Les clips de la semaine #113 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la première partie de la sélection numéro 113 des clips de la semaine.

Cabadzi – Six point neuf

Toujours à la page en matière de nouvelles technologies, l’entreprise BÜRRHUS a le plaisir de vous présenter cette semaine son propre metavers.

Le duo Cabadzi est donc de retour cette semaine avec Six point neuf. Duo vraiment ? On pourrait plutôt parler de trio tant Marian Landriève semble devenir un membre à part entière du projet, offrant à cette histoire de d’industrie toute puissante un rien inquiétante toute la force visuelle nécessaire à cet ambitieux projet.

Et si la saison 1 semblait un poil terne et sombre, l’échappée qui nous est proposée ici dans un monde virtuel laisse sa place à une explosion de couleurs et de délires visuels et musicaux en tout genre. On s’enfonce donc dans un monde du tout possible, loin de la grisaille d’un quotidien qui nous détruit.

Musicalement, ce nouveau morceaux, qui annonce une réédition riche de 7 titres à BÜRRHUS se place du côté lumineux de Cabadzi, une production légère, claire et dansante accompagnée de paroles poétiques qui rappelle que la vie, c’est toujours mieux avec les autres.

Visuellement, Marian Landriève s’offre une épopée sans limite, avec un travail hyper réussi sur l’imagerie 3D, nous entrainant dans un monde où l’on croise aussi bien des pirates, des dinosaures et des animaux géants.

C’est fou et réjouissant, idéal en ce moment qui cumule l’hiver et une certaine lassitude. On dit donc merci à Cabadzi et come eux « Allons vers tout ce qui nous échappe ».

Basile Palace – Palace

On avait laissé Basile Palace en 2020 avec une poignée de singles qui nous avaient pas mal charmé. Le fantasque garçon est de retour cette semaine avec un nouveau titre Palace qui rentre en tête dès la première écoute, bien aidé par un refrain absolument parfait qu’on reprend très rapidement en choeur.

Il faut dire que le bon Basile applique une formule qu’on affectionne particulièrement, ne choisissant jamais entre le chant et flow rappé, il nous embarque dans une pop moderne et tendre qui nous fait sourire et bouger la tête. C’est aigre-doux et moderne, dansant et mélancolique, bref ça fait battre nos petits coeurs avec une facilité déconcertante.

Pour accompagner le morceau, Luca Lellouche & Adrien Rozé nous offrent une vidéo aux accents intemporels, entre BMX, look 80’s, terrain de basket et bande de potes très inspiré du meilleur de la comédie américaine, parfaitement transféré en France. Un bon bol de tendresse et un univers attachant dans lequel on a fatalement envie de plonger.
Basile Palace c’est du cinq étoiles.

Johnnie Carwash – Slut Skirt

Nos chouchous de Johnnie Carwash sont de retour avec un second extrait de leur premier album Teenage ends, à paraître le 28 janvier 2022. 

Slut skirt est un clip haut en couleur réalisé par Margaux Jaudinaud, que vous avez peut-être reconnue puisqu’elle était déjà à l’origine de Forever Yours, sorti en juin 2019 sur l’EP Mom Is A Punk ! Elle est aussi l’illustratrice des clips de We Hate You Please Die et Johnny Mafia, également sur le label Howlin Banana.

Avec ce morceau, le trio lyonnais revendique plus que jamais son féminisme, sa lutte envers le patriarcat et plus spécifiquement le harcèlement de rue. Margaux Jaudinaud, croque avec beaucoup de candeur l’histoire en somme assez banale des femmes en 2022.

La nuit, une fois que les lumières sont éteintes, Johnnie se transforme en super-héroïne encagoulée et revêt sa plus belle jupe pour rejoindre son crew, le Skirt Club. Mais ce soir-là, elle se fait kidnapper par un grand reptile malveillant – qui n’est pas sans rappeler le projet Crocodiles mené par Juliette Boutant et Thomas Mathieu où via le dessin des récits ordinaires de sexisme sont mis en lumière. Heureusement, Johnnie arrive à échapper au crocodile et en profite pour libérer ses amies emprisonnées, non sans lui avoir mis une belle raclée au passage.

Finalement, il y a un contraste saisissant entre ces douces teintes de bleu et de rose, ce crayonné enfantin et la violence du propos : « When I’m alone in the street I feel your eyes on me, no matter how I’m dressed ».

Un clip fort et nécessaire, porté par les paroles revendicatives et criantes de vérité de Manon, où la guitare crie, la basse louvoie et la batterie tremble. Avec ce refrain entêtant et joyeux, à scander à tue-tête, Johnnie Carwash nous invite à rejoindre les rangs des personnes en colère, à nous montrer et surtout à ne rien lâcher. Car, comme ils le disent si bien : « Nos jupes sont courtes, pas nos idées. »

SPARKLING – Not the right place

Nouveau single pour le boys band SPARKLING et son post punk débordant d’énergie. On les retrouve justement en train de sauter partout dans leur clip qui fatigue rien qu’à les regarder s’agiter dans tous les sens. Côté musique, ça marche immédiatement, la mélodie rentre en tête pour ne plus jamais en sortir. Les 3 garçons s’interrogent sur leur place dans le monde et les choix que chacun peut faire.

Le cocktail prend sans forcer et on s’imagine assez facilement en concert chanter à s’en épuiser “This is the right place for me”. Le pont est magique et emporte le morceau dans une autre dimension de délire et d’irrésistible envie de danser jusqu’à en avoir mal aux pieds. Il s’agit là du deuxième singles du groupe issu de son nouvel EP “This Is My Life / Das Ist Mein Leben / C´est Ma Vie“ à paraître le 11 Mars prochain. Autant vous dire qu’on a hâte !

Nilüfer Yanya – midnight sun

Mais où étaient passées les ailes de Nilüfer Yanya ? Depuis le clip de Heavyweight Champion of The Year, sorti en 2018 avant son fantastique premier album Miss Universe, l’autrice-compositrice avait troqué ses ailes pour d’autres pérégrinations plus terriennes.

Après stabilise sorti il y a deux mois, elle révèle un nouvel extrait de son prochain album prévu pour mars, PAINLESS, dont le titre dévoile déjà certains des thèmes qui lui sont chers. Ailes du désir ou de la défiance, elles sont en tout cas un symbole tout trouvé pour cette balade où la fantaisie de ses grandes plumes roses nous guide dans l’immensité morne de Londres. Peut-être bien ce « soleil de minuit ».

On pourrait en dire autant de cette montée cathartique toute en fuzz – si les précédents morceaux de Nilüfer Yanya et son jeu de guitare ont toujours contenu des inflexions jazz, ce nouveau single promet plutôt un album aux sonorités post-punk et indie rock des 90s. Pas étonnant si l’on se souvient que la jeune musicienne s’est fait connaître dès 2016 avec une reprise du grand titre des Pixies, Hey. Rendez-vous le 4 mars !

French 79 – 4807

Pas encore de nouveaux morceaux pour le producteur Marseillais, mais un album qui continue à vivre. Perpétuellement obligé de reporter les dates de sa tournée suivant la sortie de son deuxième album Joshua (fin 2019), Simon Henner aka French 79 propose cette semaine la mise à l’image du morceau 4807 en collaboration avec Daniel Prince.

Tout en animation, il nous montre des espèces de blobs qui interagissent avec un monolithe. Bourré de références cinématographiques, le tout peut évoquer Star Wars ou d’autres icônes du genre, et se prête bien à l’atmosphère contemplative du morceau. Avec également un côté fun, des interprétations à trouver soi même et des paysages magnifiques, l’ambiance électronique fonctionne en tout cas toujours aussi bien sur nous.

Les Louanges (feat Corneille) – Crash 

Les Louanges a cette semaine dévoilé le percutant Crash, un deuxième album très attendu (dont on vous parlera très vite) après son excellent La nuit est une panthère.

Comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, cette sortie était précédée d’un clip délicieusement flashy réalisé par William Arcand pour la chanson éponyme qui vient clôturer le disque sur une note plutôt optimiste. Les Louanges y est accompagné par l’indétrônable Corneille et ces deux magiciens apportent une bonne et nécessaire dose d’espoir et de lumière que l’on accueille volontiers dans notre interminable hiver.

Il est ici question d’acceptation de l’adversité et de laisser le temps faire son œuvre : malgré le brouillard actuel, comme il est simplement et si justement dit dans le morceau, l’orage va bien finir par se tasser. On est pas tellement expert•e•s en météo, mais la musique québécoise semble grandement contribuer à ce phénomène.

Girlpool – Lie Love Lullaby

Le duo de Avery Tucker et Harmony Tividad délivre un second single Lie Love Lullaby qui annonce leur prochain album Forgiveness prévu pour le 29 avril. La vidéo expérimentale et futuriste est réalisée par Amalia Irons. On navigue entre ambiances complètement différentes les unes des autres : allant d’un casino vintage à une pièce blanche spatiale remplie d’écrans en passant par des scènes érotiques ainsi que par des paysages de nature.

Une chanson à prédominance chantée par Avery Tucker, raconte un moment où l’innocence du chanteur affectait son choix de relations avec des personnes toxiques. Il dit également, “In the past, it’s been painful to choose somebody that didn’t believe in me, and I think the most painful part was that I allowed myself to pick a person that didn’t recognize my entirety. I wrote this song wondering, did I recognize it myself ? If I had the wherewithal to tolerate their minimizing perspective?  (​​Dans le passé, il a été douloureux de choisir quelqu’un qui ne croyait pas en moi, et je pense que le plus douloureux est que je me sois permis de choisir une personne qui ne reconnaissait pas mon entièreté. J’ai écrit cette chanson en me demandant si je la reconnaissais moi-même ? Si j’avais les moyens de tolérer leur perspective minimisante ?)”

Keny Clay Ft Bizzy Ape – Heidi

En attendant la sortie de son projet, Keny Clay s’est lancé dans une trilogie de singles. Après Big Shaq, sorti le mois dernier, il revient une nouvelle fois accompagné par Bizzy Ape avec qui il a l’habitude de travailler pour un clip à l’esthétique vintage, voulant évoquer la série mythique Heidi. Un clip à thème qui a été dirigé par Goodfellas Music. C’est dans un décor rustique et enneigé que le visuel prend place. Les deux artistes s’y retrouvent pour cause de vacances et on fait le choix de dormir chez l’habitant. Ce dernier va les mettre au travail. Heureusement pour les deux jeunes hommes, le lieu compte deux femmes au charisme qui ne les laissera pas indifférents. En reprenant les codes d’une musique rap mélodieuse portée sur les relations amoureuses, les deux artistes livrent un visuel inspiré qui vient appuyer leurs mélodies glaciales. 

Jazzy Bazz – 1989 freestyle

Jazzy Bazz sait faire attendre son public avec la sortie surprise du titre 1989 freestyle, 4 jours avant son prochain album Memoria. Un titre qui va mettre l’eau à la bouche des fans de l’ancien membre de L’entourage, et qui nous promet la qualité de son futur projet.

Sur des vibes de 64 mesures de Spleen, le visuel du clip nous fait très facilement remonter dans le temps. On retrouve le rappeur en train de kicker dans une voiture ou encore sur les toits de Paris. Images filtrées, couleurs froides et cadrage brouillon, Jazzy Bazz excelle dans cet univers old school qui lui va tellement bien. Il rend hommage à J.Cole, en choisissant la prod qui provient du titre January 28th de l’album 2014 Forest Hills Drive.

Un choix logique qui ne peut que nous faire fantasmer d’un feat entre les deux
artistes talentueux.
Après 3 ans sans album solo, ce titre annonce la couleur pour un projet qui se veut déjà l’un des meilleurs de l’année 2022.

Thus Owls – I Forget What I Remembered

Figure de proue de la scène montréalaise, le duo Erika et Simon Angell, Thus Owls (collaborateurs de Patrick Watson, Loney Dear, Karkwa, Michael Feuerstack) signe avec I Forget What I Remembered un single aérien.
Réalisé par le photographe et vidéaste Tim Gorgeson, cet ovni visualo-musical clip se pare d’auras monochromes, roses et bleues néon, noir et blanc façon Man Ray et de jeux d’ombres et de lumières tout en transparence. Pièce maîtresse de leur cinquième opus Who Would Hold You If The Sky Betrayed Us ? à paraître le 4 mars, la balade emprunte aussi bien aux codes du jazz qu’à ceux d’une électro dreamy à souhait. Semblant un écho au poème d’Emily Dickinson :

« If recollecting were forgetting,
Then I remember not.
And if forgetting, recollecting,
How near I had forgot. »,

véritable déclaration d’amour, le texte dépeint une tentative – peut-être vaine – d’exprimer sa gratitude pour les choses de la vie, depuis l’espace serein et rêveur oscillant entre présence physique et spirituelle. Trois saxo soutiennent un morceau lancinant comme une supplique, bonbon acidulé au bord des larmes.  Un diamant brut.

Rebeka Warrior feat Marlène Saldana – La Valise

Rebeka Warrior (Kompromat, mansfield.tya…) et la danseuse et performeuse Marlène Saldana nous embarquent à Las Vegas, accompagnées de Jonathan Drillet à la réal.

Extrait de l’EP  « Showgirl, The Play (Original Soundtrack Recording) », « La valise » guide nos pas – de danse, irrépressibles – dans un oratorio techno-queer branché, cheap et chic, classe et crasse.

Pris.es dans une tourmente bling-bling, entre éclats 80’s épileptiques, fumigènes et ambiance disco DIY, on s’amuse de la trivialité des paroles  – dans lesquelles les voyageur.se.s les moins chanceux se reconnaîtront…

Un volcan en carton-pâte tout droit sorti d’un cauchemar burlesque figé sur VHS (une hallucination ?) entre en éruption, décor idéal pour un jeu d’actrices de série B qui auraient un peu forcé sur la MD : « J’ai aucune famille ! » / « T’es pas une pute au moins ? » Le beat et les textes rappelleront évidemment aux nostalgiques de la première heure Sexy Sushi.

« Ce qui s’passe à Las Vegas, reste à Las Vegas », c’est acté. En attendant, on est bien content.es que les Showgirls nous aient emmené.e.s dans leurs bagages…

Chamberlain – Riviera

On avait pu découvrir le premier album de Chamberlain, Gardens II, à la fin de l’année dernière. Piano électronica, électro pianistique, décrivez-le comme vous voulez mais au sein de sa track list de haut niveau, un titre nous avait parlé par dessus tout. Riviera, un titre simple mais d’une force envoûtante et pouvant provoquer l’imaginaire pour imaginer les raisons de sa composition.

Le musicien nordiste nous propose donc aujourd’hui un clip pour ce titre sublime en collaboration avec Michael Snow, composé exclusivement d’images de l’hôtel Riviera de Las Vegas qui est resté ouvert plus de soixante ans. Au dessus de ça, des textes qui brisent le 4ème mur pour s’adresser directement au spectateur et mieux l’hypnotiser dans ce clip contemplatif.

Comme si on nous montrait des images pour mieux nous en détourner et laisser nos pensées vagabonder librement. Une vraie réussite et une belle mise à l’image pour ce titre iconique.

Antoine Assayas – Higher Than I Can explain

Seconde collaboration entre Valentin Duciel et Antoine Assayas, « Higher Than I Can explain », produit par Antoine et Robinson Musique, nous invite à prendre part à un road-trip symboliste et inquiétant, tourné au 16 millimètres. On y suit un Antoine Assayas grimé en scout auto-stoppeur, pris entre les griffes d’un étrange croque-mort qui le précipite au cœur d’une inquiétante machination…

À bord d’un corbillard vintage, on embarque pour 4’50 minutes de virée hallucinée dans les méandres sur-colorisés. Des tréfonds d’une angoisse esthétisée à souhait, on oscille entre rêve chamanique et cauchemar cosmique… Tandis qu’une faux transperce un cactus pour déverser sa sève dans un verre, servi sur un plateau à un protagoniste au summum de l’anxiété, des créatures masquées de rouge et drapées de blanc poursuivent, implacables, leur rituel. 

« Higher Than I Can explain » est une véritable aventure sonore où se marient influences folk et groove inéluctable et où la voix pleine de langueur d’Antoine Assayas agit comme une véritable invitation au voyage. Le morceau, soutenu par une solide base électro ultra-dansante aux claviers porteurs d’espérance, se mâtine d’étonnantes flûtes traditionnelles et de sons glanés au gré des nombreux road-trips du musicien… Du Vietnam au sud de l’Inde en passant par le Nord-Ouest du Rajasthan, une organique virtuosité emporte l’auditeur aussi loin que l’alter-ego d’Antoine. De quoi patienter jusqu’à la parution de son EP « Room of Echoes », le 11 février prochain.