Les clips de la semaine #117 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, la seconde partie de la sélection numéro 117 des clips de la semaine.

SÜEÜR – Faille

« Si tu n’as pas de failles, par où passe la lumière ?« 

En une petite phrase, on a la sensation que SÜEÜR résume autant son titre que sa musique. Une pulsion de vie et de mots, écrire pour laisser passer la lumière, pour combattre les pulsions sombres et la violence inhérente à nos existences.

Pour Théo, la musique est une force vitale et il le prove une nouvelle fois avec ce Faille qui a des allures de petite transformation. Une rythmique plus hip hop et enflammée, un flow plus puissant et maitrisé, le tout au service d’une noirceur toujours présente avec laquelle il se bat autant qu’il vit.

Projet total, SÜEÜR s’offre toujours la beauté de clips hyper cinématographiques réalisés par Théo lui même. On le retrouve ainsi au coeur d’une nuit sans fin dans un monde dystopique où il deale les souvenirs d’un autre à ceux qui n’en ont plus. Alors qu’une fiole s’ouvre dans sa voiture, la frontière entre la réalité et l’onirisme se fait de plus en plus floue dans un monde où tout part en couilles. Un univers profond et superbement écrit au service d’un morceau qui annonce avec grandeur le groupe d’un groupe qu’on adore.

En attendant le premier album ?

Bon Enfant – Diorama

Est ce qu’on aurait pas vécu nos deux dernières années dans un Diorama ? En tout cas, c’est ce que les québécois de Bon Enfant semblent penser, et nous avec eux.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, un Diorama est la représentation de la scène de la vie en volume derrière une façade vitrée. De cette idée, qui donne aussi son titre à leur second album, Bon Enfant tire une métaphore du monde sous COVID, de nos deux dernières années à vivre essentiellement derrière les vitres et les écrans. Loin d’être pessimiste, ils en tire un morceau de rock puissant et psychédélique, qui joue avec les frontières de la folie pour nous toucher en plein cœur.

Forcément, le groupe joue aussi avec cette représentation dans son clip, puisqu’on retrouve durant ces 5 minutes les membres de Bon Enfant, souvent séparé, isolés dans des environnements figés dont ils essaient de s’extirper pour retourner à la vie. En résulte un clip poétique, un brin claustrophobie, coloré et grandiloquent qui nous invite à revenir de manière décalée sur ces derniers mois.

Et puisqu’on parle de retour au réel, on aura le bonheur immense de retrouver Bon Enfant en concert le 7 mars à La Maroquinerie. On y sera, et on vous invite à nous y rejoindre pour ce qui s’annonce déjà comme un grand moment.

MAGENTA – Premier Incendie

MAGENTA continue de faire danser les clubs et revient cette semaine avec Premier Incendie, titre qu’ils nous avaient fait découvrir lors de leur récent concert à l’Olympia.

Une petite transformation pour le groupe, tant le titre bascule vers quelque chose de très lumineux, tout en restant dans cette vague électro-pop qu’ils affectionnent tant. Le groupe nous parle ici des petits chocs et des grands bouleversements, des premiers émois, de l’amour qui contamine et qui prend au corps et au cœur. Le rythme et les battements s’emballent à l’unisson alors que ces souvenirs uniques remontent doucement à la surface.

Comme toujours, le groupe joue aussi derrière la caméra et mettent parfaitement en lumière Peterson Ceus, jeune athlète masculin de GRS évoluant à très haut niveau. Cette discipline étant très peu pratiqué par la gente masculine, il ne peut malheureusement pas évoluer en compétition. MAGENTA lui offre donc une mise en lumière parfaite dans ce clip coloré, alternant scène de vie et de danse, nous entrainant dans un ballet parfait qui met le feu à nos sentiments.

Abel – Les vagues

On avait laissé Abel face à la mer et c’est exactement là qu’on le retrouve. Il faut dire que l’élément aqueux semble fortement l’inspirer. Car en plus de donner leurs noms à ses chansons, il est aussi celui qui représente le mieux ses idées : l’eau est un élément en mouvement permanent, dangereux par moment, mais qui finit toujours par effacer les traces laissées par son passage.

Les vagues raconte un peu tout ça, le besoin de laisser faire le temps, de continuer à avancer, de vivre malgré les blessures. Dans une écriture discrète et imagée, Abel pose sa voix sur des nappes électroniques et pansent ses blessures au sel de la mer.

La vidéo de Vittorio Bettinile met face à l’immensité du bleu, sur les bords de mer, en plein introspection, entre l’écriture et les promenades, Abel laisse couler le temps et se répare doucement.

CHEVALREX – Au crépuscule [feat. Pi Ja Ma]

La chanson Crépuscule, qui ouvrait délicatement l’album Providence publié il y a un an, se métamorphose en un duo élégant où dans un parlé-chanté, la voix organique de Pauline de Tarragone (Pi Ja Ma) répond à celle suave de Rémy Poncet. Ce crépuscule, où le jour et la nuit se confondent, incarne le moment où dans un élan nostalgique nos pensées viennent s’entremêler, s’entrechoquer, se téléscoper – « de certitudes que l’on bouscule ». Les images du clip, réalisé par Marc Cortès, nous mènent dans les illusions d’une cafétéria américaine où les pancakes servis donnent aux souvenirs des saveurs « goût sirop d’érable ». Dans ce lieu clos à la lumière tamisée, les personnages évoluent, se croisent comme des trains sans se rencontrer, conservant une distanciation sentimentale que l’on aimerait tant voir – « Moi qui rêvais d’une île » – vaciller.

Sarah Maison – Les Astres & Les Éléments

Sarah Maison met en image Les Astres & Les Éléments, paru l’an dernier sur son mini album Soleil, et nous emmène au travers de paysages méditerranéens vers un monde féérique où la poésie semble avoir trouvé son écrin. Les notes musicales qui s’échappent des lignes mélodiques ont comme un goût de paradis perdu. Les éléments – une source limpide que l’on imagine rafraîchissante, un sentier sillonnant dans le maquis, le ciel d’un bleu immaculé, la chaleur d’un journée caniculaire, un sol aride, les vestiges d’un village qui surplombe la mer– nous guident dans la quête spirituelle d’un amour égaré dans l’éther sidéral. Une cabane en pierre sèche, une porte constituée de planches brutes, un regard appliqué à la serrure comme une clef incarnent le passage entre deux mondes charpentés de matérialités et d’imaginaires. Un conte prend forme et nous propulse au milieu des astres, dans un environnement magique que l’on découvre en suivant le rythme d’une derbouka. Le chant de Sarah Maison devient céleste et aussi virevoltant que le vol d’un papillon, une mélopée qui confère une élégance incantatoire à cette quête de l’éternel.  

Emmanuel Emo – ASKIP

Emmanuel Emo nous amène une nouvelle fois parcourir sa ville du Havre où les rues et les lieux deviennent le décor – dans un climat maussade et venteux – à toutes les désillusions que l’on peut ressentir au travers des regards et des remarques de ces gens dénués d’empathie que l’on peut rencontrer. Ces faux semblants sociaux qui t’enferment alors que tu aspires à la liberté et à encore plus d’espace de créativité. Même si la ligne musicale d’Askip est dense et touffue comme ce que l’on intériorise, elle contient aussi une force de réaction salvatrice. Askip, tu as encore plein d’amis qui t’entourent, de joies à partager et de musiques à nous faire découvrir car ton univers est aussi vaste que l’horizon de la zone portuaire du Havre.           

Jok’Air – Sorry not sorry feat. Tayc

Qui dit 14 février, dit saint valentin. Et quoi de mieux pour fêter l’amour que la collaboration inédite entre deux grands loveurs du rap français, Jok’air et Tayc. Le titre Sorry Not Sorry était une sortie presque une évidence tellement ce thème colle à la peau des deux rappeurs.

La vidéo est réalisée par Bailey Koffigan. Il propose un clip à l’ambiance détendue, mais sulfureuse, qui met en scène les deux rappeurs avec leur meilleur outfit, en train de séduire des jeunes femmes. Le visuel est accompagné par un texte mélodieux qui correspond à l’identité musicale des deux rappeurs qui possèdent autant de talent pour sortir un banger que des titres mielleux.

Une connexion pleinement réussie entre Big Daddy Jok et Tayc qui ont réussi à offrir un titre sensuel et planant pour célébrer la fête des amoureux.

The Doug – Jeune The Doug

On avait déjà coisé la route de The Doug, que ce soit au chantier des Francofolies ou à travers une superbe reprise de Georges Brassens. Le voilà de retour avec un nouveau titre lumineux qui semble faire office de présentation.

Jeune The Doug c’est ce garçon un peu perdu, tiraillé entre ombre et lumière, qui ne choisis pas entre flow rappé et un petit côté crooner sur les refrains. Il nous raconte son existence, ses fantasmes, ses envies. Loin d’être désespéré, le garçon prend une certaine distance avec une vraie envie de niquer le quotidien et les galères qui lui barrent le chemin.

Visuellement, Juliet Casella le met en scène en personnage solitaire accompagné d’un bouc ( ça ne s’invente pas …) . On lui suit dans un monde entre désœuvrement et liberté, en promenade dans un monde qui semble avoir été déserté par l’espèce humaine. Dans le brouillard il se promène en BMX, filmant son quotidien qui semble tourner en boucle et qui n’efface pas les cernes sous ses yeux, avant de partir dans un grand feu d’artifices.

Un titre efficace qui annonce le début d’une nouvelle aventure qu’on suivra avec beaucoup d’intérêt.

Superpoze – Geneva

C’est le deuxième titre que nous livre Superpoze pour son grand retour.
Après le progressif Parabel, il nous offre aujourd’hui Geneva et pour l’occasion, l’artiste a choisi d’illustrer le morceau avec un clip.
Dans cette vidéo réalisée par Marc de Pierrefeu nous sommes au gré des images, l’écran est coupé en deux, d’un côté une image fixe, d’un autre une vidéo, comme si le tableau prenait vie.
Ce sont des oppositions, des reproductions, autant de capsules animées qui se font écho entre elles comme pour donner vie à une oeuvre plus grande, Geneva.
Oui, l’album arrive, oui on n’en peut plus d’attendre, alors on remet ce titre et ce clip en replay et on patiente sagement, Superpoze sera bientôt là pour de bon.

Ibeyi – Sister 2 Sister

Après l’annonce de leur retour avec Made Of Gold en featuring avec PA Salieu, les deux soeurs les plus stylées de l’hexagone sont de retour avec Sister 2 Sister, un titre qui résume parfaitement le lien qui unit nos deux artistes.
C’est dans un clip magnifique réalisé par Colin Solal Cardo que les deux soeurs se livrent à une chorégraphie magistrale comme pour éveiller les connexions, comme un appel à la sonorité, c’est puissant, c’est beau et comme toujours avec les Ibeyi, c’est incroyablement rythmé, autant dire qu’on attend l’album « Spell 31’ qui sortira le 6 Mai avec beaucoup d’impatience…

BLOWSOM – You & I

Si certains dévoilent des EPs ou des albums, BLOWSOM a une manière de voir les choses un peu différentes.

Ainsi, le parisien opte pour le format single, nous régalant à chaque sortie d’un titre accompagné d’un clip et développant à merveille un univers tendre et décalé aussi bien dans le son que dans l’image.

C’est une nouvelle fois le cas avec l’excellente You & I, titre enlevé qui semble pour le garçon faire office de thérapie, comme il le dit si bien lui même. Une anti-histoire d’amour ou le docteur Arnaud et Mister BLOWSOM coexiste au sein d’une pop song groovie et d’un amour à sens unique qui brise un peu les cœurs.

Pour accompagner ce morceau sans vraiment d’égotrip, César TRESCA met en image un casting aux accents 80’s, à la fois drôle et décalé dans lequel une connexion semble se créer mais seulement dans l’esprit de BLOWSOM. Alors que tout semble se dérouler pour le mieux du monde, laissant le groupe au plus haut de ses attentes et de sa fierté, la fin abrupte les ramène doucement sur terre et dans une réalité où le héros ne gagne pas toujours à la fin.

Drôle et touchant, BLOWSOM fait une nouvelle fois mouche pour nos yeux et nos oreilles.

Miel de Montagne feat Philippe Katerine – C’est dur

Doit-on rester soi même ou doit-on s’adapter au regard des autres ? Est ce que l’image que les autres se font de nous finit-elle par nous piéger dans une caricatures de nous même ?

Voici les questions qui affluent dans l’esprit de Miel de Montagne. Loin du côté solaire et léger de ces précédents morceaux, Milan prend un tournant bien plus sérieux et introspectif avec ce nouveau morceau dans lequel il retrouve le légendaire Philippe Katerine. Deux personnages bigger than life qui questionnent ensemble le rapport à la réalité et une sorte de schizophrénie presque imposée. Voilà bien un titre qui déjoue, pour notre plus grand plaisir, toutes les attentes qu’on aurait pu voir en lui.

C’est dur surprend donc autant qu’il enchante et permet à la musique de Miel de Montagne de gagner en profondeur et aux émotions de venir par surprisenous tirer les larmes aux coins des yeux.

Le tout s’accompagne d’un clip délirant, qui joue lui aussi se rapport à l’imate, nous entrainant à travers des tableaux, des publicités et des images télévisées dans lesquelles nos deux héros évoluent et se promènent.

Un petit choc et un vrai plaisir en attendant la sortie de son second album.

ISHA – La Réincarnation de Biggie

Dans la foulée de l’annonce de son tout premier album, le rappeur belge Isha est de retour avec le clip de La Réincarnation de Biggie. Un titre qui annonce la couleur d’un projet très attendu par le monde du rap francophone.

Isha rappelle son identité puissante à travers une vidéo au style apocalyptique. Le Belge fuit des chasseurs à travers une usine abandonnée pour protéger un enfant. Ce clip, réalisé par Romain Cieutat, démontre encore une fois le charisme de l’artiste et sa volonté de produire des vidéos très esthétiques. Sur une prod énervée, il lâche son texte avec une technique toujours aussi chirurgicale, tout en laissant un grand hommage au rappeur Biggie.

Ce titre est donc l’un des 14 morceaux du futur album Labrador bleu qui sortira le 14 avril prochain. Une chose est sûre, si l’ensemble du projet est aussi qualitatif que cet extrait, Isha confirmerait son entrée dans le panthéon des piliers du rap bruxellois.