La Lettre #2 : Silly Boy Blue

Quelque-part à Paris
Le 25/09/2019

Salut Ana, comment tu vas ? Je pense qu’il est toujours important de prendre des nouvelles des gens, cette tournure de phrase apparaît souvent comme de la politesse élémentaire mais pour moi, elle requiert une réponse sincère. Enfin je suppose que tout va bien pour toi, l’année a été plutôt cool te concernant et je suis certain que l’avenir le sera aussi. Quand j’ai pensé à écrire ce type de lettre, j’ai tout de suite pensé à toi. J’ai pensé à la première personne à qui j’avais envie d’écrire et celle qui m’a le plus apporté cette année. Et puis la pudeur à pris le pas, la mise à nu n’est jamais évidente et encore moins quand on connait la personne IRL comme disent les jeunes (pour ceux qui ont plus de trente ans comme moi IRL = In Real Life = dans la vraie vie). Alors j’ai testé la formule avec quelqu’un d’autre et quand j’ai réalisé que l’idée pouvait être à la fois aussi sincère que pertinente, je me suis lancé.

S’il fallait résumer ce que me procure ta musique, je dirais que tu m’émeus. Parfois on me demande pourquoi je retourne voir des artistes de nombreuses fois, la réponse est assez simple. J’ai dû te voir 10 fois cette année et à chaque fois l’émotion est là, brutale, celle qui fait vaciller, qui fait qu’on n’a pas toujours les mots pour la décrire et qu’on finit par lâcher un débile « putain c’était bien ». Parce que le cœur et la tête sont en état de choc, parce que les sentiments sont là, qu’ils nous ont percutés comme un train à pleine vitesse et que la boule qu’on a au bord de la gorge ou la force qui nous étreint le cœur empêche tout analyse concrète et immédiate. Ce qui marque lorsqu’on te voit en live, c’est la force de ta fragilité. Les deux choses semblent ne pas pouvoir coexister et elles sont pourtant inextricables chez toi. La force et la fragilité qui s’associent, c’est un moment de beauté suspendu, un instant de poésie totale où les uns et les autres se retrouvent tous réunis autour de qu’il y a de plus important. Ta musique est infiniment personnelle mais sa plus grande réussite, c’est qu’elle parle à tout le monde. En utilisant principalement la seconde personne, tu te fais guide des émotions de chacun. Je parle pour moi, mais au fond je sais que je parle pour les autres, quand j’écoute ta musique seul chez moi, je me retrouve souvent face à moi-même et ces histoires, tes histoires, deviennent les miennes.

Je suis troublé de penser à toutes ces fois où j’aurais aimé que quelqu’un vienne me dire ce que tu dis dans The Fight, ces moments où je me suis senti seul et démuni dans mon adolescence et je pense à ces gens qui utiliseront tes mots pour se soigner, et c’est la qu’apparaît le miracle de la musique dans ce qu’il a de plus pur : aider, se faire vecteur d’émotions que l’on n’arrive pas à exprimer, comme tu le fais dans You’re Cool. Chaque chanson de But You Will devient ainsi une pastille, une couleur, un jardin dans lequel on peut se promener pour trouver des réponses autant pour soi que pour les autres. Te connaissant un peu, j’imagine bien que les éloges te gênent plus qu’autre chose mais pourtant, ta musique est un petit miracle permanent sur lequel je prends toujours plus de plaisir à me pencher. L’avenir est lumineux, même si ta musique est parfois sombre, et je voudrais te remercier pour ce que tu m’apportes à moi autant que pour ce que tu offres aux autres.

Charles