Format Court #2 : Venus VNR, St Graal et Saintard

À La Face B, on adore les EP. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EP sortis récemment. Pour ce second épisode, c’est le français qui nous guide avec les EP de Venus VNR, St Graal et Saintard.

Venus VNR – Venus VNR

On les a vu débouler tout au long de l’année 2019 avec des titres distillés comme le Petit Poucet laissait derrière lui des cailloux. Sauf que le duo, plutôt que de chercher à retrouver son chemin, a décidé de nous entrainer jusqu’à un piège du plus bel effet. En effet, ce premier EP quatre titres à les allures d’un Brad Pitt en monde Fight Club. Si on pourrait voir à travers ces titres à l’esthétique léchée une pop facile et entêtante, on se trouve en réalité face un sous texte clairement punk et déviant ou l’on parle de sexe, de mort, de burn out et de la violence du quotidien. Ici aucun titre ne dépasse les 3 minutes et chaque titre est une cartouche qui touche sa cible avec une facilitié déconcertante. Premier groupe hors de l’univers Stupeflip a être signé sur le label Etic System, le duo fracasse tout sur son passage avec un sourire narquois, celui du gamin malicieux qui a fait une bonne blague et qui attend que le monde réalise qu’il s’est bien foutu de lui. La preuve, Blonde, sous ses couverts de petits hit pop taillée pour les radios parlent en substance de vengeance féministe avec des termes crus et directs porté par une guitare qui claque. Veleda et Phoque sont à l’avenant et Full VNR, seul titre de l’EP non clippé, est une décharge d’adrénaline imaginée comme une réponse à une routine qu’on finit par ne plus supporter. Une porte ouverte en attendant un album prévu pour cette année. PS : si ce n’était pas suffisant pour vous convaincre, on vous conseille de vous jeter sur leur reprise foutraque du Frunkp de Alphonse Brown.

St Graal – Pulsions

Un premier EP est toujours un moment important. Certains auraient tendance à vouloir trop en mettre,à vouloir explorer trop de pistes et à se disperser. St Graal a choisi un chemin différent, et bien plus risque : celui de l’ambition. Car ici c’est une histoire à part entière qu’il fait défiler dans Pulsions. Une histoire aussi personnelle qu’elle est universelle, celle de l’amour dans ce qu’il a de bon et de mauvais, dans ce qu’il a d’absolu et de ravageur. En mettant le sentiment dans le corps de son récit, le Bordelais nous offre donc un voyage dans ses Pulsions. Ici les titres sont donc tout sauf un hasard, puisqu’ils représentent tous les sentiments qu’on peut ressentir au cour d’une relation : Amour, Jalousie, Narcissisme, Mélodrames et Spleen. En cinq étapes, à l’aide d’une écriture délicate et puissante, portée par un piano, des synthés et des pulsations électroniques bien senties, St Graal se fait conteur, entre tendresse et violence, entre espoir et renoncement, le jeune homme raconte l’amour et la vie comme une compagne qui nous fait avancer autant qu’elle nous tue. Ici l’amour brûle, l’amour vit sous les Pulsions de St Graal. Alors dansons et dansons encore, tant que notre corps nous le permet, tant que le désir continue de nourrir nos sentiments. Un premier effort ambitieux pour une chanson française moderne et poétique. Une jolie réussite en cinq morceaux qui se répondent comme des miroirs.

Saintard – Calor

Notre histoire avec Saintard a commencé par le live, un soir d’avril en première partie de Michelle Blades. On y découvre un personnage, saxophone à la main, groove au bout des doigts et nonchalance dans la voix. Cet imaginaire, il le développe et ne cesse de le faire exploser en morceaux pour mieux le reconstruire dans Calor, un premier ep réjouissant et sensuel.
Car oui la musique de Saintard est taillée pour danser, que ce soit à la verticale ou à l’horizontale. Charnelle au possible, elle joue pourtant sur différent tableau, entre ce sentiment très physique qu’elle nous inspire (bien aidée en celà par ce satané saxophone qui nous met dans tous nos états) et l’ironie et l’humour qui se dégage des paroles. Se transformant en Droopy du groove, le garçon traine avec lui une espèce de spleen étrange, jamais vraiment sérieux mais pourtant bien présent. Un vrai paradoxe en somme. Comment ne pas fondre face à cet ode à l’amour, que ce soit en français ou en anglais Paradoxe nous fait vibrer. Je ne suis pas américain, est elle aussi un exemple du genre, sorte de kaléidoscope musical qui se transforme au fur et à mesure que le morceau avance, passant d’un rythme lent à une embardée dansante pour s’achever dans des vibes orientales superbes. Impossible de résister au son de basse de Muraille qui fera remuer le bassin au plus timide d’entre nous. Enfin l’EP se termine par une reprise superbe de Pauvre Jésus Christ de Salvador, ramenant à la modernité un titre qui prouve toute sa saveur intemporelle. Avec Calor, Saintard joue donc avec délice avec les rythmes, les émotions et les sensations. Une jolie réussite qui nous accompagne assez régulièrement dans nos pérégrinations mentales.