Format Court #36 : Peel, Yndi, Logic1000

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, on vous parle des dernières sorties de Peel, Yndi et Logic1000

Peel – Peel

Les apparences sont souvent trompeuses. Si au regard de son nom et l’esthétique visuelle abordée on pourrait voir en Peel un nouveau projet directement venu de la perfide Albion, il n’en est rien. En effet c’est du côté de la Californie et de Los Angeles que l’histoire de Peel prend place.

Multi-instrumentistes de talent, Isom Innis et Sean Cimino se réunissent dans ce projet pour une association au départ assez simple : d’un côté Sean apporte les boucles de guitares et les lignes vocales, de l’autre Isom apporte les parties rythmiques et sa science de la production.

En résulte donc un échange musical permanent et bouillonnant porté un point de vue musical assez clair : revenir à un « son », une recherche esthétique permanente, influencée par le travail de Martin Hannett que celui de Gary Numan (comme ils nous l’expliquaient dans leur ADN à retrouver ici ) pour produire une musique qui utilise les machines mais qui laissent toujours parler l’humain, allant chercher le maximum d’un set-up réduit afin de capture l’essence de la musique et d’offrir une expérience sonore qui se rapprochent le plus du live et de cette sensation d’une musique presque palpable et surtout vivante.

L’ambition est à la hauteur du résultant tant ces cinq premiers titres se présentent comme un tout cohérent et total, porté par des ambiances oniriques ( que ce soit sur la dépouillée Peel ou la superbe Citizen X) parfois inquiétantes ( Rom-Com et son jeu de ping pong vocal entre le côté distancié de Sean et la présence plus physique et imposante de Isom) donnant la sensation d’écouter la bande originale d’un rêve vaporeux et presque irréel qui s’ouvre sur une musique très physique (Catch And Release et ses pulsations électroniques) pour finir sur un titre aux contours plus flous et cajolant qui nous pousseraient au réveil ( Citizen X et son « combat » constant entre la force de la batterie très présente et son chant évanescent), le tout étant porté par une mélancolie permanente qui nous assaille autant qu’elle nous rassure.

Cette présence sonore totale se retrouve renforcée par les paroles concoctées par le duo. Si elles se rapprochent souvent de l’ambiance sonore avec ce côté parfois très poétique, elles traitent avec intelligence de beaucoup de thématiques quotidiennes, que ce soit le flot constant d’information que l’on subit autant que l’on recherche, le besoin impossible de vouloir en permanence effacer et recommencer les choses ou encore la sensation d’être parfois déconnecté du monde dans lequel on vit.

À l’image de son logo PEEL nous propose un projet total, où tout se retrouve lié et imbriqué, où le noir et le blanc se lient pour former du gris. Un projet sonore et visuel ambitieux dont on a hâte de découvrir les prochaines aventures.

Yndi – Introdução

14 Janvier 2021, fin de journée grisâtre en France, une nouvelle vidéo apparait sur la chaine Colors et on découvre et redécouvre Yndi avec une prestation sublime pour nous présenter le morceau Ailleurs.
Ailleurs, c’est justement là que l’artiste à décidé de nous transporter avec un EP live composé de trois morceaux de son futur album. Plus qu’une mise en bouche c’est une façon de découvrir dans un premier temps l’artiste et sa musique sous l’angle le plus vrai, loin des arrangements d’un album studio mais au plus près de ses émotions et de sa sensibilité. C’est une introduction, Introdução.

Seule avec sa guitare et sa voix, l’artiste rend hommage à des artistes qui ont forgé son art, João Gilberto, Djavan, Caetano Veloso ou encore Vinicius de Moraes.
Quand Yndi parle de la musique de ces artistes elle évoque leur extrême sensibilité mais également l’intemporalité qui est attachée à leurs prestations. On retrouve donc presque logiquement cet effet sur l’EP avec l’enchainement de ces trois morceaux qui agissent comme l’effet d’une bulle sur le moment présent, une escapade dans la douceur et la tendresse.

La voix de miel de Yndi conforte cette sensation d’apaisement et on se laisse toucher par sa grâce le temps d’un instant. On parcourt ainsi tour à tour les allées festives du carnaval de Rio, on chevauche les immenses étendues de verdure du Brésil aux côtés des amazones, magnifiques et élégantes guerrières, on en vient même à s’empreindre de leur fierté et rudesse pour finalement venir s’échouer tendrement dans le ciel étoilé.
Il brille de mille feux et les lueurs scintillantes des étoiles viennent effleurer notre peau et agissent comme une vitamine sacrée. Voilà le pouvoir de trois morceaux joués à la guitare et dont l’enchainement s’approche de la perfection, on prête l’oreille et tout à coup on part, loin, Ailleurs.

L’instrument principal de cette prestation n’est ni la guitare ni la voix de l’artiste, c’est son authenticité. On assiste à un mélange subtil du français et du portugais, à l’image d’une musique la plus sincère et naturelle, on ressent l’éclosion artistique et personnelle d’une Yndi dont le talent ne fait que commencer à nous éblouir.
De quoi bien nous faire patienter pour la sortie de son premier album au printemps prochain. Quelle Introdução.

Logic1000 – You’ve Got the Whole Night to Go

You've Got the Whole Night to Go | Logic1000

Qu’elles sont loin les soirées à se déhancher sur des sons toujours plus lancinants, on ne peut qu’espérer retrouver au plus vite ces moments de bonheurs et de frénésie musicale et corporelle. En attendant Logic1000 vient raviver cette flamme du dancefloor avec You’ve Got the Whole Night to Go et 4 morceaux qui sauront redynamiser nos déhanchés et galvaniser nos mouvements de têtes.

Ce qui frappe à l’écoute de cet EP c’est l’étrange sensation d’être familier avec les morceaux présentés, comme si le travail de Logic1000 était une évidence, comme si elle était une DJ que l’on connait et chérit depuis des lustres. Il faut dire qu’on attendait son second EP en grande pompe tant elle avait fait parler d’elle avec son premier opus éponyme. Ce n’est pas une coïncidence si Four Tet a intégré plusieurs des ses morceaux à ses sets et l’a convié à ses prestations pour se produire. Il n’est pas le seul d’ailleurs à avoir succombé à la musique de l’australienne, on retrouve dans ses supporters des noms comme Caribou, Floating Points ou encore Ben UFO, rien que ça.

L’EP commence par le morceau Like My Way, un petit bijou à la structure house particulièrement mélodique et des nuées de reverb qui donnent du coffre au morceau en faisant ressortir les drums. On retrouve dans les deux morceaux suivants, I won’t Forget et Medium cette idée de fièvre musicale qui nous emporte au son des synthés et des voix qui transpercent les tracks en leur donnant une matière, une présence physique.
L’EP se clôt sur l’excellent Her, un enchainement psychédélique de percussions qui vient créer le rythme d’une transe communicative et difficilement stopable.

Cet EP était attendu comme la confirmation d’une étoile montante de la scène techno et autant dire que la jeune DJ aura réussi le pari de mettre tout le monde d’accord sur son talent et sur sa capacité à nous transporter au son de ses boucles hypnotisantes. Il ne nous reste plus qu’à croiser les doigts pour avoir la chance d’assister à un de ses DJ sets rapidement, nos corps et nos têtes le demandent et ce projet mérite d’être mixé, dansé, adoré mais surtout vécu.