La scène B #1 : Caen vu par Simon (Beach Youth)

Parce que contrairement à ce que beaucoup pensent, la musique en France ne se vit pas qu’à Paris. La Face B a décidé de mettre en avant les scènes et artistes de certaines villes avec La Scène B. La Scène B c’est la scène française vue de l’intérieur à travers le regard d’un artiste sur sa ville. Pour ce premier épisode, on donne la parole à Simon de Beach Youth, qui nous parle des artistes à découvrir dans sa ville, Caen.

(c) Collection G. Pigache

« Quand est-ce que le monde va réaliser que les groupes actuels de Caen sont tous plus incroyables les uns que les autres ? »

Qu’est-ce que c’est qu’une scène ? Plus qu’un son ou une esthétique, je considère qu’une scène est un conglomérat plus ou moins organisé et structuré de projets musicaux et d’acteur.trice.s extérieur.e.s. A mon sens, cette concentration de personnes constitue un écosystème du fait des nombreux liens qui en unissent les membres. Ils partagent un état d’esprit, un mode de fonctionnement, une histoire commune, certain.e.s musicien.nes.s, et quelques verres à l’occasion. Évidemment dans une ville comme Caen, plusieurs scènes cohabitent. Choisir étant renoncer, ma sélection se veut délibérément personnelle et non exhaustive.

Le plus prolifique : Glass – Promises

Glass emprunte des chemins différents à chacune de ses nombreuses sorties, tout en gardant le fil conducteur d’une musique électronique instrumentale et élégante. Leurs textures et atmosphères sont toujours incroyablement riches et soignées. Leur visage qui m’a le plus touché est celui de leur EP anyday, le plus lumineux et léger à ce jour.

Le plus intense : Veik – Maïdan

C’est le groupe caennais auquel le noir et blanc va le mieux. Leur musique laisse une grande place à l’expérimentation sonore malgré la contrainte d’un rythme motorique omniprésent. Naviguant entre tension et relâchement, leur son m’a toujours semblé irrésistiblement immersif. Les amateurs d’expression pure et sans concession seront ravis.

Le plus doux : Adrien Legrand – Si loin déjà

Adrien c’est le romantique naïf de la bande. En tout cas, c’est comme ça qu’est sa musique. Les tempos sont lents, les mélodies légères et les paroles joliment rêveuses. Joie et mélancolie papillonnent allègrement. Si vous ne voulez pas sentir votre cœur se serrer doucement, passez votre chemin !
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Le plus poétique : Grand Parc – Sur les toits

Grand Parc ont mis de côté la rugosité et le piquant de leurs débuts dans leur dernier EP en français PULL NOIR. Et c’est tout à leur honneur, leur prise de risque est bluffante. Difficile de dire d’où vient l’alchimie de leurs morceaux mais leurs mélodies sur le fil et leurs envolées mémorables n’y sont pas pour rien. Sans oublier une pointe de magie ! Et puis, je serai toujours fasciné par le nombre de notes qu’ils arrivent à placer dans une mélodie de voix.

Le plus explorateur : Samba De La Muerte – Enough Is Enough

La musique de Samba De La Muerte a cela de particulier qu’elle semble avoir pour objectif premier de donner du plaisir à ceux qui l’écoutent. Et ce n’est pas si courant finalement. A la fois hétéroclite et inclusive, elle invite à la danse et transmet une énergie toujours aussi communicative. Ajoutons à cela, qu’Adrien se trame la réputation justifiée d’être un vrai bourreau de travail. Respect !

Le plus discret : Gomina – Stupid
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Les Caennais ne se consoleront jamais de voir ce super groupe si peu actif. Leur catalogue regorge de classiques imparables. En atteste Stupid, leur tube incontestable et incontesté. De vrais ovnis qui auront le droit à un culte d’ici une vingtaine d’années, j’en suis persuadé.
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Le plus jeune : Dune Basement – Une Odeur De Poivre

Les benjamins de ma scène caennaise sont Dune Basement, un groupe qui a eu deux vies : indie-pop en anglais puis synth-pop en français. A force de se chercher ensemble, ils ont fini par se trouver chacun de leur côté (sous les noms de Médaille et Imnot Kurt entre autres). J’espère sincèrement que les morceaux qu’ils ont pu me faire écouter sur leurs ordinateurs respectifs en sortiront un jour, et que le monde pourra profiter du talent de ces « quatre garçons dans la poussière ».

Le plus tortueux : Makeshift – Good Morning Dogs
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C’est une drôle de recherche que mène ce groupe aux mélodies complexes mais attachantes. Ces gars là n’ont clairement pas choisi la voie de la facilité. Pour autant, leurs chansons regorgent de moments de grâce où leur pop en arabesque touche un sublime teinté de fragilité qui me captive.
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Le plus envoûtant : Portier Dean- Pythia

Pour moi, la musique de Portier Dean c’est avant tout un ton, une voix grave qui narre un récit. Leurs morceaux invitent au voyage, à une traversée qui est aussi évidemment intérieure. Il y a de la grâce dans leur mélodies, cette « ancient majesty » qu’ils arborent modestement. Comme si tout ça ne suffisait pas,ces faux timides respirent en plus la gentillesse !
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Les indispensables :

Méritent aussi d’être nommés certains acteur.trice.s sans qui la vie de cette scène serait bien moins active. Je pense notamment à une association comme La Liaison de Flavie Mazier, qui organise des concerts, des artistes visuels comme Adrien Melchior ou Inaniel Swims, des réalisateurs comme Nicolas Brusq, Hugo Lamyou, Adrien Leprêtre, des collectifs et des micro-labels comme Onto Records, WeWant2Wigoler, Collectif Toujours, TFT, des radios comme Phénix ou 666, des salles comme la MDE, le Portobello, Le Cargö ou LeBBC, une institution comme l’Agence Musicale Régionale… On peut au passage pleurer la disparition d’un magazine comme L’Oiseau ou d’une salle comme Le Bocal ; Rest in Power !