All the Unknown, Spectaculaire Grandbrothers

On n’en parle pas tant que ça, et pourtant l’Allemagne regorge de talents. On s’intéresse ici à un duo basé à Düsseldorf, et qui ravit nos oreilles depuis déjà 2014, les bien nommés Grandbrothers. Un premier EP pour se mettre en jambes, puis trois albums en constante progression et dont on parle aujourd’hui du tout dernier : All The Unknown.

Grandbrothers All the unknown album cover art

L’univers de Grandbrothers, c’est avant tout une rencontre. Entre Erol Sarp et Lukas Vogel, l’histoire est celle de la complémentarité. L’un pianiste de jazz, l’autre ingénieur et féru de synthétiseurs, c’est la recette d’un des styles les plus marquants de ces dernières années. Si leur nom ne vous dit rien, vous avez sans doute déjà entendu leur plus gros succès, Bloodflow, tiré de leur précédent album et qui a accompagné un nombre impressionnant de campagnes de publicité. Il résume d’ailleurs bien la quintescence de ce qui fait la force du duo Germano-Suisse : une mélodie entraînante, des effets pour mêler la musique électronique à ce qui pourrait être rapproché à du jazz au piano. Un mélange qui fait forcément penser à Nils Frahm, même si on ne parlera pas forcément ici d’inspiration.

Ce qui est impressionnant dans le processus de production de la formation, est que les sons de piano que l’on pourrait croire modifiés numériquement en post production pour obtenir des effets d’écho ou de répétition est en réalité du à une construction de Vogel, qui a adapté un piano à queue en véritable machine électro-mécanique qu’il contrôle afin de produire le son qu’il souhaite. Bref, on se trouve face à deux personnages qui n’ont pas du compter leurs heures pour mettre au point ce dispositif et le maîtriser.

Le résultat dégage une sensibilité vertigineuse, aussi dansante que contemplative, et prend une dimension spectaculaire que l’on n’avait pas encore aperçu dans la discographie du groupe. Sons affutés, ajout de basses synthétiques, et la volonté d’aller encore plus loin dans la proposition d’un son organique, qui fait écho aux feuillages de la couverture de l’album, on sent la progression du duo dans la maîtrise de ce qu’ils font. Effectivement, on trouve des productions plus profondes qu’auparavant dans leur conception et dans l’exploitation des sonorités. La plage titulaire fait figure d’exemple, amenant l’auditeur à participer à un voyage en plusieurs phases tout en gardant son fil conducteur, avec un climax et un drop qui fait penser aux standards des musiques électroniques, allant chercher par moment dans les codes exploités par Thylacine ces dernières années.

Les différents titres partagent la caractéristique de provoquer une évasion libératoire. Elle accompagnera sans mal une sortie de course à pied ou une séance de lecture de fin de journée. Dès les premières notes, on se sent transporté.e et on prend plaisir à s’envoler au côté de ce triptyque piano – machines percussives – basses qui se révèlent être d’une efficacité redoutable. Exploratoire, contemplatif et vibrant à souhait, ce troisième album vient poursuivre de très belle manière l’évolution de Grandbrothers, qui nous emmène dans ses rêveries et ses fantasmes.