15 ans du Motel : Rencontre avec l’équipe

Le meilleur bar indie de Paris (autodiag), aka Le Motel, nous a ouvert ses portes pour nous parler de son anniversaire et de son historique singulier. Rencontre avec Djavid – fondateur – et Tali – actuelle responsable du bar -, deux des têtes pensantes de ce lieu pas comme les autres.

© Titouan Massé

La Face B : Je me demandais comment tout avait commencé pour vous ? C’était quoi la volonté de base en lancant « Le Motel » ?

Djavid : Au tout début, début, ça venait de la rencontre entre Mathias et moi dans un bar. On s’est rencontré un peu par hasard, et on a été voir un concert de Stephen Malkmus le lendemain. On reste très copains, et en 2005 lui il galérait un peu niveau thunes, il jouait de la guitare dans le RER B. Et donc on a commencé à organiser des concerts dans un petit bar Kabyle à Maraîchers qui s’appelle le Cosmos. C’était cool car le gars l’avait vu passer avec sa guitare, et ensuite on pouvait passer avec les copains, faire des apéros etc. Et ils devaient nous filer 150€, ce qui nous paraissait énorme. C’est là où on s’est rendus compte qu’il y avait moyen de rameuter des gens dans un même endroit. Et après on est passé dans un bar qui s’appelait le Bleu Cerise, où on organisait des soirées qu’on appelait « Pop & Curry », car on servait du curry gratuitement. Le patron du bar était un peu foireux – pas de Licence IV – et il voulait s’associer avec nous, à partir de ce moment-là on s’est dit « pourquoi ne pas avoir notre bar à nous ?« . On voulait que ce soit un petit lieu d’accueil cool pour musiciens, un endroit planqué, mais accessible pour que la sélection se fasse naturellement, il fallait aussi que ce soit pas cher. Et c’est devenu un peu le lieu de rencontre des fans de musique, on pouvait organiser des aftershows etc.

La Face B : Toi Tali, tu es arrivée à partir de quand sur le projet ?

Tali : Il y a presque onze ans j’ai commencé à trainer ici. J’avais plein de copains qui bossaient au bar. Et j’ai commencé à travailler pendant deux ans avec Motel Services à We Love Green, vers 2014-2015.

La Face B : Motel Services ce sont vos prestations de bar sur les festivals ?

Djavid : On a monté ça en 2011 avec le Pitchfork à Paris !

La Face B : Il y avait donc une vraie volonté, une provocation de la création de ce lieu finalement.

Djavid : Oui, on voulait vraiment rassembler autour de la musique. À vrai dire on ne retrouvait pas vraiment d’autres lieux comme ça à ce moment-là. Il y avait quelques bars « rock », mais « indie » ou « pop » moins.

La Face B : Vous n’avez jamais voulu vous étendre ? Changer de lieu ou faire du Motel une sorte de multinationale ?

Djavid : Pour le coup si on a ouvert pas mal de trucs, notamment un resto de fast-food indienne de 2011 à 2013, en même temps on avait Motel Services qui commençait, en 2012 il y avait le Pitchfork, le Trabendo, le nouveau resto. Après on a ouvert un autre resto de 2014 à 2016 qui s’appelait Dune, plus en mode bistronomie, vin nature & cie – pas trop indie du coup, donc après on a arrêté. Motel Services nous prenait plus de temps finalement. Et pour le lieu, notre voisine qui était au départ très contente d’être à côté d’un bar, a de moins en moins supporté, elle a vécu avec ce bar. J’en parlais avec Clément – membre du groupe Nor Belgraad et barman au Motel -, et Clément il a un traumatisme avec la sonnerie du téléphone. Le premier soir où on fêtait le départ de la voisine, on a fait exprès d’appeler le fixe du Motel et ça a fait sursauter tout le monde. Ce qui est pas mal en ce moment, c’est qu’on vit une espèce de période de grace où il n’y a personne sur le premier étage. Clément s’en donne a cœur joie sur les concerts.

Tali : Faudrait récupérer cet appart et en faire une annexe du Motel, un lieu pour faire dormir les musiciens, un gros dortoir (rires).

Djavid : En tout cas on a eu souvent des envies, mais nous les associés on a aussi vieilli, avançons dans la vie, faisons des enfants.

La Face B : Rétrospectivement, en regardant sur les 15 années, vous avez des anecdotes à raconter ? Autres que celles que tout le monde connait déjà.

Tali : Le problème c’est qu’il y en a plein qu’on ne peut pas dire (rires).

Djavid : Qui a couché avec qui etc. Mais même nous on ne sait pas tout ce qu’il s’est passé. Mais c’est vrai que la période 2007-2010 était pour nous particulièrement agitée. Les groupes qui se forment on en a vu pas mal, Requin Chagrin, Tame Impala etc.

Tali : Plus récemment y a Lou et Olivier Marguerit qui se sont rencontrés autour du projet de Nicolas Maury. Il y a The Long Goodbye qui s’est formé ici aussi.

La Face B : Pour les 15 ans au Trabendo, comment avez-vous imaginé toute la programmation ?

Djavid : C’est un peu compliqué, mais c’est que des copains. Le truc qui est un peu chiant c’est un peu comme quand tu fais ta liste d’invitations de mariage, t’as un peu peur d’oublier quelqu’un. Je me rends compte quand même qu’il y a pas mal de gens qui sont sur cette affiche des 15 ans, qui étaient déjà là sur l’affiche des 4 ans. Pour l’ouverture du resto on avait fait une semaine de concerts et c’était incroyable.

Tali : On avait déjà fêté les 10+1 ans on avait fait jusqu’à 2h ici, puis chez Dune ensuite, avec les barmans on passait chacun·e une heure derrière le bar pour pouvoir profiter, c’était quelque chose.

Djavid : C’est la première fois qu’on fait vraiment un gros événement labellisé comme ça. L’idée c’était aussi quand même d’avoir de vraies retrouvailles post-covid, sans masque, sans restriction etc. On est vraiment content·es de faire ça !

La Face B : Vous n’avez jamais vraiment voulu bosser dans la musique directement ?

Tali : Djavid il a eu un petit groupe ! (rires)

Djavid : Moi j’ai déjà bossé pour le coup pour un label en 2001…. J’ai fait manageur de groupe aussi quand même, on a vécu une aventure ensemble.

La Face B : Et là vous êtes parti·es pour encore 15 ans ? au moins ?

Djavid : Ça faut demander à Tali !

Tali : Je viens de devenir responsable du bar depuis presque un an, je vois une nouvelle génération qui arrive, ça se renouvelle bien. On était là depuis longtemps mais les vieux faisaient pas trop attention à nous.

La Face B : Est-ce qu’on peut parler de ce compte Twitter ?

Djavid : Je suis tout seul derrière tout ça (rires), mais il existe depuis longtemps, mais ça fait un an à peu près qu’au lieu de faire des blagues sur mon compte perso Facebook pour faire rire les vieux que je me suis mis sur Twitter. Ce qui est rigolo et ce que j’aime bien c’est le fait qu’il y ait beaucoup de trolls, et il y a plein de gens qui viennent au bar en me disant « ah mais vous êtes vraiment un bar en fait c’est pas une blague » (rires).

La Face B : Vous avez des choses que vous souhaiteriez ajouter ?

Djavid : Pour nous c’est vraiment cool d’avoir Clément qui a repris la prog. Avant le covid, on voulait un peu vendre, on en avait marre du lieu etc. et là ça reprend bien. Et pour la prog, plein de gens se sont cassés la gueule dessus, on reçoit beaucoup de demandes donc c’est pas simple. Clément il fait la prog, le son et le bar et c’est trop cool, c’est cohérent. Et c’est vrai qu’un des premiers trucs qu’il a voulu mettre en place c’est les rendez-vous récurrents avec La Face B. C’est cool de voir que tout se poursuive !


Les 15 ans du Motel au Trabendo ce vendredi 25.03

La playlist du Motel