KGLW deviennent papillons de lumière

Après avoir exploré la gamme pentatonique et les contrées du Moyen Orient avec les albums duo K.G et L.W, le groupe le plus prolifique du monde King Gizard and the Lizard Wizard décide de nous emmener encore en voyage. Celui d’un éden futuriste qui marquera une rupture brutale avec leurs précédentes créations. Le 18ème album du groupe (oui oui.) Butterfly 3000 ne nous laisse pas véritablement le temps de faire monter l’excitation et de digérer leurs précédentes productions. Cependant, la grande force de KGLW à se réinventer permet tout de même d’apprécier chaque œuvre à sa juste valeur. Plongée dans une synth pop féérique composée telle un œuvre futuriste afin de célébrer un retour à la vie.

KGLW Butterfly 3000

Afin de représenter un nouveau mood plus psychédélique, la pochette de l’album s’illustre d’un autostéréogramme en vision croisée créé par Jason Galea. Les papillons se démultiplient en une tapisserie colorée. Projet aussi visuel que musical, chaque morceau est accompagné d’un clip lumineux mettant parfois en scène le groupe, parfois de l’animation.

Les morceaux sont composés à partir de boucles d’arpèges sur synthétiseurs modulaires, et fournissent une pop planante et très playful qui donne à l’album une forme assez légère. Un sentiment de paix profond traverse Butterfly 3000 qui papillonne avec allégresse.

KGLW

Cette allégorie du papillon du futur découle sans nul doute par l’aspect très « voltigeur » des morceaux. Une voix saccadée qui se balade sur des mélodies de synthés épurées d’où surgit un véritable effet aérien, Yours est le parfait préambule à cet album. Associé à des paroles magnifiquement niaises, c’est un petit bonbon acidulé couleur fluo. Cet esprit candide se retrouvera notamment sur Dreams, un des morceaux les plus cinématographique grâce au talent avec lequel ils racontent leur histoire. Une batterie plus présente et accrocheuse, des paroles énoncées en boucle et son pont qui apporte un peu de tension, KGLW dépeint un rêve absolument enchanteur qui pourrait à tout moment basculer en cauchemar… On se sent peu à peu partir dans les abimes du sommeil profond… Afin de se plonger en une parfaite transition dans le plus inquiétant Blue Morpho. Plus qu’une histoire, une expérience.

Décidément inspirés par les mélodies orientales, KGLW plonge cette fois-ci dans les vibes asiatiques notamment avec le très accrocheur Shanghai. Renouant avec les voix de tête des chanteuses traditionnelles chinoises, le morceau s’amuse et surprend, dépeignant ainsi une métropole à l’antithèse du cyberpunk oppressant.

KGLW

Qu’on ne se méprenne pas, les KGLW n’ont absolument pas laissé tomber le rock pour les synthés vaporeux. Comme on ne se refait pas, Interior People offre une belle influence pop rock américaine des années 8O, et au passage une revisite de leur morceau d’intro Yours. Avec son chant toujours aussi saccadé, cette fois-ci ils poussent la voix, osant des petites montées pop et des crescendo de batterie. De quoi rebooster après trop de psyché sur les rêves. On parle un peu drogues à défaut de sexe avec Catching Smoke. On retrouve les tempos en contre temps si bien assurés du groupe, un refrain bien dansant et rythmé, le tout sur des arpèges psychédéliques. Le morceau se plait à jouer le trip seventies, et comme d’habitude ne se rate pas.

Leur pointe de cynisme et d’absurde ne les a pas non plus quitté malgré un album qui se voulait rayonnant. Notamment sur 2.02 Killer Year et sa montée des eaux qui devient le nouveau jeu pour surfeur. Faussement niais on vous disait.

Enchanteur, Butterfly 3000 est un album assez décisif pour KGLW qui permet (une nouvelle fois) de les placer en tant qu’ovnis créatifs capables de s’approprier n’importe quel style musical. Bien que les boucles de synthés peuvent paraitre redondantes à un moment et que l’album possède peu de montées en puissance afin de nous bousculer dans le trip, c’est une parfaite maitrise du story telling qu’ils démontrent à cette occasion. Véritable conte psychédélique dont s’enchaine tous les éléments, il manquerait seulement une pointe de rebondissements. Mais après tout, un jardin d’Eden est un havre de paix, et ses résidents futuristes semblent être suffisamment stoned pour apprécier le trip.