Les clips de la semaine #118 – partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la première partie de la sélection numéro 118 des clips de la semaine.

Thx4Crying – ok ♡

Trois mois après Alors je descends plus bas, Thx4Crying nous amène dans un univers qui pourrait s’apparenter à celui d’un conte de Blanche Neige revisité. Mais dans celui-ci la Reine-Sorcière garderait la pomme empoisonnée pour la partager dans un ultime élan mélancolique avec la personne qu’elle aime. Comme dans un conte enfantin où la noirceur se blottit à côté de bienveillance, la ligne musicale légère contraste avec un discours funèbre.

Le flow sonore aux tonalités lofi et 8-bits accompagne les images animées par Zélie Durand dans un chamarré de teintes pourpres. Un miroir maléfique, un cœur dessiné avec un fil barbelé, une boule de cristal, un jeu de tarot participent à l’esthétisme d’une romance gothique dont l’atmosphère se trouve soudainement brisé par un Ok <3 numérique qui claque bref et métallique.

Et si vous êtes aussi Ok <3, retrouvez Thx4Crying avec Théo Grosjean pour un concert dessiné qui s’annonce tout en sensibilité. Cela se passerale 11 mars à la cantine de Petit Bain dans le cadre de son festival How to Love 2022.

Kevin Heartbeats – Bark Bark

Kevin Heartbeats, nouvelle signature du label S76, nous dévoile pour la sortie de son premier EP Debt Level Alright un titre à l’ambiance contenue. La vidéo nous présente son moi intérieur. Un patronus qui prendrait l’apparence d’un requin dont on refoulerait l’aspect prédateur pour ne retenir que celui d’un loup de mer solitaire et imperturbable.

Le flow délicat s’inscrit dans le courant d’une Bedroom Pop propice à l’introspection. Bark, Bark – avec son titre enfantin – raconte l’histoire, inéluctablement ouaf-ouaf, d’un chien qui attend avec une certaine anxiété que son maître revienne. Une amitié Homme-Animal crayonnée par une douce ligne musicale qui s’habille d’une prod inventive dont les boucles tournoient dans un équilibre fragile. Le label S76 est aussi le label de QuinzeQuinze – creuset de toutes les expérimentations.

Vous pourrez découvrir en concert Kevin Heartbeats, bien entouré, le jeudi 24 mars au Point Ephémère pour sa release party.

Princess Chelsea – Everything Is Going To Be Alright

Une basse qui fait vibrer nos corps, une voix cristalline et une mélodie implacable, pas de doute Princess Chelsea est de retour avec un titre efficace et poignant. Empreinte d’une think positive attitude, Everything is going to be alright résonne comme un mantra alors même qu’en fin de morceau des riffs de guitare saturés se mêlent à l’harmonie musicale prévalente. Ilpourrait devenirle leitmotiv de notre quotidien bringuebalé par les crises sanitaires et climats internationaux belliqueux chargés en testostérone.

La vidéo – simple – tournée dans une ferme pédagogique fait la part belle aux grands espaces tourmentés de la Nouvelle Zélande et à la mignonnerie des animaux, cabris, agneaux, moutons ou alpaga, qui y paissent. Bucolique ou pas tant que cela si inconsciemment elle porte en elle une référence à la vidéo AFFCO des Skeptics qui avait fait scandale à la fin des années 80.

Avec son nouveau titre Princess Chelsea égraine une chanson avec cette naïveté feinte que l’on adore chez elle. Everything is going to be alright annonce un nouvel album prévu pour l’automne. On a hâte !  

Dye Crap – Booze Cruise

Les Dye Crap sont loin d’en avoir fini avec nous. Ils sortent maintenant un clip pour leur excellent Booze Cruise. Ils utilisent avec parcimonie l’allégorie des croisières alcoolisées dont sont friands les américains moyens (coucou the office). Du coup, on les suit dans un road trip monstrueux où la fiat punto fait office de vaillant destrier pour emmener nos compères jouer aux quatre coins de la France, et éventuellement s’alcooliser. Ils auront beau disséminé quelques bouteilles d’orangina, on ne s’y trompera pas. On vous recommande si vous kiffez le punk ou que vous n’avez jamais vu un pétard dans un cul.

Just Mustard – Still

L’Irlande nous régale depuis des années en termes de musique, son dernier miracle Just Mustard vient le confirmer. Groupe de Shoegaze aux influences trip hop, ils se démarquent essentiellement pour leur instrumentale ultra industrielle aux résonnances électroniques. Dans leur dernier titre Still, le groupe cultive son goût pour l’étrange voir l’horreur. La voix de la chanteuse évoque une mélopée d’une petite fille toute droite sortie des enfer pour hanter votre sommeil. La « douceur » est contrastée par des synthés grésillant et d’un beat frappé sur l’acier. Un NIN des abimes. Sur les pupilles en gros plans viennent s’imprimer l’image de la chanteuse, comme une apparition mystique prête à nous hanter. Aussi flippant que génial.

Meskerem Mees – Where I’m From

On avait découvert Meskerem Mees avec son tout premier album Julius. La folk poétique et une honnêteté dans ses paroles nous avait laissé sans voix. La voici revenue avec un clip du morceau Where I’m From, figurant en avant dernière position sur son opus.Réalisé par Jaan et Michiel, le clip est un savoureux mélange de dessin animé et de film, qui se croisent durant la vidéo. Si nous commençons ce voyage dans une salle de gymnase tout à fait lambda, le personnage principal va très vite s’échapper dans un monde imaginaire, prenant les objets sportifs pour les transformer en animaux ou autres qu’elle rencontre lors de son parcours dans ce monde lointain.Les dessins sont comme des petits collages d’images en tout genre, avec beaucoup de détails qui se rapprochent beaucoup de l’esthétique de la pochette d’album.Meskerem Mees nous emporte une fois de plus dans un monde qui est le sien, et on la suit avec grand plaisir prêt.e.s à se laisser rêver.

Dude Low – Bottle

Bottle est le deuxième single qui annonce le prochain album du Rennais Dude Low, Ego Trip. Pour ce clip, on est bien dans un mood égocentrique quand on se rend compte que tous les personnages de la vidéo sont joués par l’artiste. Bottle c’est un morceau groovy un peu à la Mac Demarco, teinté de hip hop très posé et ensoleillé. Le clip réalisé par Simon Barrau, distingue trois lieux différents où l’artiste se met en scène, tantôt passager dans une voiture, tantôt conducteur ; patient d’une psychanalyse mais aussi psychanalyste ou alors client d’un bar ou barman.Une auto analyse de lui même est réalisé ici. Bottle est de ces œuvres qui sont cathartiques, rien de mieux que de créer pour répondre aux questions que l’on se pose.

Bu$hi – Link Up

Depuis ses débuts avec Lyonzon ou Saturn Citizen, le nom de Bu$hi n’est pas anodin pour les amateurs de rap. Une voix singulière, une aisance à toute épreuve, un rap précis et un univers visuel également très complet lui ont permis de ne jamais laisser les gens indifférents face à sa proposition artistique. Un condensé de tout cela se retrouve dans le clip de Link Up, extrait de son nouveau projet la Bushi Tape 2 et réalisé par @steeny777.Comme à son habitude, le rappeur prend de la hauteur dans ce nouveau visuel, le drone, virevoltant entre les montagnes appuie le côté aérien qui peut composer sa musique et renforce le fait qu’il est seul en haut, comme s’il imposait sa suprématie à l’étendue de nature devant lui. Pourtant, une partie de lui préfère rester dans une grotte, sombre et froide. Une dualité qui représente à merveille le propos de ce titre. 

« J’ai pas l’ombre d’un doute, faut qu’j’me calme sur la beuh
Trop d’fumée dans la bouche, j’préfère rester solo
J’préfère rester dans mon blues
« 

Une grotte qui s’éclaire de plus en plus, montrant un artiste déterminé à imposer sa patte et sa vision et à devenir ce qu’il prétend être dans ses textes : une nouvelle sorte de rockstar. 

« C’est fini, c’est nous les nouveaux Prince, les Ozzy Osborn« 

Ben PLG – Quand les lumières s’éteignent

Si dans le rap c’est principalement la précarité due aux conditions de vie dans les banlieues entourant les grandes villes qui est pointée du doigt, cela fait un moment que des rappeurs issus de provinces viennent apporter un autre récit tout en gardant les fondements de cette culture. Parmi eux, Ben PLG, il vient du Nord, là où il a pu voir et vivre des choses qui ont alimenté sa musique. Il a livré cette semaine Quand les lumières s’éteignent sur un piano composé par Murer et accompagné d’un clip réalisé par Ciel Rose. Porté par les notes de piano, c’est le visage fermé qu’il se livre sur sa vie. De l’absence de figure paternelle, aux pleurs de sa mère et de sa relation souvent destructrice avec l’alcool. 

« J’viеns du Nord donc j’m’explose à la bière, j’rêvе que j’suis sur l’autoroute à l’envers« 

Touchant dans son récit, il l’incarne à merveille en démontrant à travers ce visuel une interprétation troublante de réalisme. Le tout étant porté par une maîtrise du sens de la formule qui ne peut que venir sublimer un propos déjà pourtant riche de sens. 

ROSALÍA – CHICKEN TERIYAKI

Cette semaine Rosalia dévoile Chicken Teriyaki, un titre qui fait autant monter la température de cette fin d’hiver que notre impatience à découvrir son troisième album à venir Motomami.

Le clip de Chicken Teriyaki est un joyeux bordel de deux minutes où on y retrouve des chorées endiablées, des trottinettes ainsi qu’une moto passant par la fenêtre le tout dans un décor de Flashdance revisité. La chanteuse espagnole force même l’admiration en dansant sur des talons dont il ne vaut mieux pas savoir le nombre de centimètres si on a le vertige. Reine de la pop hispanique, elle délaisse sur cette chanson ses jolies envolées vocales qui l’ont fait connaître pour un rythme plus reggaeton.

Le titre reste bien en tête et la chorée est savamment orchestrée pour devenir la prochaine trend TikTok.  De quoi nous occuper jusqu’au 18 mars, date de sortie de son nouvel album.

Joesef – It’s Been A Little Heavy Lately

Joesef nous présente un nouveau single cette semaine, accompagné de sa mise à l’image. It’s been a little heavy lately nous emmène dans les tréfonds d’un samedi soir dans la tête d’un amoureux attiré vers sa partenaire comme un papillon de nuit vers une flamme, en toute connaissance de cause, sachant parfaitement que la seule issue est de se faire du mal mais incapable de se détourner de ce cruel destin. Pour autant, le morceau est excessivement dansant et mélodique et on passe un moment agréable à son écoute. Un côté danse pour coller à l’ambiance club et festive du samedi soir, mais un thème essentiellement mineur pour respecter la mélancolie et la souffrance évoquées. Côté image, les plans et le travail de cinématographie sont sublimes et parviennent à instiller un malaise à son spectateur, transmettant toute la détresse de l’auteur. On est conquis, et on attend la suite des aventures de Joesef.

Molly Burman – Pretty Girl

Il est bien difficile pour pour une fille d’évoluer avec les normes patriarcales de beauté et Molly Burman en a fait les frais, s’habillant pendant longtemps de fringues inconfortables pour ressembler aux “filles dont on parle dans les chansons”. À tout juste 20 ans la musicienne londonienne est devenue une songwriter à part entière et n’essaye plus d’être quelqu’un d’autre. Sur Pretty Girl, son premier single depuis la sortie de son EP Fool Me With Flattery l’été dernier, Molly Burman nous prouve que la beauté vient d’abord de l’intérieur, malgré le regard du monde qui l’entoure : “You might not like it but I feel pretty”. Cherchant tout de même l’approbation : “I might not be sexy but can I please look pretty?”… D’une voix légère, accompagnée d’un piano aérien, la musicienne nous parle de son expérience personnelle, de ses déceptions et de son parcours pour s’aimer soi même. Un morceau en apesanteur touchant d’une musicienne à suivre. 

Papooz – I’d rather be the moon

Le duo indie-rock Papooz nous emmènent faire un tour dans les sixties avec leur nouveau single I’d rather be the moon, en anticipation de leur nouvel album None of this matters now attendu pour le 18 mars prochain. 
Dans un clip circulaire composé des illustrations en noir et blanc de Victoria Lafaurie mises en animation par Iris Vrankic, le duo est représenté naviguant sur une guitare au milieu d’une banquise fondue par le rayonnement d’un soleil embarrassé, qui « préférerait être la lune ». Le soleil ainsi que les deux musiciens se voient ensuite transformés en pilules effervescentes glissées dans un verre d’eau, avec la lune en toile de fond. Une allusion certaine au réchauffement climatique et l’évocation d’un monde où la chaleur accablante du jour serait remplacée par la lune et sa fraicheur légère, à l’instar de ce morceau très réussi.