Format court #54 : Matthias Zimmermann, India Jordan, Murmur

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, on prend un virage électronique et on vous parle des dernières sorties de Matthias Zimmermann, India Jordan et Murmur.

Matthias Zimmermann – Kontakt

Le producteur et DJ berlinois Matthias Zimmerman est de retour avec un EP de 4 titres qu’il a bien ficelés pour nous emmener dans des contrées ou seuls les claviers, les samples et les synthétiseurs font preuve de foi.

Kontakt c’est l’intro parfaite pour voyager hors de la sphère terrestre, les touches de synthé viennent paver nos pas dans ce voyage spatial. Très cinématographique, ce morceau a bien évidemment au droit à son clip. Une vidéo qui nous fait voyager dans un vaisseau qui file à toute allure à travers les étoiles pour se poser sur une planète enneigée et établir peut être un premier contact avec une vie extra terrestre ? Rien n’est si sûr.
Tout est possible et c’est ce mystère qui rend le morceau diablement addictif. Entre nous quoi de mieux que la synthwave ?

FX 3000 a cette dynamique hyper joyeuse qui met tout de suite de bonne humeur, à peine le morceau commencé, on en veut tout de suite plus.
C’est ce côté funk qui nous arrache à l’épopée vécue juste avant sur Kontakt pour nous emmener dans une ballade qui fleure bon la découverte et la gaité.

Que dire de Portal et de ces touches presque exotiques, on retrouve un morceau plus house qui résonne bien fort dans notre corps et notre esprit pour en fin nous emmener vers l’issue du voyage et le morceau Incomplete.
Matthias Zimmerman ne connait définitivement pas les frontières, non sa musique est avant tout une expérience et il nous guide autant qu’il nous désarçonne avec cet EP qui vient aussi titiller nos sens et notre orientation.
Incomplete est ce petit bijou à la mélancolie joyeuse, en portugais on parlerait de saudade.
Alors voilà, on découvre une saudade synthétique qui apaise et laisse définitivement notre conscience s’évader dans un équilibre sonore si parfait.

En bref cet EP est une réelle invitation au lâcher prise, un aller tout simple vers des paysages sonores subtils, entre groove et contemplation.
C’est un mélange et une expérimentation qui nous saisit et qui nous fait difficilement redescendre sur Terre.
Ça tombe bien, on comptait justement rester tout là haut dans les étoiles !

India Jordan – Watch Out!

Watch Out! Tout juste signé.e chez Ninja Tune c’est avec ce titre très explicite qu’India Jordan nous offre un nouvel EP et ses 5 morceaux survitaminés.
« Watch Out!’ C’est ce que je crie aux gens quand je fais du vélo dans les rues animées de Londres », voilà les mots de l’artiste.
Alors autant dire que c’est un disque à écouter avec un casque de vélo bien vissé sur la tête, un jeu de pédalier dynamique et la volonté de tout donner pour parcourir la ville à toute allure au rythme endiablé des kicks.
On peut aussi apprécier ça dans son canapé, mais croyez nous sur parole, il est difficile de rester assis ou couché lorsqu’on entend de telles sonorités.

Alors oui on vous fait un grand teaser déjà bien dithyrambique mais pour cause, Iel avait déjà emballé le monde de la musique électronique avec son génial premier EP For You. C’est donc sans surprise qu’on découvre aujourd’hui un disque entrainant et parfait pour se laisser aller à quelques pas de danses hasardeux mais pourtant bien assurés.

Cet EP est inspiré du mouvement, que ce soit dans le voyage occasionnel, les trajets quotidiens ou encore dans une vison plus abstraite du mouvement.
En effet si les ébauches des titres de cet EP ont initialement été crées en transit, c’est pendant la période de confinement et donc de restriction physique du mouvement que les morceaux ont réellement pris forme.

Le mouvement c’est avant tout une énergie et une sensation plus qu’un acte physique à proprement parler.

On retrouve dans ce disque les bruits ambiants de la ville et de la circulation comme sur You Can’t expect the Cars to Stop If you Haven’t Pressed the Button. Le son des feux de signalisations destiné aux piétons vient offrir une palette de sonorités avec laquelle India Jordan s’amuse, iel transforme ces bruits du quotidien en un petit bijou dance diablement entrainant.

On retrouve également le rythme d’un train qui circule sur un morceau comme And Groove avec ce côté répétitif et le bruit entêtant et enivrant des wagons sur les rails.
Le « and Groove » revient sans cesse sur le morceau et on l’accueille comme on accueillerait avec bienveillance et confiance la voix douce d’un.e ami.e qui nous est cher.e.
Cet extrait vocal pave le chemin du morceau avec grâce et clôture un EP définitivement façonné pour bouger.

Pour l’expérience imaginons nous à vélo dans les rues de Londres et apprêtons nous à foncer dans la jungle urbaine à deux roues.
Une fine pluie octroie notre vision mais nos sens sont plus aiguisés que jamais. On perçoit le halo des feux de signalisations et les clignotants des voitures s’allument et s’éteignent dans une symphonie presque naturelle.
Slalomons un peu entre les taxis et les bus, on entend au loin l’écho retentissant d’une sirène, c’est peut être les pompiers, la police ou alors une ambulance ? Peu importe, le bruit se fond dans ce tableau merveilleux du mouvement ou les énergies circulent dans toutes les directions, qu’importe la destination tant qu’on s’anime !

A l’image de son EP et de sa musique si communicative, India Jordan est une pile électrique qu’on aurait du mal à contenir.
Et ça tombe plutôt bien parce qu’on en a vraiment pas l’intention !

Murmur – Murmur

C’est un inconnu qui donne envie de le découvrir. Affublé d’un déguisement de fantôme, il ne cherche pas à créer du mystère mais de l’absurde.
Comme un pied de nez à une industrie qui donne parfois trop d’importance à l’image et pas assez à la musique, Murmur laisse dans son sillage une impression lunaire. Le premier EP de ce projet atypique s’impose comme une
pièce unique.

L’artiste a signé chez Pont Futur, un label où vous retrouvez des talents originaux comme Toboggan, La belle vie ou encore Refuge.
L’EP s’ouvre sur un morceau magnétique intitulé Time’s away dont le clip est réalisé par sa compagne. Cette dernière va inspirer un des autres morceaux qui donnera son nom : Juliet.
Ce projet a été composé à un tournant dans la vie de l’artiste, Murmur est un souffle nouveau sur une existence. Un souffle qui vient libérer une inspiration musicale en proposant un instant amoureux avec des sonorités très sixties.
Il y a un aspect robotique plutôt prononcé et c’est très réussi avec le morceau Babe où des cris nous agrippent et nous retiennent.
L’un des titres les plus réussis est a.l.b.e.d.o, il intègre un rythme accrocheur avec un texte simple et des intonations efficaces.

En fait, Murmur propose des créations en toute humilité, elles se déversent avec une limpidité discrète. Avec Juliet Apollo Noir Remix et Pitch Black, l’EP prend un tournant particulier et donne le sentiment d’avoir donné à une machine la capacité de s’exprimer.
Finalement, l’artiste nous renvoie une image d’être humain avide d’émotions fortes, d’un intellect à la recherche de sentiments puissants.

Il y a comme un goût de trop peu, on en réclamerait davantage. On devine que Murmur est un musicien prometteur qui nous réserve de belles pièces à venir. Que ce soit sous une apparence de fantôme ou pas, il donnera toujours matière à rêver.