec aisance les changements de rythme, menant la tension à son paroxysme. Rien ne résiste à ces déflagrations sensorielles, pas même le beau vaisselier de mamie. All Them Witches rôde, The Psychotic Monks est dans les parages et Stuffed Foxes suit de près… De belles influences amplement méritées pour un groupe dont on n’a de toute évidence pas fini d’entendre parler…

3’39 » Love est un hommage à l’amitié et à ce nouveau monde qui questionne les relations amoureuses, qui inscrit de nouveaux mots pour de nouveaux sentiments. Avec ce morceau, [OHM] cherche à désacraliser l’amour et à le libérer du carcan trop étroit auquel la société l’a assigné, pour espérer construire enfin des relations saines sans exclusivité et sans dépendance.

A écouter de toute urgence.

Blackbird Hill – Keep Up Until It Bleeds

Après Flatline, le duo bordelais Blackbird Hill est de retour avec Keep Up Until It Bleeds, un morceau oscillant entre stoner survolté et douces mélodies.

Depuis l’album Razzle Dazzle, le ton a un brin changé. Le blues rock a laissé place au garage énervé. Plus sombre, plus mélancolique. Sans aucun doute, les amateurs et amatrices de doom et de sludge y trouveront leur bonheur. 

Keep Up Until It Bleeds, réalisé par Tchaz Locke (du groupe Steve Amber) est confectionné à partir de films des années 50 et grâce à un travail minutieux de collecte d’images d’archives. Depuis notre vaisseau spatial, nous assistons aux conséquences désastreuses des actions engendrées par l’Homme. Industrialisation, capitalisme, guerres, l’artiste passe tout en revue, sous l’œil ébahis des spationautes.

Maxime Conan à la guitare et au chant nous séduit instantanément avec ses riffs harmonieux et sa voix suave. Et lorsque survient le refrain, les accords se font plus lourds, le chant plus déterminé. Le stoner se mêle à la violence des mots, tandis qu’on imagine aisément la puissance de ce morceau en live. Taper du pied, laisser sa tête se balancer en rythme et laisser la magie opérer. Théo Jude, au chant et à la batterie n’est pas en reste, nous assénant de coups bien placés et jouissifs.

Avec Keep Up Until It Bleeds, Blackbird Hill met en évidence la course à la réussite, cette recherche effrénée de sens que la société nous assigne. Comment trouver sa place, s’assumer et simplement lâcher prise ? 

Blackbird Hill construit, façonne et réarrange sans cesse sa musique. Déjà emportés avec Razzle Dazzle, nous assistons à leur métamorphose, ravis et impatients de les revoir en concert. Et ça tombe bien, ils joueront au Supersonic (Paris) le mardi 30 août 2022 avec le réalisateur du film, Tchaz Lock, chanteur et guitariste de la formation Steve Amber.

Pour l’album, il faudra patienter encore un petit peu, car il est annoncé pour le 7 octobre. D’ici là, vous pouvez écouter en boucle Flatline et Keep Up Until It Bleeds. Ce sont de petits bijoux brillants, un brin éblouissants, un brin précieux. À partager sans modération.

MadeInParis – Secret

En accompagnant la sortie de son dernier projet, Sensationnel, avec le clip très estival de SecretMadeInParis est en accord avec la chaleur et le soleil bleu qui est de retour depuis cette semaine. 

L’esthétique du jeune artiste se dévoile donc dans un cadre ensoleillé, dans le clip réalisé par Léo Larour. Chemise en soie sur les épaules, lunettes de soleil sur les yeux et cocktail à la main, les ingrédients sont réunis pour passer une belle après-midi au bord de la piscine. Assis sur sa chaise longue, MadeInParis observe les femmes de tout âge qui l’accompagnent, chacune effectuant une activité différente. Mais le rappeur, connu pour son attrait touchant à la luxure, ne semble pas difficile et adopte le même regard pour chacune d’entre elles ; regard et affection qui ne semblent pas réciproque, tant toutes agissent comme s’il n’était pas là… ce qui ne semble pas déranger l’artiste qui s’amuse sur l’instrumental de Draco, terminant cette journée sous le soleil par un cours de sport et l’attention tant attendue de ses collègues féminines.

Blumi – Dresden

Un an après la sortie de son fascinant EP, I Know About YouBlumi nous revient avec Dresden, qui semble la faire évoluer vers un ailleurs musical. La trame sonore, organique et acoustique présente sur ses premiers titres laissent désormais place à des flows électroniques d’une douceur envoûtante, matérialisés par Romain Vasset. Pour autant, l’émotion est toujours intacte et même accentuée par l’utilisation d’un parlé-chanté qui amplifie la dimension poétique. Juxtaposition d’instants volés si insignifiants qu’ils en deviennent essentiels pendant les quatre minutes du morceau. Nos pensées se mettent à vagabonder, rebondissant, prenant appui sur les mots égrenés par Blumi « he said water and I said water ». Ses pensées, pourtant si personnelles, se mettent à exister au-delà de la chanson comme si elles devenaient un peu les nôtres « The fish we would catch ».

Dresden est une invitation à un voyage contemplatif que l’on peut suivre les yeux fermés, laissant notre imaginaire dessiner les images, ou en regardant la vidéo, les yeux grands ouverts, captivés par les photographies de Juana Wein. Jouant sur les ombres, lumières, reflets, les images captées sont un appel à une rêverie où le ressenti deviendrait davantage révélateur que le sujet lui-même.   

FOAMS – Losing My Mind

Losing My Mind porte dans son ADN une lutte contre nos démons. Comme dans une thérapie où le canapé, filmé à l’image d’un test de Rorschach, prend une place centrale permettant aux cinq membres de FOAMS de s’ouvrir et de partager leurs peurs. Si le sujet est évidemment introspectif, derrière le calme apparent des musiciens bouillonne une tempête de sentiments. Ces luttes intérieures se matérialisent musicalement par une partition forte et sans concession. Il existe un côté défouloir, exutoire dans ce morceau où, comme dans les images de la vidéo réalisée par Rosa Lerooy et Guillaume Chlique-Bourdeau, les sons et les paroles se percutent. Pris dans la nasse que constituent nos craintes les plus intimes, il n’est pas question d’abandon mais de résistance : celle qui donne force aux combats que l’on mène contre les multiples entraves psychologiques qui nous empêchent d’avancer. Losing My Mind, pour qu’à la fin on puisse « Danser avec ses peines ».

JimmyQ – Kétamine

Cette semaine, JimmyQ vient de publier son premier album À Mi-chemin chez KidderminsterEt comme rien ne vaut quelques images pour matérialiser la sortie, il livre pour l’occasion la vidéo de sa chanson Kétamine. On retrouve dans ce titre tous les ingrédients qui composent sa signature musicale : une mélancolie épanouie et jamais triste, une certaine naïveté qui porte en elle les valeurs de la sincérité.

Kétamine ouvre la porte à des mondes parallèles, où amours et psychotropes se mélangent pour tisser la toile de rêveries fantasmagoriques. Les images, tournées par le duo Isla Oiseau, aux nuances rouges et bleues, nous transposent dans un conte où une Ferrari – fil rouge de l’album – faisant office de carrosse nous mènerait vers un château À Mi-chemin entre celui de Cendrillon et du conte de Dracula.      

MPL – Bonhommes

Quelques semaines après la sortie de leur merveilleux troisième disque, Bonhommes (réalisé par Nicolas Steib du groupe Slogan), MPL ont ce mercredi dévoilé le clip qui accompagne la chanson du même nom. Devant la caméra du réalisateur Jacques Pinault, le groupe s’interroge sur la masculinité et sur le conditionnement qui mène aux démonstrations exagérées de la virilité. Représentant chacun un archétype de « vrai bonhomme » (selon les modèles mis en avant par la société depuis nos plus jeunes années, et bien avant ça d’ailleurs) et face au reflet de leur enfance, les cinq membres finissent par lâcher les armes : ils se détachent petit à petit des violentes injonctions et laissent leur sensibilité et leur vulnérabilité transparaître, notamment après une petite session de thérapie avec leur invité Ben Névert ayant répondu présent à l’appel sur ce clip. Cet hymne à la douceur est l’un des témoins d’une prise de conscience de plus en plus collective à notre époque et assure que nous avançons petit à petit sur le bon chemin.

Fleur Offwood feat. Vivre ! – Un Homme Parfait (robot lovesong)

Au travers de ce titre et du clip qui l’accompagne, Fleur Offwood évoque un amour artificiel.

L’artiste se met dans la peau d’un robot humanoïde digne de l’idéal féminin des années 1950, qui repasse, fait le ménage et vit sous le joug de son mari. Scaphandre Productions illustre cela. On aperçoit Fleur Offwood et David Lafore incarner ce couple un peu particulier…

Pourtant, il y a plusieurs lectures possibles à cette chanson. Lorsque l’on regarde la fin du clip, on se demande si cet amour artificiel ne serait pas en fin de compte sincère ?

Julia Jean-Baptiste – Music-hall

Après la sortie de son dernier EP Solo, l’artiste Julia Jean-Baptiste nous offre un nouveau titre.

Les teintes musicales grooves sont affirmées. Le clip est dansant, parfait pour la légèreté de l’été. Comme pour palier à la canicule, l’artiste nous invite à nous réfugier dans les salles de music-hall chercher un peu de fraicheur.

Un aspect frais que met en avant Simon Vanrie (ayant réalisé pour Clou ou encore Françoiz Breut), car on peut apercevoir Julia Jean-Baptiste danser au milieu de tissus qui s’envolent, l’entourent et dansent autour d’elle.