ADN #170 : November Ultra

ADN : Acide du noyau des cellules vivantes, constituant l’essentiel des chromosomes et porteur de caractères génétiques. Avec ADN, La Face B part à la rencontre des artistes pour leur demander les chansons qui les définissent et les influencent. Aujourd’hui, c’est November Ultra, artiste hispano-française qui nous présente son ADN musical, un ADN constitué d’amour, de couleurs, de beauté et de poésie, en somme.

© Crédit photos : Pauline Darley

James Blake – I Never Learnt To Share

Je me souviens exactement quand j’ai entendu cet album, c’était l’époque vraiment où tous les albums leakaient des mois à l’avance sur des blogs mexicains de mecs aux goûts méga pointus, et j’avais cliqué dessus pour la pochette. C’était les fêtes de Noël, il y avait toute ma famille espagnole chez moi, donc impossible de s’entendre penser ou d’avoir un moment de silence, et j’ai mis cet album pile à ce moment-là et c’est dans le bruit que j’ai réussi à retrouver un coin libre dans mon cerveau. Ce morceau-là, il est simple, il a une phrase qui build up build up build up, ça prend le temps de monter, ça ne s’impatiente pas, ça ne saute pas les étapes. Puis t’as ce truc instrumental à 3m40 qui me bute encore aujourd’hui quand je l’entends neuf ans plus tard, ce glitch énorme qui pour moi se situe entre l’intenable, comme des ongles sur un tableau, et l’orgasme auditif. Cet album est un masterpiece, encore mon préféré de James Blake.

Edelweiss – La Mélodie du bonheur

C’est drôle, en faisant cette selection, il y a des petites choses qui me sautent aux oreilles, notamment la bande son de mon film préféré de tous les temps aka The Sound of Music avec lequel j’ai grandi et que j’ai vu 3 000 fois. Je trouve qu’Edelweiss a résonné en moi très fort quand j’ai écrit Soft & Tender. Petite, j’ai voulu être l’un des enfants et faire des bêtises avec eux, j’ai voulu être Liesl à l’adolescence puis Maria en étant adulte, j’étais amoureuse de Georg Von Trapp et je ne peux pas voir Julie Andrews ou Christopher Plummer dans un film sans être émue. La chanson de La Mère Supérieure, Climb Ev’ry Mountain, est un diamant. C’est devenu un peu désuet d’aimer les comédies musicales, ça n’a pas tout le temps méga bonne réputation alors que ce sont vraiment des boîtes à bijoux remplies de pierres précieuses audio.

Amy Winehouse – Love Is A Losing Game

Amy a été incroyablement importante dans ma vie, non seulement pour sa voix, pour son songwriting, mais parce qu’elle avait cet alignement en elle, elle aimait le jazz, elle n’aurait pas fait un autre style de musique et elle l’a fait à sa manière parce qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’être furieusement elle-même. C’était une pelote d’émotions et de sentiments, et quand tu vois une session d’enregistrement live comme celle de Love Is A Losing Game, tu peux que te dire que si tu n’es pas aussi sincère qu’elle, ça ne sert à rien de faire de la musique.

Lola Flores – Pena, Penita, Pena

Dans mon ADN, il y a forcément la copla espagnole, qui est un style qu’on confond souvent avec le flamenco, which is normal. Ils ont les mêmes racines, le même drama, mais la copla diffère du flamenco qui est un style basé sur la narration. Chaque chanson est une histoire, les voix sont moins rauques, les robes plus longues, plus brillantes, c’est un genre musical rempli de divas qui ouvrent grand les bras et mettent leur micro dans leur décolleté comme Lola Flores dans cette vidéo. Pour l’anecdote, Lola Flores, grande figure espagnole, était la grand-mère d’Alba Flores aka Nairobi dans La Casa De Papel. J’ai grandi avec ça, mon papi le chante, ma mère le chante, je chante ça sur scène avec un looper, à ma sauce. Les racines.

Jeff Buckley – Grace

Je me souviens entendre Grace dans les rayons de la Fnac, je passais ma vie à trainer au rayon alternatif et à acheter des disques pour la pochette, je me souviens de cette chanson, je me souviens de ce que j’ai ressenti. J’étais incroyablement timide (je le suis toujours, mais ça va mieux) et à l’époque j’étais incapable de parler à des vendeurs, mais j’ai entendu cette chanson et j’ai eu besoin de savoir qui chante, quel était l’album pour l’acheter, repartir avec et écouter ça en boucle et fort alors j’ai fait un pacte avec moi même « si la prochaine chanson te plaît autant, tu demandes » et c’était Lilac Wine, sa reprise incroyable de Nina Simone – je suis allée demander au vendeur, j’ai acheté l’album, je l’ai écouté en monomanie pendant un mois, je pleurais à chaque écoute. Il a le même truc qu’Amy Winehouse, ce sont des choses qui ne s’expliquent pas, qui ne s’écrivent pas, c’est de l’ordre du sentiment, des émotions, de la spiritualité, de la grâce. J’aspire à ça, très fort. Hopefully, un jour j’y serai.

Frank Ocean – There Will Be Tears

Je dois mon blase à la première mixtape de Frank Ocean, Nostalgia, Ultra– elle m’a absolument mindfuck cette mixtape. En terme de choses inspirantes, ce truc fait par lui-même comme un petit doigt d’honneur à son label qui le fout pas dans sa liste de priorité, le jusqu’au boutisme de cette mixtape, son storytelling, le fait qu’il ne se contente pas de faire des morceaux ou des covers, mais que chaque morceau est lié au prochain et au précédent, ces bruits de cassettes qui créent l’ambiance, de la 3D, qui casse le quatrième mur. Et puis je trouve qu’on oublie souvent que Frank Ocean est un parolier de génie, poète du réel / Hide my face, can’t let them see me crying / Cause those boys didn’t have no fathers neither, and they weren’t crying / My friends said it ain’t so bad, you can’t miss what you ain’t had, well i can, i’m sad

The Strokes – You Only Live Once

Le premier YOLO, il vient de You Only Live Once des Strokes, c’était ce qu’on aimait beaucoup dire avec mes ami.e.s quand Drake a lancé YOLO, parce que nous on l’utilisait pour parler de ce morceau des Strokes. Ça fout toujours un petit débat, mais moi mon album préféré des Strokes, c’est le troisième : First Impression Of Earth et son You Only Live Once qui était un vrai petit tube rock qui lançait que des vérités générales dans ses paroles.

Découvrez soft & tender de November Ultra :

Il y a quelques semaines, November Ultra dévoilait son premier single intitulé soft & tender. Après bon nombre d’écoutes, on peut ainsi affirmer que ce morceau a des vertus semblables à celle d’un câlin tant ce dernier apaise et réchauffe nos cœurs. Un clip réalisé par Elisa Baudouin a d’ailleurs suivi de près cette sortie et dévoile un monde fait de douceur et de belles couleurs pastels, un monde utopique où romance, tendresse et bienveillance semblent être les éléments essentiels d’une vie où le flegme règne. Nova, sous les projecteurs, la tête parmi les nuages, vêtue de son plus joli manteau bonbon ou ornée de sa plus belle couronne, fait un trait sur la pudeur et chante l’amour, les émotions qui s’y mêlent et leurs nuances, libère les papillons tout en embrassant la vie. Dans un monde aujourd’hui chamboulé, November atténue alors le chaos quotidien à l’aide de sa voix guimauve et de sa poésie dont nul ne pourra plus jamais se passer. Merci pour le rêve et le réconfort donc et à très vite pour la suite.