Bleu Nuit : le dur son de Métal

Avec une scène québécoise tournée vers une pop savoureuse et délurée, Bleu Nuit fait figure de brebis galeuse. L’album Métal le fait sortir du troupeau avec un ton résolument nihiliste et son premier titre  Clé d’Or  prolonge cette sensation en scandant à qui veut bien l’entendre dans une société déchirée : « Restons tous à l’écart ». Plus la narration prend de la distance et plus les rythmiques synthétiques et des lignes mélodiques froides retranscrivent un monde trompeur.

Les titres des chansons courts et sans fioritures sonnent comme des claques. La poésie cède vite la place à des tableaux sombres. Certaines phrases manquent à dessein de subtilité. Tout est là. Rien n’est édulcoré. Dès Mensonges, le chant, sans concession, s’engouffre dans une longue lamentation.

Bleu Nuit alterne entre constat maussade et poussée de fièvre.  Résistance est ses guitares stridentes nous invite à ne pas s’abandonner. Pourtant, tout est déjà joué d’avance dans ce théâtre pathétique. Oscillations décrit avec délectation la folie d’un être qui voit la fin se dessiner devant ses yeux. Les instruments s’effondrent, la voix d’un homme perdu déplore « ces longues nuits de noirceurs à regarder passer les machines… ».

Le goût amer de la défaite n’en est que plus retentissant avec la chanson suivante, Automate. Ces machines ont pris définitivement le contrôle. Tout ce qui nous entoure devient Métal. Égaré dans un cauchemar, l’automate avance au gré des murmures du chant. La scène devient psychédélique : (Les) antennes se redressent (…) et (soudainement il) rampe vers le son »

Nulle promesse. Aucune issue non plus. A quoi bon d’ailleurs puisque dans Météore, « les murs autour de nous se referment complètement. La lumière rétrécie ». Le météore avance inexorablement percutant nos vies sans se soucier certainement des destins qui vont se briser dans les décombres. « C’est de pire en pire ».

La brebis galeuse préfère en fin de compte le doux conte d’une Utopie désirant « un nouveau monde». L’échappatoire prend forme autour de plus de 8 minutes d’une course loin d’ici (…) bien loin de la réalité ». La fin au milieu d’un sound design inquiétant semble se mouvoir dans une agonie métallique. Il se peut qu’au bout de ce tunnel obscur et insensé, nous pourrons goûter, en femmes et hommes libres, au ciel bleu.