Les clips de la semaine #106 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la première partie de la sélection numéro 106 des clips de la semaine.

Muddy Monk – TR

Muddy Monk n’est pas le genre d’artiste à dévoilé toute ses cartes d’un coup. On le sait depuis un moment, le garçon adore nous perdre, preuve en est la sortie récente de deux morceaux , Athènes et Petit Soldat, à l’opposé total du style qui était le sien dans Ultra Tape.

Teasé depuis un bon moment déjà, Ultra Dramatic Kid fait parti des projets les plus attendu de 2022. L’annonce de l’arrivée de TR laissée donc transparaitre beaucoup d’attentes. Et comme imaginé, Muddy Monk continue de jouer avec nous sur le muystère. Un morceau court et brutal, intense et dramatique, qui nous amène à nouveau dans le côté sombre de suisse. Surtout, il y a cette voix, toujours au bord de la fêlure, habituée et puissante qui nous bouleverse avec une facilité déconcertante.

Pour accompagner ce morceau Félix de Givry nous délivre le premier extrait visuel d’une série de six clips connectés qui accompagneront Ultra Dramatic Kid. Tourné en 16 mm et en noir et blanc, on y retrouve Alma Jodorowsky & Guillaume Dietrich en couple qui sort d’une église après un mariage. Une image simple de bonheur qui ne saurait durer alors qu’apparait dans le coin droit des ombres inquiétantes qui se transforment fatalement en feu qui vient tout brûler.

Un art du teasing impressionnant qui continuera ce soir puisque les plus chanceux, dont nous faisons partis, pourront découvrir sur la scène de La Salle Pleyel cet Ultra Dramatic Kid en live.

Dirty Deep – You’re Gonna Miss Me (feat. Scott H. Biram) – 13th Floor Elevators (cover)

Here comes a blues roots on the road of your ears. (Et un très mauvais anglais pour la table de la face B, Un !)

C’est partit ! Plus vite qu’il fallut pour qu’on comprenne.

Voici une version plus distordue et agressive du titre You’re gonna miss mede 13th Floor Elevatorspar Dirty Deep, qui nous propose ici une bonne cover accompagnée de son clip DIY made in France.

Succession d’images de tournée ou de vacances, on plonge dans le quotidien du groupe ou on brule la gomme en moto le long des côtes Corses.

Ici il fait chaud, les perfectos collent, la bière est tiède, la meule n’a plus d’essence, on pète une corde, le soleil boude l’horizon et les clopes partent en carotte.

Ça y est l’album A wheel in the grave débarque, et retrace 10 piges. Ce clip en est une parfaite mise en bouche. Et le son de l’harmonica résonnera encore direction nos oreilles de jouvenceaux. Le tout sans escale.

Tiste Cool – Big Bisous Bien Baveux

Cette semaine, Tiste Cool a sorti le troisième extrait de son EP à venir (L’étude du cool en Février prochain).
Après l’excellent L’amour en pyjama, voici Big Bisous Bien Baveux et son clip autoproduit sous la forme d’un vlog de vacances à Seth. L’habitué du kitsch nous propose ici des images sublimes pour la plupart très travaillées, en termes de cadrages et de lumières. Bien que filmées à la manière de courtes vidéos de réseaux sociaux, à la main, le clip, pourrait avoir été tourné au vieux caméscope, mais presque entièrement en format carré, qui n’est pas sans rappeler le format Instagram.

C’est une suite de plans courts, remplis de douceur et de mélancolie, puisqu’en effet, les vacances ne se passent pas très bien pour Tiste Cool, qui déteste porter des shorts mais qui est surtout bouleversé par le manque de l’être aimé. Les vacances prennent alors des allures d’exil, « pourquoi t’es parti.e ? ».
Il se retrouve seul, sans savoir, sans pouvoir profiter de ce moment, la solitude émane de chaque plan, chaque cadrage, chaque moment capté par la caméra.
L’image saccade, dédouble, est salie par cet amoureux de l’analogique, donnant un coté onirique et vintage au clip.

Niveau musique, un piano, une boite à rythme discrète et un synthétiseur au ton grave. C’est sur cette instrumentation dépouillée que l’on assiste à un récit doux- amer captivant, un spleen sous le soleil qui va chercher la larme grâce à un texte fort écrit au premier degré, sans détour, directement avec le cœur. Tiste Cool est encore une fois touchant de sincérité, il dévêt cependant son déguisement d’insouciance sur ce morceau au piano mineur.

Lord Gasmique – Anno Domini

Cela fait un moment que Lord Gasmique a le statut de petit prince de Bruxelles, malheureusement pour lui la concurrence se fait rude avec les récentes pépites sortant de la capitale belge. Ce qui ne semble pas faire peur au Lord qui est revenu cette semaine avec un clip signé Borderline Film qui semble annoncer un retour en force du rappeur à la voix singulière.

Oppressant, le visuel fait corps avec la voix caverneuse de l’artiste et la noirceur de l’instrumentale de Phasm. Comme habité par une force présente au plus profond de lui, il fait le point avec une maîtrise technique et un flegme qui ne l’ont pas quittés.Progressif, le morceau devient de plus en plus oppressant plus les secondes avancent, comme si quelque chose allait arriver. Mais quoi ? Cela, seul lui le sait. En espérant que l’affaire soit à suivre…

DC Gore – California 

Ne vous fiez pas aux apparences, malgré le titre de son premier single, California, et sa chemise de cow-boy à franges, DC Gore est British. Le musicien londonien, qui site Martin Parr, JG Ballard où encore Jarvis Cocker comme référence, joue sur le décalage et nous transporte à Venice Beach via l’estuaire industriel de la Tamise dans une vidéo réalisée par David J East (Foals…).

Il est question de speedo moite et de bord de mer dans ce morceau trippy de près de 6 minutes mélangeant instrumentation analogue et synth pop electro. Un premier morceau séduisant d’un artiste singulier dont nous avons hâte d’en découvrir plus ! 

Roseboy666 Ft Simili Gum – Voeu

Si la connexion avec Babysolo33 vous a plu, Roseboy666 remets le couvert avec Simili Gum dans un voyage toujours aussi hypnotique dans Voeu et son visuel réalisé par Roxanne Gaucherand.Les mélodies du chanteur viennent se coupler à merveille aux lignes de synthé du producteur donnant comme souvent avec ce dernier une vraie ballade onirique.

Que vous fermiez les yeux ou que vous vous laissiez absorber par le clip, le refrain plus qu’efficace de Simili Gum vous transportera au confluent de la légèreté des rêves et de sa mélancolie. Loin de la frénésie quotidienne, les deux artistes se retrouvent dans un univers néo-végétal pour souffler et exprimer ce qu’ils gardent enfuis.

Bonnie Li – All About You

L’envoûtante Bonnie Li revient cette semaine avec All about you, premier extrait de son nouvel album à venir Le Bleu du Rouge.

On connaissait de la chanteuse un univers plutôt sombre avec des clips souvent en noir et blanc. Dans All about you, l’esthétisme est toujours autant travaillée mais les couleurs d’une belle journée ensoleillée au printemps viennent nous surprendre pour notre plus grand plaisir.

On suit la chanteuse et deux compères à travers un roadmovie amoureux sur les petites routes de campagne, le tout dans un décor vintage. De la vieille voiture dans laquelle ils roulent aux vêtements et maquillage des personnages, l’ensemble est très visuel et agréable.

La musique électro pop et la voix suave de Bonnie Li, nous plonge dans une atmosphère captivante qui se mêle parfaitement aux images, nous tenant en haleine sur 3min30.
Un nouveau titre qui présage que du bon pour patienter jusqu’à la sortie de son deuxième album.

Aaron C – Drip

La mélodie étant devenue un élément central du rap moderne, tout un chacun se doit de se l’approprier pour l’utiliser de la meilleure façon possible. Chose qui a été assez réussie par Aaron C dans son dernier titre, Drip. A elles seules, les mélodies annoncent l’univers du morceau qui a été retranscrit à l’image par COMM.

Plongé dans un club aux néons fluorescents, l’ambiance est tamisée, laissant l’artiste se complaire entre les stripteaseuses. Le montage a été réglé pour coller à l’ambiance hypnotiques et envoûtantes de ces mélodies en hésitant pas à aller du côté du psychédélique, ce qui se couple parfaitement avec les lumières bleutées majoritairement présentes dans le visuel.

La seconde partie du clip le voit rejoindre sa bande et évoluer toujours dans une ambiance nocturne mais cette fois en extérieur. Une manière de montrer que la nuit peut aussi bien se faire seul qu’accompagner. 

Julia Daigle – Nanette

Julia Daigle est la moitié du trio devenu duo québécois Paupière que l’on adore à la Face B. De l’autre côté de l’atlantique, l’artiste montréalaise a sorti, début novembre, son premier album solo Un Singe Sur l’Epaule. C’est de cet album dont est extrait Nanette. De cette chanson perle la moiteur que l’on ressent lors de ces chaudes nuits d’été où la température se refuse à baisser. Se mêlant aux lignes musicales jazzy et subtilement psychédéliques, la voix de Julia, au timbre traînant et par moment fragile, se fait langoureuse. Il existe dans cette chanson un sentiment de nostalgie, celui que l’on éprouve lorsque l’on est loin des lieux et des personnes qui nous sont importants, lorsque l’on est perdu dans la solitude d’une grande ville.

La vidéo réalisée par Dominic Vanchesteing semble prendre le contre-pied de l’atmosphère ressentie. Elle illustre peut-être cet ailleurs évoqué dans le dernier couplet « je rêvais d’être ailleurs » ou, encore, une dimension plus intérieure de nos sentiments. La nuit devient aube, les rues de la métropole se transforment en forêt. Julia prend la pose de la jeune femme de la carte de l’Etoile du tarot de Marseille – symbole d’espérance de liberté – l’Arcane 17 chère à André Breton dont le récit fut composé lors d’un séjour en Gaspésie. Et alors le parfum qu’exhale Nanette s’enveloppe d’une douceur poétique relevée d’un soupçon d’ésotérisme. 

Peter Doherty & Frédéric Lo – The Fantasy Life Of Poetry & Crime

Si vous ne le saviez pas encore, le bon air normand fait du bien à tout le monde, même à Peter Doherty.

De l’anglais, on attend souvent le meilleur comme le pire, poète torturé par excellence qui aura marqué ses vingt dernières années autant pour ses frasques que pour ses talents indéniables de poète et de musicien.

Son retour était donc attendu et clairement, il ne déçoit pas. Apaisé, doux , très cinématographique et français dans ses arrangements de cordes The Fantasy Life Of Poetry & Crime , marque une nouvelle aventure en duo pour Doherty puisqu’il partage désormais l’affiche avec Frédéric Lo.

Et autant le dire, retrouver cette voix si caractéristique fait un bien fou, autant que son sens du mot et des ambiances qui nous entrainent tout de suite avec elle pour ne plus nous quitter.

L’influence normande se retrouve autant dans le morceau que dans le clip qui l’accompagne. Réalisé par Thierry Villeneuve, alternant noir et blanc et petites touches de couleurs, c’est une vidéo « à la maison » qui nous accompagne dans les pas de Doherty.

La plus grande nouvelle dans tout celà, c’est que l’artiste semble aller bien et au fond, c’est sans doute tout ce qui compte.

Juliette Armanet – Qu’importe

Nouvel album Brûler le feu et nouveau single pour Juliette Armanet : Qu’importe. La Lilloise, qu’on a attendu patiemment ces dernières années, nous a finalement livré un album incandescent résumé magnifiquement par ce clip. Enflammons-nous, la dame écrit sans doute les plus belles chansons d’amour depuis Michel Berger, ça vous situe la performance.

Tout en restant dans son compromis entre sobriété majestueuse et pop groovy, elle évolue subtilement dans la production de ses titres, avec plus de synthétiseurs et des arrangements qui s’affinent avec le temps. Côté image, assez peu de choses à signaler au final, à part ces magnifiques plans au sein d’anneaux réfléchissants et devant un doux foyer qui suffit à réchauffer nos cœurs en ce début d’hiver.

After Geography – Mr Rain

Il y a des duos qui se séparent, puis qui se retrouvent tellement l’évidence est forte. After Geography, c’est un duo pop, perdu entre la brit 70’s et 90’s. Ils sortent aujourd’hui leur tout premier titre Mr Rain, un portrait cocasse de la dépression et de l’isolement.

Protégés sous leurs parapluies, Julien et Nicolas entonnent une mélodie ultra pop, teintées de guitares glam et de refrains entêtants. Entre le Beatles et Primal Scream, on est dans le pure produit de ce que l’Angleterre a pu faire de mieux, sauf qu’ils sont français. Un titre aussi léger que son sujet est lourd, on adore ce contraste décomplexé qui permet de relativiser.

ELLIOTT ARMEN – BERENIKA

Prenons le temps de respirer et de laisser la douceur nous envahir. Alors qu’il avait déjà charmé son monde avec le très beau titre Illusions, Elliott Armen, 21 ans tout juste, nous refait le coup de la chanson crève cœur avec la superbe et subtile Berenika.

Berenika est au cœur de la chanson, c’est à elle qu’elle s’adresse, une douce comptine pour amener le sommeil. Tout en tendresse, l’artiste nous offre cette chanson aux teintes folk dans laquelle il nous raconte le monde dehors, le soleil qui décline et les arbres qui prennent soudainement vie. Un monde qui s’apaise mais qui reviendra , un cycle sans fin de jours étant souvent la pour nous accueillir. Un morceau épuré, bouleversant qui se tient autant par la simplicité qu’il amène que par la sincérité qui s’en dégage.

Pour l’accompagner, Nathan Dombrowski nous offre un clip sublime, au plus près d’une jeune femme mystérieuse et isolée qui vit au milieu de ces paysages sans temps. Une existence solitaire et dure, qui semble trouver une fin tragique alors que, une fois la nuit venue, elle s’enfonce inexorablement dans la mer.

Le premier album de Elliott Armen est attendu pour le début de l’année 2022.

Two Faces – Unspeakable Things 

Frères d’âme et de son, le duo lyonnais Two Faces débarque cette semaine avec Unspeakable Things, un titre puissant infusé d’influences rock anglo-saxon. Poignant et conteur des prémices de leur histoire en tant qu’amis et musiciens, ce nouveau morceau est accompagné d’un sublime clip saisissant tourné en plein cœur de l’île d’Oléron sous la direction de Joris Fleurot (Spline Studio).

Il y est question de fuite, de fraternité, de libération et du lien entre ces trois éléments : dans notre époque où tout est constamment chamboulé, comment s’affranchir du grand méchant loup des angoisses? Pour Two Faces, cela passe par le pouvoir de la musique et par la connexion forte qui nous relie les un.e.s aux autres. Ce nouveau titre prometteur est également annonciateur d’un disque que l’on accueillera à bras ouverts à l’automne 2022.