A Life With Large Opening : la liberté selon Samba de La Muerte

Comment se réinventer ? Comment se retrouver dans sa musique et ne pas se répéter ? Comment vivre sa musique avec le plus de sincérité possible, sans compromis ? Trois ans après le génial Colors, Samba de La Muerte apporte une réponse éclatante à ces questions en nous offrant un nouvel album qui prend racine dans une idée architecturale pour en offrir son pendant musical. Laissez vous emporter par A Life With Large Opening.

L’inspiration est souvent une maîtresse étrange. Elle trouve ses racines là où elle le souhaite, elle grandit parfois sans notre accord mais devient pourtant impossible à contenir, l’idée de base poussant ainsi tout le reste dans sa direction, qu’on la contrôle ou non. Pour Samba de La Muerte, le guide de son nouvel album lui est venu d’une idée architecturale japonaise qui donne donc son nom à l’album : A Life With Large Opening. Ce concept transforme les murs en fenêtre ; ainsi, ce qui est censé créer une séparation offre une ouverture, une nouvelle perspective, une ouverture totale vers le monde et la lumière qu’il a à nous offrir. Adrien Lepêtre, la tête pensante derrière Samba de La Muerte, a pris le cœur de cette philosophie au pied de la lettre pour se réinventer complètement. Ce besoin de liberté, il l’a tout d’abord traduit en créant sa propre structure, Collectif Toujours, pour sortir sa musique (et pourquoi pas aussi celle des autres). Il a aussi travaillé en profondeur les visuels à apporter à sa musique, offrant toujours le ciel en ligne de mer pour un concept qui ne trouve comme limite que l’horizon lointain qu’on ne touche jamais vraiment. De même, comme dans l’architecture, il a trouvé une base solide pour les deux composantes principales de sa musique. Ainsi, la majorité de l’album tourne autour d’une formation instrumentale réduite : basse, batterie, wurlitzer forment la base de toutes les compositions des neufs titres, liées par les expérimentations électroniques qui font tout le sel de Samba de La Muerte. Au niveau des thèmes, c’est vers la poésie que le groupe se dirige, cherchant dans les voyages comme dans le quotidien les thèmes fondateurs d’un album porté sur l’humain, sur l’unité, la bienveillance et le vivre ensemble. Et pour le reste ? La liberté, encore et toujours comme étendard d’une musique sans limites.

Sans contraintes dans les genres, les durées et les intentions, A Life With Large Opening est un voyage mouvant, aussi troublant qu’il peut être exaltant. On commence ainsi avec Land, ses cordes cinématographiques au possible, ses sonorités orientales et ses dérivations électroniques qui basculent assez rapidement vers une mélancolie électronique, guidée par cette voix si distinctive. Le titre bascule à plusieurs moments, nous bouscule autant qu’il nous charme pour finir par faire apparaître une guitare acoustique qui le ramène vers un terrain plus folk, retour aux premiers amours du groupe. L’exploration continue et la nouvelle fenêtre nous emmène ailleurs, le regard porté vers l’Angleterre avec Fast. Le rythme s’accélère, porté par une basse folle qui donne toute sa puissance à la musique pour un mélange des genres excitant qu’on pourrait nommer du « post pop punk ». L’idée est prenante, le guide est annoncé : chaque titre jouira de sa propre liberté, de sa propre identité, nous permettant ainsi de vivre chaque chanson comme une expérience solitaire aussi facilement qu’on pourra la fondre dans un tout global. Ainsi, à la douce fureur de Fast vient se confronter la douceur lancinante de Park qui s’offre une incursion bienvenue dans le hip hop. Loin amène une nouvelle fois la boussole ailleurs, avec ses chœurs puissants, ses pulsations électroniques plus prononcées et une mise en avant des percussions plus poussées. La prise de risque est ainsi autant contrôlée qu’elle est continue, comme le prouve Side by Side qui jouit d’une tension presque continue tandis que Even If se branche sur un courant plus dansant et très électronique.

Vient alors le plat de résistance, la chanson qui fait basculer un album, le titre qui nous convainc totalement qu’on est bien entrain d’écouter un album que l’on n’oubliera pas facilement, Motech, à la manière de Love Song sur Colors, est un titre fou, qui monte encore et toujours pour nous fasciner totalement, jouant sur les émotions avec une facilité assez déconcertante. Le titre semble être la synthèse totale du projet, pouvant nous émouvoir autant qu’il devient une machine à danser pour nous laisser un peu à cours d’énergie au final. Malin, c’est avec la superbe Home que la fenêtre nous emmène, ici l’émotion fait dresser les poils et nous rassure. C’est à ce moment que Samba de La Muerte nous porte le coup de grâce : Marguerite est une merveille d’émotion, qui prend le contre-poids total de ce qui nous a été donné auparavant. Doux, apaisé et profondément mélancolique, le titre est guidé par une guitare folk à souhait, un saxophone étrange et des arrangements vocaux sublimes qui amènent finalement les larmes jusqu’à nos yeux comme une catharsis totale.

Comme un mantra, Samba de La Muerte nous répète sur Land que « nous irons bien », à l’écoute de ce superbe A Life With Large Opening, on ne peut que suivre son avis. Des influences multiples qui se répondent et se mêlent avec une aisance folle en passant par sa liberté de ton et de format, ce second opus est un voyage surprenant et puissant qui nous invite à briser les murs de nos vies pour les transformer en fenêtres, à s’ouvrir sur le monde et à le laisser influencer nos existences, à voir la vie de manière plus positive et poétique. On ne peut que vous inciter à laisser cette philosophie vous habiter.