Dybbuk Tse!, l’érudition Jazz de Yoni Mayraz

Sortir un premier album peut s’apparenter à un grand défi. L’israélien Yoni Mayraz s’est essayé à cet exercice. Celui qui est maintenant basé à Londres sort en ce début de mois de juin son premier disque, Dybbuk Tse!. L’occasion pour le producteur d’exorciser ses vieux démons en musique.

L’alliage dont fait preuve le claviériste est à la fois complexe et original. Dans le Jazz de Yoni Mayraz, on peut retrouver du Hip-Hop new-yorkais des années 90s, du breakbeat et des influences des musiques traditionnelles orientales.  L’une des grande forces nous sautant aux yeux en écoutant ce projet réside dans la capacité à organiser une telle abondance de sonorités.

C’est pour cela que le producteur s’est entouré, et très bien. On remarque tout particulièrement la présence de Roy Reemy à la batterie et de Eli Orr à la basse. La communion est au centre du disque tant la musique écrite par le producteur coule naturellement pendant la découverte de Dybbuk Tse!. Malgré le caractère personnel du concept, les musiciens affiliés à l’album s’intègrent parfaitement. On sent d’autant plus cette connexion entre les musiciens du fait des conditions d’enregistrement de cet opus. 

Le temps d’un week-end, dans un studio poussiéreux, le groupe s’est réuni pour enregistrer ce qui allait devenir ce premier disque. Son titre fait référence à un esprit malveillant qui prend possession du corps d’autrui, le dybbouk. Le concept et l’idée de l’album est d’évoquer le pouvoir d’exorcisme émotionnel dont est doté la musique. Paradoxalement, le projet ne révèle que peu de noirceur. Les composition s’avèrent être légères, fluides et soyeuses. 

On peut prendre comme exemple le premier single de l’album, The Master Wore a White Robe. Sous fond d’un travail rythmique d’orfèvre, avec une basse subtile et une batterie délicate et droit, le clavier s’active. C’est l’un des seuls passages qui dévoile une part sombre. D’un son doux et nuageux, Yoni Mayraz sublime le travail de ses compères et apporte une patte mélodique sensationnelle. L’alliance de tous ces éléments donnent une note psychédélique à l’album. La meilleure illustration de cet aspect tourbillonnant reste la piste As We Entered Jericho, entêtante et lancinante. 

Mais ce premier album offre aussi des moments plus percutants. 1999, ouverture de la deuxième face du disque, est un véritable hommage au Hip-Hop des années 90s. Direct et frontal, le morceau met en avant une facette complètement opposée à celle évoquée avant. Cette ambivalence permet à Dybbuk Tse! de mettre en place un rythme qui ne nous perd jamais. 

Cette gestion du temps et de cette variation est appuyée par la présence de cuivres et d’instruments à vent, conférant encore plus de vie au tout. Le saxophoniste Matan Vardi, le trompettiste Roy Zuzovsky et le flûtiste Joe Melnicove apportent tous trois leur lot de richesse. Entre un accompagnement paisible comme sur South Star ou le saxophone possédé de Pawnshop, leur apport se fait ressentir et est indéniable. 

Dybbuk Tse! est un album riche et d’une grande variété. Être capable de donner vie à une œuvre aussi maitrisée et propre relève du coup de force en ce qui concerne un premier album. Yoni Mayraz signe ici une pièce pleine de sens et d’idées. Ce projet est le témoin à surveiller de très près et avec attention.