Format Court #21 : Daniel Mist, Magenta, Mont Joseph

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, on met à l’honneur des petits nouveaux de la scène française en vous parlant des récents EPs de Daniel Mist, Magenta et Mont Joseph.

Daniel Mist – Troubles

La brume a toujours eu quelque chose de symbolique. Si l’on regarde The Mist, film de Frank Darabont qui prend racine dans une nouvelle de Stephen King, la brume renferme les monstres, mais la vrai monstruosité vient pourtant de l’humain, capable du meilleur comme du pire dans des situations de tension.

À l’écoute des quatre titres qui constituent Troubles, le parallèle entre Daniel Mist et le film/livre est aussi éloquent que le rapprochement fait d’abord par le nom. Ici, il est bien question de sortir du brouillard ce qu’il y a de pire comme ce qu’il y a de meilleur, ce qui amène à mettre en forme les Troubles de la société, mais aussi de l’être humain, de manière musicale et poétique.

Auteur, compositeur, interprète, Daniel Mist ne renie à aucun moment le fond sur la forme, et inversement, nous offrant un premier effort à la diversité musicale étonnante, allant chercher autant dans le hip-hop pour the next species on the earth que dans une bascule onirique sur The Ballet ou un emballement sonore sur Troubles. La cohérence, il la trouve à travers de sa voix toujours juste et habitée, dans ses intentions électroniques qui naviguent entre les morceaux ainsi que dans les thématiques fortes qu’ils creusent dans chaque titre.

Ainsi, c’est quatre courts métrages qu’il nous offre, traitant ici du transhumanisme, là des divagations de l’esprit et plus loin d’amour pas forcément joyeux. Avec Troubles, Daniel Mist sort donc du brouillard et propose un univers dense et personnel qu’on suivra avec grand intérêt.

Magenta – Long Feu

Est-il possible d’aller contre ce qu’on est ? C’est une question que l’on s’est tous posé un jour, c’est une pensée qui nous habite à un moment ou à un autre de notre existence. On ne reviendra pas sur le passé de Magenta, si il leur appartient totalement, il partage un peu des lignes avec le nôtre, des croisements et des histoires. Et finalement, cette idée du destin, du retour à quelque chose auquel on ne peut finalement pas échapper, devient le guide et le thème principal de Long Feu, premier morceau de l’EP de Magenta.
Alors, puisque la vie est comme elle est, parce que le besoin de raconter, de se raconter et de partager est plus fort que tout, Magenta rallume la flamme, reprend en main une histoire qui n’appartient qu’à eux.

Une flamme à la couleur différente, plus dansante, plus solaire aussi par moment. Si les mots ont une place centrale, ils s’ornent d’un son qui pousse un peu plus les BPMs, d’instruments aux sonorités parfois froides auxquels ils insufflent à la fois une chaleur et une humanité. Danser oui, mais sans jamais oublier le message, sans jamais chercher à cacher les failles dans lesquelles on plonge tous à un moment donné.

C’est un peu tout ça Magenta, un besoin vital pour ceux qui la font afin de donner de l’espoir à ceux qui l’écoutent. Des histoires pour eux dans lesquelles on se reconnait et grâce auxquelles on transpire : danser pour relâcher le corps, mais aussi pour pouvoir soigner l’esprit. Si on est moins emballé par leur featuring avec Vendredi Sur Mer, bien loin des thématiques abordées dans les autres titres et un poil superficiel, des morceaux comme Assez? ou Tom Tom Club nous touchent en plein cœur, un cœur qui accélère avec la musique qui le guide alors qu’intimité permet de ralentir un peu le rythme et de retrouver un souffle qui semble parfois se perdre dans le morceau, tant il y a des choses à dire, des choses à vivre.

Magenta fera t’il Long Feu ? Il est sans doute un peu tôt pour le dire mais avec ce premier EP, et malgré quelques défauts, le groupe atteint pleinement l’objectif qu’il s’est fixé : une musique qui danse et qui pense.

Mont Joseph – Paradis

Parfois l’amour mène au paradis, parfois il démarre au paradis pour ensuite redescendre sur Terre et sans doute un peu en dessous. Au vu de la couleur profondément mélancolique, et parfois douloureuse, des thèmes abordés par Mont Joseph dans son premier EP, on pourrait voir une forme d’ironie à appeler cette collection de titre Paradis. Il n’en est en fait rien, car c’est ici avant tout la sincérité qui transparait. Une sincérité nue, presque impudique, qui nous dévoile les bonheurs et les douleurs d’une relation qui finit par se détruire d’elle même.

Attraction et répulsion, amour et haine, douceur et douleur, les sentiments se confrontent, s’exposent et explosent dans le calme tranquille qui émane des compositions de Joseph. Car si les sujets sont personnels, si il emploie la première personne, l’artiste garde une certaine distance dans son interprétation, comme si il devenait parfois spectateur de sa propre vie, comme si il cherchait à maintenir le feu qui brûle en lui sous une bonne couche de glace.
Une recherche esthétique qui ne fait que renforcer la force des propos et qui ne renonce jamais à insuffler un bon vent de sensualité, et parfois de sexualité, qui ressort de ces poèmes musicaux qu’il nous raconte comme pour s’en éloigner mais qui fatalement finissent par rallumer certaines lumières dans nos esprits.

Car ce qui marque dans ces cinq morceaux à l’enrobage très pop, c’est l’universalité de ce qui s’y raconte. Mont Joseph parle d’amour et donc parle à tous. Que ce soit la recherche nostalgique de souvenirs qui ressurgissent avant de partir à jamais dans Dolce Baci, le besoin de soigner l’autre, même contre lui, dans Reste Tranquille, la résignation d’une histoire éphémère dans l’homme du moment, le garçon du sud nous conte le besoin d’amour, de se perdre dans l’autre pour le meilleur comme pour le pire.

Si le paradis n’est sans doute pas la où on l’attend, la musique de Mont Joseph allie force et tendresse pour un résultat intense et entêtant.