Go Girls: « les prises de conscience et de parole peuvent changer les choses. »

Lucie et Chloé évoluent depuis longtemps dans le milieu de la musique. En tant que femmes, elles ont subit le sexisme. En tant qu’artiste ou attachée de presse, elles ont du faire face à une industrie qui embrassait bien trop souvent des comportements inacceptables et les réduisait à leur sexe et/ou genre. Aujourd’hui, elles décident de donner la parole à ces femmes du milieu de la culture afin qu’elles témoignent de leur réalité. Un compte Instagram est né: Go Girls. Des photos de chaque femme est présenté ainsi que leurs témoignages qui illustrent une bien triste réalité. Ils sont cependant porteur d’un véritable espoir pour le monde culturel. Une occasion de rencontrer des artistes, doctorantes, chercheuses, journalistes, photographes, attachées de presses, militantes aux parcours passionnants et qui cherchent à faire bouger les lignes. Nous avons pu nous aussi donner la parole à Lucie afin qu’elle nous présente le projet Go Girls, les raisons qui l’ont poussé à sa création ainsi que sa vocation.

LFB : Hello Lucie ! Peux tu te présenter en quelques mots ? 

Lucie: J’ai 34 ans. J’ai baigné dès mon plus jeune âge dans un milieu où l’art, au sens large, tenait beaucoup de place. Je suis attachée de presse indépendante et j’ai créé ma structure de promotion d’artistes See You In L.A. en 2016. Je suis aussi photographe depuis plusieurs années. 

LFB : Tu as fondé tout récemment le compte Instagram Go Girls avec Chloé de We Hate You Please Die. Quel est le but de ce projet ? 

Lucie: Il s’agit de mettre en avant les femmes qui travaillent dans le milieu de la culture en faisant un portrait d’elles et en recueillant leur témoignage. (Une courte description de leur activité, les obstacles qu’elles rencontrent en tant que femme dans ce milieu et quels sont les facteurs qui les aident à les franchir. Le but est de dénoncer le sexisme mais aussi et surtout Go Girls encourage et crée un maillage de solidarité.

LFB : Pourquoi lancer un tel projet maintenant? Quel fut le déclencheur ?

Lucie: Ça fait un moment que je pense à faire une série de photos de femmes et des traumatismes qu’elles peuvent traverser au quotidien, la violence physique et morale, le viol, la maladie etc. Depuis Metoo, les femmes ont libéré la parole. Agressions et violences sont dénoncées plus facilement. Il y a aussi de nombreuses initiatives inspirantes : Bandshe, Musicienne&Co, Changededisque, Majeur.e.s, Music too, etc. Je me sens de plus en plus concernée par le féminisme. C’est ainsi que l’idée de Go Girls m’est venue. C’est un mouvement solidaire qui permet aux femmes de pouvoir s’exprimer librement. Chacune peut connaître l’expérience de l’autre. 

LFB : Comment avez-vous choisi le nom du projet ? Que vouliez-vous exprimer ?

Lucie: Go Girls est un nom percutant, il donne un élan, une impulsion. C’est une expression forte et encourageante.

LFB : Chaque portrait s’illustre d’une photo en polaroid et d’une présentation. Comment se déroule la création de ces portraits ?

Lucie: Chaque création de portrait se passe différemment. Il n’y a pas de lieu prédéfini. Ce que j’apprécie particulièrement c’est ce temps d’échange avec la personne. C’est très enrichissant. J’ai justement choisi ce format pour sa spontanéité. Après cette rencontre, elle m’envoie son témoignage par mail. 

LFB : Comment sélectionnez vous les femmes qui témoignent ? (Ce sont des amies ? Des personnes que vous admirez ? Dont vous suivez le travail militant ?)

Lucie: Il y a des amies, des rencontres inattendues. Ce qui m’intéresse c’est l’hétérogénéité. 

LFB : Quelle est ton opinion personnelle concernant l’industrie musicale actuellement ?

Lucie: Selon le Centre national de la musique en 2019, parmi les artistes programmés sur 100 festivals, 14 % étaient des femmes. Aujourd’hui, concernant l’égalité H/F, on sent qu’il y a une évolution, ça donne de l’espoir : avec par exemple, le festival Les Femmes S’en Mêlent, ou encore le festival espagnol Primavera qui fait une mixité absolue dans sa programmation. Bien sûr, on a encore beaucoup de chemin à faire, avec seulement 10% de représentation féminine dans la musique… et je ne parle pas de la visibilité de LGBTQI+ mais les initiatives se multiplient et ça fait du bien de voir que les choses bougent. 

LFB : Quel est pour toi le problème fondamental à régler avant toute chose ?

Lucie: Je ne sais pas si c’est le problème à régler avant tout mais les gens qui parlent de faux témoignages, ça me met hors de moi. Quand on sait la souffrance que c’est et le courage que ça demande de raconter son histoire, de témoigner, d’aller voir la police et d’être confrontée à des personnes qui ne sont pas toujours à l’écoute. Comment peut-on s’imaginer que des personnes fassent de faux témoignages ? Alors oui ça arrive, mais le nombre est tellement infime que ce n’est même pas un sujet surtout par rapport au nombre de victimes qui n’osent pas encore parler.

LFB : J’aime le fait que vous donniez des pistes pour faire changer les choses à la fin de chaque portrait. Comment pouvons nous agir en tant que public ou en tant que personne travaillant dans le milieu artistique ? 

Lucie: Comme tu dis, le fait de donner des pistes peut aussi permettre à la future génération de pouvoir s’identifier. Et de se dire « moi aussi je peux le faire ». Je pense que c’est l’ensemble des prises de conscience et de parole qui peuvent changer les choses.

LFB : Quelle est la suite pour le projet ? 

Lucie: On va faire des stickers pour en coller partout. On pense aussi à l’organisation d’un événement avec une expo photo, des tables rondes, des concerts, etc.

LFB : Merci beaucoup Lucie !

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